Items, objectifs pédagogiques
Item 57 – Maltraitance et enfants en danger. Protection maternelle et infantile
- Repérer un risque ou une situation de maltraitance chez le nourrisson, l’enfant et l’adolescent.
- Argumenter la démarche médicale et administrative nécessaire à la protection de la mère et de l’enfant.
Item 13 – Certificats médicaux. Décès et législation.
- Préciser les règles générales d’établissement des certificats médicaux et leurs conséquences médico-légales, y compris les certificats de coups et blessures et notions d’ITT.
Avant de commencer…
« La protection de l’enfance vise à garantir la prise en compte des besoins fondamentaux de l’enfant, à soutenir son développement physique, affectif, intellectuel et social et à préserver sa santé, sa sécurité, sa moralité et son éducation, dans le respect de ses droits. Elle comprend des actions de prévention en faveur de l’enfant et de ses parents, l’organisation du repérage et du traitement des situations de danger ou de risque de danger pour l’enfant ainsi que les décisions administratives et judiciaires prises pour sa protection. » (art. L. 112-3 du Code de l’action sociale et des familles ; loi n° 2016-297 du 14 mars 2016 relative à la protection de l’enfant).
Les maltraitances bénéficient d’une définition récente depuis la loi 2022-140 du 7 février 2022 qui a été insérée dans le Code d’action sociale et des familles.
Les situations de mineurs en danger sont fréquentes dans la pratique pédiatrique puisqu’elles concerneraient plus d’un enfant sur 10. Il s’agit de situations difficiles à prendre en charge tant les résonances individuelles et collectives sont fortes. Elles justifient d’être repérées par les praticiens de premier re-cours puis prises en charge par les unités d’accueil pédiatriques enfant en danger (UAPED) d’aval qui travaillent en lien avec l’autorité judiciaire et les services de protection de l’enfant (protection administrative) dépendant de chaque conseil départemental.
Il est important pour le praticien de ne pas rester seul et de les traiter avec la même rigueur sémiologique que celle qui est de mise pour toutes les pathologies organiques. Les situations de maltraitance peuvent s’associer. Il convient de toujours évoquer la possibilité de plusieurs types de violences associées, par exemple des violences physiques ou psychologiques associées à des violences sexuelles.
I. Pour bien comprendre
A. Définitions
La maltraitance se définit comme toutes situations de violences physiques, sexuelles, psychologiques, toutes négligences lourdes ayant des conséquences graves sur la santé de l’enfant et sur son développement physique et psychologique. Elles sont souvent intriquées.
- Actes par « commission » :
- violences physiques : coups, claques, corrections… ;
- violences sexuelles : toute participation d’un enfant à des activités sexuelles, inappropriées à son âge et à son développement psychosexuel, qu’il subit sous la contrainte ou par la violence ou encore la séduction, ou qui transgressent les tabous sociaux ;
- violences psychologiques : dénigrement, humiliation, injonction paradoxale, rejet affectif, punition ou exigence éducative inadaptées à l’âge de l’enfant ou à ses possibilités ;
- violences conjugales ;
- cyberviolences : nouvelles formes de violences reliées aux nouvelles technologies telles que l’exposition aux images violentes ou pornographiques, le sexting (envoi-réception de message ou image à connotation sexuelle), l’happy slapping (enregistre-ment et diffusion d’agression de toutes natures) et le cyberharcèlement ;
- violences institutionnelles : violences subies hors de la famille en milieu collectif dans les institutions accueillant des enfants.
- Actes par « omission » :
- négligences : il s’agit d’une absence de réponse aux besoins fondamentaux de l’enfant (sécurité, santé, hygiène, scolarité, mise en collectivité…).
On regroupe sous le terme d’enfants en risque des enfants qui ne sont pas à proprement dit mal-traités, mais dont les conditions d’existence risquent de mettre en danger leur santé, leur sécurité, leur moralité, leur éducation ou la qualité des réponses à leurs besoins quotidiens.
Les situations décrites ci-dessus grèvent de façon importante l’état de santé des enfants concernés. Elles exposent à la survenue possible de complications graves à l’âge adulte, la maltraitance faisant partie des événements graves de l’enfance (Adverse Chidhood Evenements, ACE). En particulier, elles sont corrélées à l’augmentation de maladies graves et chroniques de l’adulte : désordres psychiques (addictions, maladie psychiatrique, dépressions, anxiété…), génésiques (IST, grossesses précoces, prématurité…) et somatiques (pathologies traumatologiques, maladies chroniques cardiovasculaires, cancer…).
B. Épidémiologie
L’épidémiologie française de la maltraitance aux enfants est imprécise, fondée sur des évaluations anciennes. La difficulté vient de l’absence d’homogénéité des données statistiques. Un travail est en cours sur ce sujet sous l’égide de l’Observatoire national de la protection de l’enfance (ONPE) et du Conseil national de la protection de l’enfance (CNPE).
Au 31 décembre 2020, le nombre de mineurs sur la France (hors Mayotte) bénéficiant d’au moins une prestation ou mesure relevant du dispositif de protection de l’enfance est estimé à 308 000 (21,4 pour 1 000 mineurs). En 2020, 49 enfants sont décédés dans le cadre intrafamilial. Des études internationales, plus précises, ont montré que suivant les pays étudiés, 11 à 15 % des enfants auraient subi des actes de maltraitance dans l’année précédente.
Les situations de danger concernent donc plus d’un enfant sur 10.
L’exposition à ces situations peut avoir des conséquences sur la santé physique et psychique, tout au long de la vie.
Les situations de danger sont difficiles à repérer car elles se heurtent à la sidération et au déni des professionnels. C’est la raison pour laquelle le praticien ne doit pas rester isolé mais qu’il puisse s’appuyer sur le conseil départemental et sur des structures hospitalières spécialisées telles que les UAPED.
II. Repérer une situation de maltraitance
A. Enquête clinique
1. Circonstances diagnostiques
Il existe schématiquement trois situations cliniques :
- l’enfant est accompagné par un parent ou un tiers car sa situation a conduit à ce que le diagnostic de violences, de négligences ou de danger soit suspecté par l’entourage ;
- qu’elle soit ou non le motif de la consultation, la présentation clinique (lésions cutanées et/ou muqueuses, tableaux neurologiques, détresse psychique, IST…) doit faire poser la question des violences ou des négligences graves à l’origine de ces constatations ;
- l’enfant a révélé des violences qui sont le motif de la consultation.
Il est alors essentiel de considérer trois axes forts de réponse :
- cet enfant nécessite-t-il des soins (antalgiques, bilan paraclinique, accompagnements…) ? Si oui, lesquels et avec quel degré d’urgence ?
- il est essentiel de consigner dans le dossier médical ce qui a été constaté dans la perspective d’une procédure administrative ou judiciaire ultérieure : les circonstances de la consultation (présence de tiers, propos spontanés ou après avoir été questionné), l’ensemble des données cliniques (lésions élémentaires, forme, taille, couleur, localisation…) et la présentation générale de l’enfant (cotation de la douleur, présentation, hygiène, rapport à l’examinateur, développement psychoaffectif…) ;
- la protection de ce mineur est-elle assurée dans les circonstances de la consultation ? L’hospitalisation devra être facilement envisagée si la protection n’est pas assurée de manière certaine. En outre, elle permettra d’accueillir et de préserver la parole de l’enfant et de consolider le diagnostic. Des mesures de protection urgentes peuvent être prises par voie judiciaire le cas échéant.
2. Données anamnestiques
Leur recueil doit être assuré de manière rigoureuse et non interprétative.
Le carnet de santé est un outil indispensable et permet d’évaluer :
- la situation périnatale ;
- la qualité du suivi médical ;
- le développement psychoaffectif ;
- la situation vaccinale ;
- la croissance staturo-pondérale ;
- l’existence d’un handicap ou d’une maladie chronique.
Dans ces situations, l’histoire familiale et les antécédents familiaux sont importants à colliger ainsi que les conditions de la grossesse, la naissance et les premiers mois ou années de vie (selon l’âge de l’enfant).
Données anamnestiques d’attention :
- la question du caractère plausible de ce qui est rapporté au regard des lésions constatées doit à chaque fois se poser au clinicien ;
- le délai entre la date d’apparition des lésions et la consultation est un indicateur important de la prise en compte de la situation de l’enfant ;
- la mise en cause d’un tiers, a fortiori quand il s’agit d’un jeune enfant ou d’un animal domestique, doit attirer l’attention de l’examinateur ;
- la cotation de la douleur depuis l’apparition des faits qui motivent la consultation doit être notée dans le dossier.
Il existe aussi des facteurs de risque qui peuvent être retenus (tableau 10.1). Certains sont familiaux, d’autres sont propres à l’enfant. Ils doivent être recueillis scrupuleusement mais ne constituent pas pour autant, à eux seuls, des facteurs prédictifs de survenue de violences.
Tableau 10.1. Facteurs de risque de survenue de maltraitance.
Facteurs de risque familiaux |
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Facteurs de risque propres à l’enfant |
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3. Données cliniques
Examen physique complet et soigneux
Il devra être expliqué à l’enfant et à l’adolescent et le plus souvent possible pratiqué en présence d’un tiers (collègue soignant). Le refus d’examen de certaines zones devra être respecté même lorsque la demande d’examen émane de l’autorité judiciaire.
Le comportement de l’enfant sera observé au cours de l’entretien et des échanges initiaux (ni-veau de langage, attention, proximité avec l’interlocuteur, gestuelle…).
Données de l’examen général :
- présentation, hygiène, aspect de dénutrition ou de surcharge pondérale, mobilité générale ;
- poids, taille et périmètre crânien avec reconstitution des courbes de croissance ;
- inspection des téguments ;
- analyse de l’état d’hygiène bucco-dentaire ;
- l’examen périnéal sera réalisé s’il est accepté par l’enfant, s’il est indiqué (douleurs, saignements, inquiétudes…) et si l’examinateur a les compétences pour le faire.
Les lésions des téguments seront décrites :
- type de lésion élémentaire :
- ecchymose : suffusion hémorragique tissulaire ;
- hématome : collection sanguine dans une cavité néoformée ;
- plaie : perte de substance cutanée ;
- taille, localisation, forme éventuelle, couleur ;
- soins éventuellement entrepris.
Ces lésions peuvent être photographiées avec un repère métrique et l’identité de l’enfant. Elles seront consignées dans son dossier médical. Ces lésions peuvent avoir un aspect « en forme » qui permet d’évoquer un agent vulnérant : main, doigts, câble électrique, boucle de ceinture…
Le plus souvent, les enfants victimes de violences présentent ou présenteront des signes de psychotraumatisme complexe qu’il est important de repérer, en particulier un état dissociatif qui pourrait laisser penser qu’ils sont indifférents aux événements au point de les rendre peu cré-dibles. Il s’agit d’un piège à avoir en tête pour mieux le repérer.
De la même manière, il est essentiel de repérer les situations de négligences. Il s’agit de situations fréquentes dans lesquelles les besoins fondamentaux des enfants ne sont pas com-blés. Elles sont à l’origine de comportements sans lien avec une maladie préexistante : attache-ment indifférencié, instabilité, irritabilité, colères, retard psychomoteur…
Ces situations constituent des vulnérabilités latentes importantes qui peuvent se révéler à tout moment de l’évolution en particulier sur le plan psychoaffectif. Un des marqueurs physiques des situations de négligences les plus pertinents est le mauvais état bucco-dentaire.
Signes d’alerte clinique : « feux rouges »
Face à des lésions d’allure traumatique, l’examinateur doit prendre en considération dans son raisonnement clinique quatre aspects : l’âge de l’enfant, le nombre, la forme et la localisation des lésions d’allure traumatique constatées.
Retenir comme « feux rouges » :
- la survenue de lésion d’allure traumatique ou lésion sentinelle (ecchymose même de petite taille, plaie autre que simple griffure sur la partie médiane de la face, fracture…) avant l’âge de la marche (fig. 10.1A). La gravité de ces situations n’est pas proportionnelle à la taille de la lésion. Même des lésions de petite taille sans explication plausible doivent alerter. Cette dé-couverte doit conduire à une hospitalisation en urgence ;
- un nombre de lésions cutanées supérieur ou égal à 15 chez un enfant déambulant en l’absence de traumatisme bien identifié et de pathologie de l’hémostase doit alerter l’examinateur. Si ces lésions sont situées sur des zones suspectes, l’inquiétude est d’autant plus grande (fig. 10.1B) ;
- les lésions « en forme » (doigts, mains, ceinture, bâton…) sont très préoccupantes et peuvent évoquer la mécanique traumatique ;
- certaines localisations sont particulièrement suspectes de lésions infligées : joues, oreilles, cou, tronc, fesses, face postérieure des cuisses (fig. 10.2).
4. Présentations cliniques liées à l’âge
- Chez les nourrissons, les situations les plus fréquemment rencontrées sont les situations de négligences et les violences physiques.
- Chez les enfants plus âgés, il est essentiel d’être vigilant dans des situations de difficultés scolaires brutales ou au contraire de surinvestissement de la scolarité.
- Chez l’adolescent, les situations d’autoagressivité (scarifications, restriction alimentaire, dévalorisation, suicides et tentatives de suicide) ou d’hétéroagressivité (violences agies en particu-lier) doivent évoquer des violences subies.

Fig. 10.1. Lésions ecchymotiques multiples de l’avant-bras et de la paume de la main (A). Brûlures de cigarette sur le siège (B).

Fig. 10.2. Localisations suspectes de lésions infligées et localisations habituelles en traumatologie de l’enfant.
Illustration de Carole Fumat d’après : Balençon M. Lésions ecchymotiques de l’enfant non déambulant. Pas à pas en pédiatrie. Arbres décisionnels commentés des Sociétés de pédiatrie. 2019.
5. Diagnostic différentiel
Comme pour toutes les autres pathologies, la recherche de diagnostics différentiels pouvant expliquer les signes cliniques est un temps essentiel de la démarche diagnostique :
- maladie de l’hémostase ;
- maladie osseuse constitutionnelle (ostéogenèse imparfaite…) ;
- maladie dermatologique ;
- maladies métaboliques ;
- lésions congénitales…
Ces maladies, qu’il convient d’éliminer avant de poser le diagnostic de traumatisme infligé, sont moins fréquentes que les situations de violence.
Les diagnostics peuvent être aussi intriqués. Les maladies chroniques constituent également un facteur de risque de maltraitance.
Outre la protection qu’elle confère à l’enfant, l’hospitalisation se justifie par la nécessité de faire un bilan des lésions constatées et de surveiller leur évolution dans le temps pour poser un diagnostic précis.
Face au constat de lésions d’allure traumatique :
- éléments anamnestiques d’alerte :
- absence d’explication ou caractère peu plausible de ce qui est rapporté au regard des lésions ;
- délai inexplicable entre la date d’apparition des lésions et la consultation ;
- mise en cause d’un tiers ;
- éléments cliniques d’alerte :
- âge de l’enfant : survenue avant l’âge de la marche ;
- nombre de lésions cutanées ≥ 15 chez un enfant déambulant ;
- lésions « en forme » ;
- lésions cutanées en zones suspectes (fig. 10.2).
B. Investigations paracliniques
1. Examens biologiques
En cas lésions cutanées hématiques suspectes :
- NFS, étude complète de l’hémostase (dont facteur XIII).
En cas de lésions osseuses à type de fracture :
- sang : calcémie, phosphorémie, phosphatases alcalines, parathyroïde hormone, 25(OH)-vitamine D, 1,25(OH)2-vitamine D, vitamine C si contexte de carences ;
- urines de 24 heures : Ca, P, créatinine U, taux de réabsorption du phosphore.
En cas de suspicion de violences :
- dosage de la lipase et des transaminases (signe indirect de traumatisme abdominal) ;
- bandelette urinaire (recherche d’hématurie).
En cas de découverte d’hématome sous-dural :
- dosage du cuivre, de la céruléoplasmine (maladie de Menkés) ;
- chromatographie des acides organiques urinaires (acidurie glutarique de type 1).
Dans tous les cas, les toxiques sanguins et urinaires doivent être facilement recherchés.
2. Examens d’imagerie
Les enfants suspects de violences doivent bénéficier d’examens d’imagerie permettant de mettre en évidence d’éventuelles lésions en particulier osseuses qui peuvent passer inaperçues du fait de leur faible expression douloureuse.
Chez l’enfant de moins de 2 ans
Examens systématiques :
- examens radiographiques du squelette complet respectant le protocole radiologique précis d’analyse segment de membre par segment de membre, ± scintigraphie osseuse ou contrôle radiologique à 10 jours pour objectiver des lésions osseuses passées inaperçues sur les premiers clichés standards ; les radiographies seront relues par deux radiologues spécialisés en pédiatrie ;
- imagerie cérébrale : TDM en phase aiguë si orientation neurologique avec reconstruction tri-dimensionnelle, IRM en complément ou en 1re intention si absence de symptôme neurologique ;
- échographie abdominale : à la recherche de lésions profondes.
Le syndrome de Silverman est défini par la découverte radiologique chez un nourrisson de lésions osseuses d’âges différents (fig. 10.3). Ces lésions sont en lien avec des traumatismes infligés et n’ont pas d’expression clinique repérée.
Comme pour les lésions ecchymotiques de l’enfant non déambulant, la survenue de fracture chez un nourrisson qui ne se déplace pas ou qui n’a pas présenté de traumatisme particulier doit conduire à une hospitalisation.
Plus la découverte de lésion osseuse est fortuite, plus le risque de traumatisme infligé est élevé.

Fig. 10.3. Syndrome de Silverman.
A. Cliché thoracique de face. Lésions traumatiques costales bilatérales anciennes localisées au niveau de la jonction arc postérieur-arc moyen à gauche, des arcs postérieurs, au niveau des côtes supérieures droites ainsi que des arcs latéraux de ce même côté. B. Radiographie du tibia. Fracture en « anse de seau » métaphysaire tibiale supérieure, non pathognomonique mais toujours hautement suspecte.
Lésions osseuses les plus évocatrices de syndrome de Silverman :
- lésions métaphysaires avec des arrachements en coin ou en « anse de seau » en lien avec des mécanismes de tractions ± torsion ;
- lésions périostées qui correspondent à des décollements du périoste par des mécanismes de torsion ;
- lésions par choc direct.
Les diagnostics différentiels sont les maladies osseuses constitutionnelles. Elles sont beaucoup moins fréquentes que les traumatismes infligés.
Chez l’enfant de plus de 2 ans
Les examens seront faits au cas par cas en fonction de la clinique.
3. Autres
En cas de suspicion de secouement : fond d’œil voir § IV.A. Syndrome du bébé secoué.
En cas de sévices sexuels : voir § IV.B. Violences sexuelles.
Les bilans biologiques ou radiologiques dans un contexte de suspicion de violence ont pour but d’éliminer les diagnostics différentiels et de rechercher des lésions traumatiques associées.
Comme pour les lésions cutanées, la découverte fortuite de fracture avant l’âge de la marche doit conduire à une hospitalisation et à suspecter des violences.
Grâce à une approche multidisciplinaire, il convient d’éliminer avec grande attention les maladies qui peuvent mimer un tableau de violences physiques en particulier les maladies osseuses fragilisantes. Pour autant, ces maladies restent moins fréquentes que les situations de violences. La présence concomitante d’une maladie chronique et d’une situation de danger reste toujours possible.
III. Argumenter la démarche médicale et administrative
A. Orientation initiale (fig. 10.4)
Il convient d’apprécier l’urgence du traitement de la situation conditionnée par :
- la nécessité de soins urgents ;
- la mise en œuvre d’une protection urgente ;
- la préservation des éléments de preuve et la nécessité d’un constat médico-légal urgent.
Dans les situations d’urgence, l’enfant doit être orienté vers une équipe pédiatrique hospitalière référente : unités d’accueil pédiatriques des enfants en danger (UAPED).
À défaut, le médecin pourra être amené à rédiger un signalement judiciaire à destination du procureur de la République du tribunal judiciaire territorialement compétent pour que des mesures de protection du mineur soient mises en œuvre et que d’éventuelles suites pénales soient don-nées.
Dans les situations moins urgentes, le praticien ayant fait le diagnostic de danger peut solliciter les services du conseil départemental territorialement compétent. Il adresse alors une information préoccupante à la CRIP (cellule de recueil des informations préoccupantes).
La suspicion d’une situation de danger chez un enfant doit conduire à l’évaluation de l’ensemble des enfants vivant dans les mêmes conditions.

Fig. 10.4. Orientation initiale en cas de situation de danger diagnostiquée.
Face à une situation de maltraitance, le médecin doit être le protecteur de l’enfant.
Dans le doute, il peut solliciter la CRIP du conseil départemental, les UAPED.
En cas d’urgence et de refus de soin, il saisira le procureur de la République en urgence.
B. Prise en charge médicale
Quelles que soient les orientations prises, la coordination des soins est essentielle et faite par les UAPED dont la généralisation à tous les hôpitaux est prévue.
Mesures urgentes en cas de traumatismes infligés :
- dans tous les cas : cotation de la douleur et prise en charge thérapeutique ;
- si lésions neurologiques : discussion d’un transfert en milieu neurochirurgical ;
- si lésions orthopédiques : avis orthopédique sur le site où est hospitalisé l’enfant ;
- si lésions tégumentaires : soins des plaies et des brûlures, SAT-VAT (sérum antitétanique + dose vaccinale antitétanique si vaccination non à jour).
En cas de violences sexuelles :
- contraception d’urgence (selon l’âge) et discussion d’un traitement antirétroviral en fonction de la nature de l’agression et du délai entre l’agression et la consultation ;
- organisation du dépistage des IST et du suivi sérologique post-exposition.
Un soutien médico-psychologique pour l’enfant et sa famille doit être assuré ainsi que l’organisation des soins d’aval.
La prise en charge des enfants en danger doit être éthique et globale.
Elle sera adaptée à l’âge de l’enfant.
Elle se fera le plus souvent possible dans une unité de lieu (UAPED).
La possibilité d’une hospitalisation dans ce contexte doit toujours rester à l’esprit du médecin pour protéger l’enfant, le soigner et organiser d’éventuelles démarches ultérieures.
C. Prise en charge médico-légale et administrative
1. Préambule
Tout professionnel a l’obligation de mettre en œuvre les mesures nécessaires pour protéger un mineur en danger. Il peut se délier du secret professionnel (art. 226-13 du Code pénal) en informant les services de protection de l’enfance administratifs ou judiciaires territorialement compétents (information préoccupante ou signalement judiciaire).
Il existe en France deux systèmes de protection :
- une protection administrative, confiée aux conseils départementaux, chefs de file de la protection de l’enfance compétents territorialement ;
- une protection judiciaire, confiée aux juges des enfants. Le procureur de la République est amené à traiter en urgence les situations des mineurs nécessitant une protection urgente. Il est de sa compétence de diligenter à la fois une enquête pénale et de mettre en œuvre les mesures de protection qui s’imposent dans un contexte de danger grave et imminent pour un mineur (ordonnance de placement provisoire en particulier).
2. Information préoccupante
Une information préoccupante est définie comme tout élément d’informations (sociales, médicales ou autres), quelle que soit sa provenance, susceptible de laisser craindre qu’un enfant se trouve en situation de danger ou de risque de danger.
Celles-ci sont portées à la connaissance de la CRIP (cellule de recueil des informations préoccupantes), service qui dépend des conseils départementaux, par le biais d’un écrit formalisé qui comporte les éléments suivants dans un langage simple et accessible :
- renseignements administratifs sur l’enfant et sa famille (nom, prénom, date de naissance, adresse(s), téléphone) ;
- coordonnées du médecin ;
- éléments à l’origine de l’inquiétude des professionnels ;
- facteurs de risque repérés ;
- propos de l’enfant et des accompagnants (cités entre guillemets, au conditionnel) ;
- données cliniques pertinentes permettant de retenir une situation d’enfance en danger ;
- comportement de l’enfant et/ou des parents ;
- date, signature, tampon.
Les parents sont informés de cette transmission, « sauf intérêt contraire de l’enfant » (art. 226-2-1 du Code de l’action sociale et des familles). L’information préoccupante marque l’inquiétude du professionnel à l’égard de la situation dans laquelle est l’enfant et la nécessité d’évaluation et de soutien.
Les suites au terme de l’évaluation pluridisciplinaire et pluriinstitutionnelle qui peuvent y être données sont décrites dans la figure 10.5.
La CRIP, de composition multidisciplinaire, a un rôle de recueil, de traitement et d’évaluation des informations préoccupantes qui lui sont adressées. Elle transmet les données épidémiologiques anonymisées à l’observatoire départemental de protection de l’enfance.
La loi prévoit depuis 2016, la nomination dans chaque département d’un médecin référent Protection de l’enfance. Celui-ci est chargé d’établir des liens de travail réguliers entre les services départementaux (aide sociale à l’enfance, PMI), la CRIP et les médecins exerçant dans le département (médecins libéraux et hospitaliers, en particulier médecins généralistes, pédiatres et urgentistes), ainsi que les médecins de santé scolaire, dans des conditions définies par voie réglementaire. En outre, l’organisation du suivi médical des enfants confiés à l’aide sociale à l’enfance est de sa compétence.

Fig. 10.5. Suites possibles après information préoccupante.
PMI : protection maternelle et infantile ; SSD : service social départemental.
3. Signalement
En cas de maltraitance grave, de nécessité de protection immédiate ou de mise en œuvre d’une enquête pénale dans un contexte délictuel ou criminel, un signalement sera rédigé.
Les règles de rédaction du signalement sont les mêmes que celles de la rédaction d’une information préoccupante. Les constats issus de l’examen clinique sont exposés au présent. Ce qui n’est pas médicalement constaté doit être rapporté au conditionnel. Les propos seront cités entre guillemets assortis d’une locution introductive (Il déclare…, Il rapporte…).
Un modèle est disponible sur le site internet du CNOM (voir Références).
Une copie sera adressée à la CRIP territorialement compétente.
Le traitement du signalement judiciaire sera effectué par le procureur de la République. Les services du parquet des tribunaux judiciaires sont accessibles 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24.
Le traitement de cet écrit se fera sur le volet pénal et sur le volet civil qui permet de s’assurer de la protection du mineur. Le procureur a « l’opportunité des poursuites ».
Les suites données possibles sont décrites dans la figure 10.6.
4. Certificats
Le certificat médical est la forme sous laquelle un médecin témoigne de l’état de santé d’une personne tel qu’il l’a constaté dans son exercice. C’est un document médical qui doit être complet et précis. Le médecin engage sa responsabilité disciplinaire, civile et pénale.
Le certificat médical ne se justifie que si un texte législatif ou réglementaire l’exige.

Fig. 10.6. Suites possibles après signalement judiciaire.
- Adresser systématiquement une copie du signalement judiciaire à la CRIP.
CRIP : cellule de recueil des informations préoccupantes.
En matière de violence sur mineurs, un médecin peut être amené à rédiger deux types de certificats :
- à la demande d’un tiers ;
- à la demande de l’autorité judiciaire, sur réquisition.
La demande de certificat par un tiers dans ce contexte doit toujours poser la question au praticien de la nécessité de rédaction d’une information préoccupante ou d’un signalement judiciaire.
Certificats à la demande d’un tiers
La rédaction de ce certificat se fera toujours après un examen clinique soigneux. Il sera rédigé sur papier à en-tête du médecin. Il comprend :
- l’identité du médecin (nom, prénom, titre, adresse) ;
- l’identité alléguée de la personne tiers : nom, prénom, date de naissance (cette identité n’est pas vérifiée et il sera donc nécessaire de porter la mention : « X a déclaré être… » « se pré-sentant comme étant… », etc.) ;
- l’identité de l’enfant présent à la consultation ;
- la date et l’heure de l’examen ;
- les faits médicalement constatés après un examen clinique complet et minutieux ;
- les mentions à indiquer en fin de certificat médical : « remis en main propre », « établi à la demande de (nom(s) des ou du représentant légal) » ;
- la date de rédaction du certificat médical si elle est différente de celle de l’examen, la signature et le tampon du praticien.
Il est essentiel de garder un double du certificat médical dans le dossier du patient.
Ne doivent pas figurer sur le certificat médical :
- l’identité de l’auteur présumé des faits ;
- une quelconque datation des faits ;
- une quelconque imputabilité.
Certificats sur réquisitions
La réquisition d’une personne est l’injonction faite à un professionnel par une autorité judiciaire ou administrative d’effectuer un acte urgent.
Les demandes médicales en pédiatrie médico-légale recouvrent principalement les demandes d’examen clinique dans des contextes de violences subies de toutes natures.
Ces demandes à personnes qualifiées sont motivées par la nécessité de procéder à des constatations ou à des examens techniques ou scientifiques. Une réponse rapide et de qualité permet de préserver la bonne marche de l’enquête en cours.
Sauf s’il est expert inscrit auprès d’une cour d’appel, le médecin prêtera préalablement serment par écrit d’apporter son concours à la justice en son honneur et conscience. La personne requise doit accomplir sa mission dans les délais qui lui sont impartis avec conscience, objectivité et im-partialité.
Il est essentiel, sauf à mésinterpréter certains signes cliniques, que le praticien soit rompu à l’expression clinique pédiatrique du psychotraumatisme et au développement psychomoteur et staturo-pondéral de l’enfant.
La réforme de la médecine légale a permis un maillage territorial pour répondre à ces demandes d’actes. Pour autant, le parquet est libre de désigner le professionnel de son choix.
Le médecin requis doit répondre uniquement aux questions qui lui sont posées.
Les réquisitions ne sont pas des expertises, tant sur le fond que sur la forme.
Le juge n’est pas lié aux conclusions de l’expert. Il est libre par exemple de modifier la durée d’une incapacité totale de travail fixée par ce professionnel s’il estime qu’elle n’est pas en accord avec ce qui est décrit et rapporté.
5. Notion d’ITT en pédiatrie
L’incapacité totale de travail est une notion jurisprudentielle. Elle peut être fixée chez l’enfant. Il s’agit du temps pendant lequel, dans les suites d’un événement traumatique et en lien avec celui-ci, la personne n’est plus en capacité d’effectuer les gestes de la vie courante (manger, se dé-placer, jouer, interagir avec ses proches…).
Elle est le plus souvent demandée au médecin par voie judiciaire et joue un rôle décisif dans la qualification de l’infraction.
Tout certificat engage la responsabilité du médecin. Seuls les faits médicalement constatés peuvent figurer dans celui-ci. Aucune imputabilité, interprétation hâtive ou désignation de tiers ne doit apparaître.
D. Suivi et mesures préventives
1. Suivi de l’enfant
Toute suspicion ou maltraitance avérée doit bénéficier d’un suivi prolongé.
La coordination des structures impliquées doit se poursuivre, associant dans un travail interdisciplinaire la structure à l’origine de l’information (IP ou signalement) : UAPED le plus souvent pour les enfants hospitalisés, le médecin traitant, la PMI (pour les enfants de moins de 6 ans), le médecin référent en Protection de l’enfance du conseil départemental, les services de l’aide sociale à l’enfance (ASE) et les services judiciaires.
L’objectif commun est la protection de l’enfant.
Des objectifs complémentaires dépendent des qualifications des structures : soins, mesure éducative ou judiciaire, prise en charge de la famille.
Le suivi à long terme doit être organisé pour prévenir les possibles conséquences somatiques, psychologiques et sociales de ces situations.
2. Place de la prévention
- lieu aux futurs parents : entretien médico-social au 4e mois de grossesse, campagnes de prévention des secousses, information sur les pleurs, accompagnement de la parentalité, détection des facteurs de risque. Les visites médicales obligatoires dites préventives autour des nourrissons, des enfants et, depuis 2019, des adolescents sont des moments de dialogue avec les parents autour d’une promotion de l’éducation non violente.
- La prévention secondaire a pour objectif de repérer les situations de maltraitance pour protéger les enfants. Les soignants et particulièrement les médecins doivent identifier ces situations, reconnaître la séméiologie de cette pathologie et connaître les circuits des informations préoccupantes et des signalements.
- La prévention tertiaire doit éviter les récidives en protégeant les enfants par des mesures éducatives et parfois judiciaires. La surveillance prolongée a de plus l’objectif de prévenir les conséquences à long terme de ces situations de violence.
IV. Points clés à propos de tableaux cliniques
A. Syndrome du bébé secoué et traumatisme crânien infligé
1. Préambule
Le syndrome du bébé secoué est un sous-ensemble des traumatismes crâniens infligés dans lequel c’est le secouement, seul ou associé à un impact, qui provoque le traumatisme crânien.
Il s’agit d’un traumatisme crânien dit « à haute cinétique » comparable dans sa violence à un accident de la voie publique.
Les mouvements de secouement multidirectionnels peuvent être à l’origine de différents types de lésions : saignement sous-dural par arrachement des veines ponts, lésions parenchymateuses, lésions cervicales à type de coup de fouet, saignements rétiniens.
Le syndrome du bébé secoué survient la plupart du temps chez un nourrisson âgé de moins de 1 an. Chaque année en France, environ 200 enfants en seraient victimes.
Toute suspicion doit conduire à la réalisation d’un scanner cérébral en urgence qui permettra d’affirmer ou d’infirmer le diagnostic de saignement intracérébral.
2. Diagnostic
Signes évocateurs
Signes cliniques possibles (surtout si associés) :
- signes neurologiques : convulsions, hypotonie axiale, troubles de vigilance, arrêt des acquisitions ou régression psychomotrice, bombement de la fontanelle antérieure, changement de couloir de la courbe du périmètre crânien ;
- signes généraux : pâleur, malaise grave, pauses respiratoires, irritabilité ;
- signes digestifs : vomissements sans diarrhée ;
- association inconstante à des ecchymoses du thorax et des bras (points d’enserrement).
Signes radiologiques possibles (TDM cérébrale) :
- hématomes sous-duraux habituellement plurifocaux (en particulier au niveau de la faux du cerveau ou de la fosse postérieure), parfois associés à des hémorragies sous-arachnoïdiennes, signe de rupture de veines ponts (fig. 10.7) ;
- lésions cérébrales anoxiques, œdémateuses ou à type de contusion.

Fig. 10.7. Hématome sous-dural aigu frontopariétal bilatéral.
TDM cérébrale sans injection. Coupe axiale. Hématomes sous-duraux aigus frontopariétal gauche et frontal droit. Le sang frais apparaît hyperdense sur une coupe sans injection.
Compléments d’examens
Imagerie :
- IRM cérébrale + région cervicale et moelle spinale ;
- radiographies du squelette, scintigraphie osseuse.
Examen ophtalmologique avec fond d’œil (après dilatation) :
- hémorragies rétiniennes, quasi pathognomoniques si multiples, profuses ou éclaboussant la rétine jusqu’à sa périphérie ; absentes dans environ 20 % des cas ;
- œdème papillaire en cas d’HTIC.
Bilan biologique :
- NFS, hémostase ;
- bilan pour éliminer des maladies de l’hémostase et des maladies génétiques rares (acidurie glutarique, maladie de Menkès).
Le syndrome du bébé secoué correspond à un traumatisme crânien infligé d’une rare violence.
Il survient classiquement dans la première année de vie. Il doit être évoqué devant un décrochage du périmètre crânien, des troubles neurologiques ou des troubles digestifs frustes.
Sa suspicion justifie une hospitalisation en urgence pour réaliser un bilan clinique et paraclinique exhaustif et protéger le nourrisson.
B. Violences sexuelles
1. Généralités
Le terme d’abus sexuel n’est plus utilisé en France. Il correspond à une traduction de la locution anglaise de « sexual abuse ». Il est plus correct d’utiliser le terme de violences sexuelles même si ces situations sont le plus souvent commises sans violence physique ou verbale mais plutôt par d’autres biais que sont l’intimidation, la séduction, l’autorité…
Les conséquences à court, moyen et long terme sont extrêmement graves.
2. Diagnostic
Circonstances
Situations possibles :
- l’enfant révèle spontanément des faits de nature sexuelle ;
- l’enfant présente des anomalies de l’examen clinique périnéal ;
- l’entourage se pose la question de faits de nature sexuelle subis en raison de :
- troubles du comportement ;
- différents et conflits familiaux ;
- révélations après des questionnements intrusifs ;
- signes fonctionnels divers (énurésie, encoprésie, douleurs abdominales, céphalées, troubles du comportement alimentaire…).
Les violences sexuelles sont le plus souvent commises au sein des familles ou par des adultes qui connaissent préalablement l’enfant.
Les fausses allégations spontanées d’un enfant sont très rares. Il appartient au médecin d’accueillir ses révélations et de ne pas le questionner et/ou de douter de la véracité des faits.
Chez l’enfant jeune, il convient d’être très préoccupé par des propos spontanés évoquant des faits de nature sexuelle subis.
Chez l’adolescent, les actes d’auto- et d’hétéroagressivité en particulier les tentatives de suicide, les scarifications et l’apparition de troubles du comportement alimentaire doivent faire poser la question de violences subies en particulier de nature sexuelle.
Entretien
Le mineur doit être vu seul ou accompagné en fonction de ses souhaits.
Il conviendra de ne pas poser de question fermée ou suggestive aux enfants afin de ne pas polluer leur mémoire et induire leur parole. Les questions seront ouvertes (« raconte-moi, dis-moi tout sur… ») avec un vocabulaire adapté à l’âge de l’enfant.
Données à recueillir :
- révélations, conditions de celles-ci, tiers présents lors de la consultation, délai entre les faits et la consultation et l’existence de contact persistant avec l’auteur ;
- asthénie, idées noires, qualité du sommeil et de l’alimentation, scolarité et rapports avec les pairs, rapports intrafamiliaux, propreté, troubles du comportement, participation à des jeux sexuels, consommation de toxiques, contraception (adolescents) ;
- chez les adolescents : cotation du stade pubertaire, date des premières et dernières règles, rapports sexuels antérieurs ou postérieurs aux faits allégués, contraception utilisée.
Examen clinique
Avec l’accord du mineur, un examen clinique global sera réalisé à la recherche de signes de violences (lésions cutanées et/ou muqueuses d’allure traumatique) et de négligences (en particulier hygiène et état bucco-dentaire).
Un schéma sera réalisé ainsi que d’éventuelles photographies (avec l’accord du mineur).
Un examen périnéal ne sera fait que s’il est accepté par le mineur et si sa réalisation est pertinente, par un opérateur entraîné. Pour éviter une position duelle, cet examen sera réalisé en présence d’un tiers soignant rassurant pour l’enfant.
Orientation
En cas de suspicion de faits subis de nature sexuelle, le mineur sera référé à une équipe spéciali-sée (UAPED). La prise en charge en urgence de ces situations repose sur :
- la nécessité de soins urgents (traitement antirétroviral, soins médicaux et/ou chirurgicaux, soins pédopsychiatriques…) ;
- la nécessité de protection du mineur vis-à-vis de l’auteur présumé des faits ;
- l’urgence médico-judiciaire à effectuer des prélèvements ou constater des lésions d’allure traumatique (classiquement dans les 5 jours suivant les faits).
En dehors de ces situations d’urgences, l’évaluation sera organisée rapidement et l’enfant référé en consultation pédiatrique spécialisée.
Les suspicions de violences sexuelles reposent souvent sur des éléments rapportés par l’enfant, des anomalies d’examen clinique ou des suspicions fondées ou non de l’entourage.
Elles sont souvent difficiles à caractériser chez l’enfant. Elles justifient d’une prise en charge spécialisée en pédiatrie médico-légale.
Le praticien s’attachera à ne pas poser de question suggestive à l’enfant, à référer l’enfant à une équipe spécialisée (UAPED).
Références
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CNOM. Sévices à mineur : modèle type de signalement. https://www.conseil-national.medecin.fr/sites/default/files/modele_signalement_mineur.pdf |
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Groupe SFIPP (Société Francophone d’imagerie Pédiatrique et Périnatale). Recommandations pour l’exploration d’une suspicion de maltraitance. Expertise médico-légale. 2017. https://sfip-radiopediatrie.org/references-medico-legales/ |
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Balençon M. Lésions ecchymotiques de l’enfant non déambulant. Pas à pas en pédiatrie. Arbres décisionnels commentés des Sociétés de pédiatrie. 2019. https://pap-pediatrie.fr/files/13_lesions_ecchymotiques_de_lenfant_non_deambulant.pdf |
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Chambost H. Démarche devant les bleus faciles. Pas à pas en pédiatrie. Arbres décisionnels commentés des Sociétés de pédiatrie. 2018. https://pap-pediatrie.fr/files/demarche_diagnostiquedevant_des_bleus_faciles.pdf |
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Giraud Escoffier P. L’adolescent en danger aux urgences. Pas à pas en pédiatrie. Arbres décisionnels commentés des Sociétés de pédiatrie. 2012. https://pap-pediatrie.fr/files/giraud-escoffier_0.pdf |