Infections urinaires

Texte

 

ITEM 161 Infections urinaires de l'enfant et de l'adulte

  • Interpréter les résultats des bandelettes urinaires et des examens cytobactériologiques des urines
  • Diagnostiquer et traiter une cystite aiguë.
  • Connaître la conduite à tenir face à une cystite récidivante.
  • Diagnostiquer et traiter une pyélonéphrite aiguë, identifier les situations nécessitant une hospitalisation.

 

Avant de commencer…

Les infections urinaires sont parmi les infections bactériennes les plus fréquentes en pédiatrie.

En cas de fièvre sans point d'appel évident, il faut réaliser une BU ± ECBU (avant l'âge de 1 mois, l'ECBU doit être systématique) pour éliminer une infection urinaire.
Le résultat de l'ECBU doit être interprété en tenant compte de la qualité du prélèvement urinaire et du contexte clinique. L'ECBU de contrôle après traitement n'a aucun intérêt.
Le seul examen d'imagerie à réaliser en première intention est l'échographie rénale et des voies urinaires.

Les infections urinaires chez l'enfant sont le plus souvent secondaires à des troubles de l'élimination mais une uropathie malformative sous-jacente devra systématiquement être recherchée.

 

I. Pour bien comprendre

A. Préambule

Le terme d'infection urinaire regroupe des contextes cliniques différents :

  • l'infection urinaire fébrile, ou pyélonéphrite aiguë (PNA) : infection atteignant le parenchyme rénal, avec de possibles complications ;
  • l'infection urinaire basse, ou cystite aiguë : infection localisée à la vessie, habituellement bénigne.

Le diagnostic d'infection urinaire ne peut être affirmé que par l'examen des urines, qui met en évidence des quantités significatives de bactéries et de leucocytes.

Ce qui distingue les infections urinaires de l'enfant de celles de l'adulte :

  • la fréquence des reflux vésico-urétéraux (RVU) primitifs ou secondaires ;
  • le risque de bactériémie ou de septicémie avant l'âge de 3 mois ;
  • la stratégie antibiotique excluant toute prescription de traitement minute (chez l'enfant non pubère) et de quinolones.

 

B. Épidémiologie

Les infections urinaires sont parmi les infections bactériennes les plus fréquentes. Leur prévalence dépend de multiples facteurs, notamment de l'âge et du sexe : elles affectent 1 % des enfants âgés de moins de 2 ans, avec une prédominance masculine durant les premiers mois de vie et une prédominance féminine ensuite.
Chez les nourrissons âgés de moins de 1 an, l'infection urinaire est une PNA dans 95 % des cas. Toute fièvre inexpliquée à cet âge doit faire suspecter une infection urinaire.

E. coli est le germe en cause dans environ 80 % des infections urinaires. Les autres bactéries sont : Proteus mirabilis (10 %), les entérocoques (streptocoques du groupe D) et Klebsiella spp. (plus rares).
L'antibiorésistance croissante de l'ensemble des bactéries responsables d'infections urinaires oriente le choix de l'antibiothérapie initiale. Environ 50 % des souches de E. coli sont actuellement résistantes ou intermédiaires à l'amoxicilline et 20 à 30 % au cotrimoxazole. Le pourcentage de souches de E. coli urinaires communautaires productrices de bêtalactamases à spectre étendu (BLSE) a augmenté progressivement mais reste inférieur à 10 % en France (2020).
Les recommandations de prise en charge doivent s'adapter à l'évolution des résistances bactériennes et à la validation de nouveaux schémas thérapeutiques.

PNA et cystite aiguë de l'enfant sont d'origine bactérienne dans l'immense majorité des cas. Il existe toutefois de rares PNA fongiques chez le nouveau-né et le nourrisson, et des cystites virales chez le jeune enfant.

Germes des infections urinaires : E. coli (80 %), Proteus mirabilis (10 %), entérocoques et Klebsiella.

 

II. Diagnostiquer une infection urinaire

A. Enquête clinique

1. Tableaux cliniques

Généralités

L'anamnèse recherche :

  • les données de l'échographie prénatale, l'existence d'une uropathie ;
  • des épisodes antérieurs d'infection urinaire.

La notion de diffusion de l'infection en amont de la jonction vésico-urétérale peut apparaître théorique, mais elle a cependant une bonne concordance avec les données cliniques (tableau 36.1).

Tableau 36.1. Comparaison des données cliniques entre pyélonéphrite aiguë (PNA) et cystite aiguë.

 

PNA Cystite aiguë
Température +++ 0
Signes généraux +++ 0
Signes fonctionnels urinaires + +++
Localisation de la douleur Lombo-abdominale Hypogastrique
Palpation lombaire Douloureuse (inconstant) Indolore
Pyélonéphrite aiguë

La PNA du nouveau-né se caractérise par un syndrome infectieux, avec troubles digestifs et parfois ictère (voir chapitre 45), déshydratation aiguë et perturbations ioniques.

La PNA du nourrisson et du jeune enfant doit être évoquée en cas de fièvre inexpliquée, volontiers accompagnée de critères de gravité, tels que des troubles hémodynamiques, ainsi que de signes algiques orientant vers des douleurs abdominales.

La PNA du grand enfant est évoquée en cas de fièvre élevée, de frissons, de douleurs abdominales ou lombaires, parfois associés à des signes fonctionnels urinaires (pollakiurie, mictions impérieuses, fuites d'urine).

Cystite aiguë

Le diagnostic de cystite aiguë est le plus souvent évoqué chez la petite fille.
Les récidives sont d'autant plus fréquentes qu'il existe un trouble mictionnel (vessie instable) et/ou une constipation.

Il existe parfois une fébricule, mais il n'y a pas de signes généraux ni douleurs lombaires.
Les signes fonctionnels urinaires sont variés et parfois intenses : dysurie, brûlures mictionnelles, pollakiurie, envies impérieuses d'uriner, douleurs hypogastriques, fuites urinaires. Une hématurie macroscopique peut être associée (voir chapitre 47).

 

2. Critères de gravité d'une pyélonéphrite aiguë

Ils doivent être systématiquement recherchés.
Les caractéristiques permettant de définir les infections urinaires « compliquées » chez l'adulte sont difficiles à appliquer en pédiatrie. On préfère identifier chez l'enfant des facteurs de risque et des signes de sévérité (tableau 36.2).

La présence de l'un de ces critères de gravité justifie une hospitalisation et une stratégie antibiotique ad hoc (voir infra).
L'âge < 3 mois occupe une place à part, du fait du tableau clinique souvent trompeur, de la particularité des germes rencontrés, du risque de septicémie et d'essaimage méningé. L'hospitalisation est souvent la règle à cet âge ; elle doit être systématique avant 6 semaines. Au-delà de 3 mois, elle dépend de la présentation clinique ainsi que des facteurs de risque et des signes de sévérité.

Tableau 36.2. Critères de gravité d'une PNA de l'enfant.
Facteurs de risque de PNA sévère
  • Âge < 3 mois
  • Uropathie sous-jacente
  • Immunodépression
  • Lithiase (cause ou conséquence de l'infection urinaire)
Signes de sévérité d'une PNA
  • Sepsis
  • Signes de déshydratation (nouveau-né)
  • Altération de l'état général
Critères de gravité à retenir : âge < 3 mois, sepsis, uropathie sous-jacente.

 

B. Enquête paraclinique

1. Examen des urines

Généralités

Une infection urinaire doit toujours être évoquée en cas de :

  • fièvre sans point d'appel avant 3 mois ;
  • fièvre isolée persistante plus de 48 heures ;
  • signes fonctionnels urinaires ;
  • antécédents de PNA et/ou malformation des voies urinaires.

Le diagnostic se fait sur l'examen des urines :

  • le dépistage repose sur la BU chez l'enfant âgé de plus de 1 mois ; avant 1 mois, l'ECBU s'impose d'emblée (BU moins sensible, risque de faux négatifs) ;
  • le diagnostic de certitude repose sur l'interprétation du résultat de l'ECBU.
Prélèvement urinaire

La qualité du recueil des urines (préparation, prélèvement, conservation) est essentielle pour le diagnostic. L'objectif est de recueillir l'urine vésicale (normalement stérile), en évitant sa contamination lors de la miction par la flore commensale colonisant l'urètre et le périnée.

Le prélèvement par collecteur adhésif (avec désinfection soigneuse et temps de pose de la poche ≤ 30 minutes) est encore le plus souvent utilisé, mais la qualité du recueil est médiocre et la valeur prédictive positive est insuffisante (jusqu'à 50 % de faux positifs).
Le prélèvement d'urines en milieu de jet est la technique non invasive à privilégier, mais elle est parfois difficile à réaliser, notamment chez la petite fille. Des techniques simples permettant de provoquer la miction et de faciliter le recueil au jet ont été proposées.

Le cathétérisme urétral « aller-retour » ou sondage (surtout chez la fille) par sonde souple est une méthode alternative chez les enfants âgés de moins de 2 ans, afin d'éviter toute contamination par la flore périnéale.
La ponction sus-pubienne échoguidée n'a que des indications limitées.

Bandelette urinaire (BU) réactive

La BU est l'examen de dépistage chez l'enfant d'âge > 1 mois.
La sensibilité du résultat est accrue si les urines sont recueillies dans de bonnes conditions.

Elle permet la détection :

  • des leucocytes (si leucocyturie ≥ 104/ml) ;
  • des nitrites (si la bactérie en cause possède une nitrate réductase [entérobactéries] : E. coli, Proteus mirabilis et Klebsiella spp.).

La positivité des leucocytes et/ou des nitrites à la BU impose la réalisation d'un ECBU pour confirmation diagnostique. La négativité de la BU pour ces deux paramètres a une valeur prédictive négative (VPN) de 97 %. Au-delà de l'âge de 1 mois, la négativité de la BU autorise à ne pas réaliser d'ECBU. Avant, la BU a une mauvaise VPN et l'ECBU s'impose d'emblée.

La BU peut être mise en défaut :

  • pour les leucocytes : en cas de leucopénie ;
  • pour les nitrites : lorsque la bactérie ne produit pas de nitrate réductase (par exemple, entérocoque = streptocoque D), lorsque l'alimentation est pauvre en nitrates (allaitement maternel exclusif) ou lorsque l'urine a séjourné trop peu de temps dans la vessie (pollakiurie, sonde à demeure).
Examen cytobactériologique des urines

L'ECBU est indispensable à la confirmation diagnostique des infections urinaires.
Il comporte systématiquement un examen direct et une mise en culture.

L'examen direct est effectué au microscope dans un délai ≤ 1 heure.
Il permet de quantifier la leucocyturie et de caractériser la bactérie (morphologie, Gram).
La leucocyturie est significative si ≥ 104/ml.
La coloration de Gram a un intérêt majeur car elle peut orienter d'emblée le traitement antibiotique : bacilles Gram-négatifs orientant vers E. coli, cocci Gram-positifs en chaînettes orientant vers un entérocoque (résistance naturelle aux céphalosporines).
La leucocyturie et la bactériurie sont à interpréter en fonction des méthodes de prélèvement et de conservation des urines. Elles peuvent être mises en défaut par une antibiothérapie récente.

La culture des urines est systématique.
Elle permet d'identifier l'espèce bactérienne (en 24 heures), de la quantifier et d'effectuer un antibiogramme (en 48 heures).
Chez l'enfant et pour les germes habituels (entérobactéries et entérocoque), les seuils de bactériurie dépendent de la méthode de prélèvement (UFC = unités formant colonie) :

  • milieu du jet ou cathétérisme urétral : ≥ 103 UFC/ml ;
  • collecteur à urine (poche) : ≥ 104 UFC/ml ;
  • ponction sus-pubienne : ≥ 102 UFC/ml.

La présence de plusieurs espèces bactériennes à l'examen direct et/ou à la culture témoigne généralement d'une contamination du prélèvement (le plus souvent sur collecteur) et doit conduire à répéter l'examen dans de meilleures conditions (milieu de jet ou sondage).

L'absence de leucocyturie et de bactériurie à l'examen direct a une VPN proche de 100 %. L'absence de leucocyturie significative a une VPN proche de 97 %. Une bactériurie sans leucocyturie doit faire évoquer une souillure ou une infection urinaire débutante.
La valeur prédictive positive (VPP) d'une leucocyturie isolée est inférieure à 50 %, mais une leuco-cyturie sans bactériurie doit faire évoquer une infection urinaire décapitée par un traitement antibiotique, une vulvite ou encore une maladie inflammatoire (par exemple, maladie de Kawasaki). De plus, comme explicité plus haut, il existe des cas de PNA et de cystite d'étiologie non bactérienne.

Confirmation diagnostique par l'ECBU :
• exigeant une technique de recueil optimale ;
• leucocyturie (examen direct) + bactériurie (culture) significatives.

 

2. Autres prélèvements biologiques en cas de PNA

Une cystite aiguë ne requiert pas d'autre examen biologique que l'ECBU.
En cas de PNA, d'autres examens peuvent s'avérer nécessaires.

Les marqueurs plasmatiques de l'inflammation (CRP, PCT) ont une bonne sensibilité en cas d'atteinte parenchymateuse rénale, mais ne sont pas suffisamment spécifiques. Une CRP normale au-delà de 24–48 heures d'évolution des symptômes (fièvre) doit conduire à remettre en question la fiabilité de l'examen d'urines et le diagnostic de PNA.

L'hémoculture est recommandée chez le nourrisson d'âge < 3 mois et chez les enfants hospitalisés (notamment si sepsis) ; elle n'est pas systématique dans les autres cas. Elle est positive dans 30 % des cas avant 1 mois, 15 % entre 1 à 2 mois, 5 % entre 2 et 3 mois.
La ponction lombaire est largement indiquée chez le très jeune nourrisson (âgé de moins de 6 semaines), car les PNA à cet âge s'accompagnent plus souvent d'hémocultures positives avec un risque de méningite associée.

 

3. Examens d'imagerie de première intention

Échographie de l'appareil urinaire

La plupart des enfants ont eu une échographie lors du suivi obstétrical, permettant le plus souvent d'éliminer une uropathie malformative grave.

  • En cas de PNA (systématique pour un premier épisode), l'échographie de l'appareil urinaire reste recommandée actuellement en première intention dans les premiers jours de prise en charge. Son intérêt est d'éliminer une malformation et/ou une obstruction des voies urinaires, un abcès (exceptionnellement une lithiase ou une tumeur) ; elle peut aussi parfois montrer des signes en faveur d'une atteinte parenchymateuse ou d'un RVU.
  • En cas de cystite, elle est indiquée surtout en cas d'épisodes récidivants ou en cas d'hématurie macroscopique.
Autres examens

La scintigraphie rénale, l'uro-TDM/IRM ne sont pas réalisées en pratique courante chez l'enfant.

Un premier épisode de PNA justifie la réalisation systématique d'une échographie de l'appareil urinaire.

 

III. Argumenter l'attitude thérapeutique et planifier le suivi de l'enfant

A. Orientation

1. Pyélonéphrite aiguë

Hospitalisation recommandée en cas de :

  • présence de critères de gravité (voir tableau 36.2) ;
  • risque de non-observance ou d'accès difficile à un traitement rapide.

En dehors de ces situations, un traitement ambulatoire peut être proposé, y compris pour la phase d'antibiothérapie initiale parentérale.
Le médecin traitant doit s'assurer de la compréhension de sa prescription et de la connaissance par la famille des signes nécessitant une consultation urgente. Une réévaluation médicale à J2 du traitement est indispensable.

 

2. Cystite aiguë

La cystite aiguë est une pathologie bénigne, ne requérant qu'une prise en charge ambulatoire.

 

B. Prise en charge thérapeutique d'une infection urinaire

1. Antibiothérapie de la pyélonéphrite aiguë

Généralités

L'antibiothérapie a pour but d'éviter la dissémination bactérienne et de limiter le risque de cicatrices rénales. Il convient de recourir à des antibiotiques ayant une bonne concentration dans le sang et le parenchyme rénal, ainsi qu'une bonne élimination urinaire.
L'antibiothérapie est débutée dès que possible, idéalement après les résultats de l'examen direct des urines s'il est possible et rapide. Elle est probabiliste dans sa phase initiale, avant les résultats de la culture et de l'antibiogramme, et tient compte des profils de sensibilité habituels des principaux germes responsables d'infections urinaires en milieu communautaire (E. coli).

Modalités de prescription pour une PNA à BGN

La conduite de l'antibiothérapie comporte habituellement deux phases : initiale (probabiliste) et secondaire (orientée par l'antibiogramme : germe sensible).
Plusieurs schémas thérapeutiques sont désormais recommandés chez l'enfant.

Antibiothérapie initiale parentérale :

  • monothérapie par :
    • C3G injectable : ceftriaxone (IM ou IV) ou céfotaxime (IV) ;
    • ou amikacine (IV) ;
  • association C3G (IV) et amikacine (IV) en cas de critères de gravité ;
  • pour 2 à 4 jours selon l'évolution, avec relais oral ensuite.

Antibiothérapie initiale orale d'emblée : seul le céfixime est indiqué, mais uniquement à partir de l'âge de 3 mois et en l'absence de critère de gravité. En effet, le céfixime, du fait de ses propriétés PK/PD médiocres sur les souches de CMI limite (0,5 mg/l), expose à un risque de moindre rapidité d'action, de moindre efficacité et de moindre bénéfice en situation de sepsis.

Antibiothérapie de relais orale :

  • cotrimoxazole (contre-indiqué avant l'âge de 1 mois et en cas de déficit sévère en G6PD) ;
  • C3G orale de type céfixime (à réserver aux souches non BLSE et résistantes au cotrimoxazole et/ou avant l'âge de 1 mois).

La durée globale du traitement (injectable puis oral) est de 10 à 14 jours.

Remarques

Même si l'antibiogramme fait apparaître qu'E. coli est sensible à l'amoxicilline et à l'amoxicilline + acide clavulanique, les caractéristiques pharmacocinétiques et pharmacodynamiques (PK/PD) de ces molécules n'autorisent pas leur recours en cas de PNA.
La stratégie antibiotique chez l'enfant exclut habituellement, sauf impasse thérapeutique, la prescription de quinolones.
En cas d'allergie aux bêtalactamines, l'antibiothérapie recommandée repose sur un aminoside en monothérapie IV.

Le choix d'un traitement par aminoside IV permet de limiter l'usage des céphalosporines, principales molécules responsables de la sélection et de la diffusion des entérobactéries BLSE. Le choix préférentiel de l'amikacine IV couvre le mieux les colibacilles sécréteurs de BLSE (95 %) ; la gentamicine est utilisée en relais lorsque le germe retrouvé est sensible.

En cas d'infection urinaire à entérocoque (streptocoque du groupe D), l'antibiothérapie à proposer est l'amoxicilline car les caractéristiques PK/PD sont excellentes pour ce germe (± aminoside si indication).

Adaptation probable des recommandations à l'évolution des résistances bactériennes et à la validation de nouveaux schémas diagnostiques et thérapeutiques.

 

2. Antibiothérapie de la cystite aiguë

La cystite aiguë est typiquement l'infection urinaire de la petite fille qui présente un trouble mictionnel.
Elle est sans gravité potentielle en l'absence d'uropathie, et sans risque de retentissement parenchymateux. Elle ne doit pas conduire à l'utilisation d'antibiotiques par voie injectable.

Schémas thérapeutiques :

  • cotrimoxazole per os ;
  • céfixime (à réserver aux souches résistantes au cotrimoxazole) ;
  • association amoxicilline + acide clavulanique (possible ici du fait de son excellente concentration urinaire qui permet d'atteindre localement des seuils de CMI élevés, y compris pour des bactéries productrices de BLSE). La durée du traitement est de 3 à 5 jours. L'efficacité du « traitement antibiotique minute » n'est pas validée chez l'enfant non pubère.

 

3. Traitement symptomatique

Afin d'améliorer le confort de l'enfant : paracétamol.

On conseille aussi aux parents de proposer suffisamment de boissons à leur enfant et de l'encourager (s'il est en âge de le comprendre) à effectuer des mictions régulières.

 

C. Suivi médical d'une pyélonéphrite aiguë

1. Suivi immédiat et complications

La stratégie antibiotique permet habituellement d'obtenir l'apyrexie et la stérilisation des urines en moins de 48 heures. Elle limite considérablement le risque de réinfection à moyen terme et probablement le risque de cicatrices parenchymateuses à long terme.

La surveillance est avant tout clinique. En cas de PNA traitée en ambulatoire, une réévaluation médicale à J2 permet d'apprécier l'évolution et d'effectuer ou d'adapter le relais oral de l'antibiothérapie conforme aux résultats de l'antibiogramme de l'ECBU.

La pratique d'un ECBU de contrôle de manière systématique à 48 heures de traitement antibiotique ou au terme de celui-ci est inutile.
En cas d'échec thérapeutique et en l'absence d'explication bactériologique, une nouvelle échographie de l'appareil urinaire recherche une complication locorégionale (abcès rénal).

 

2. Suivi à long terme

Le pronostic des PNA de l'enfant est lié au risque de cicatrices parenchymateuses. Celles-ci sont susceptibles d'induire une protéinurie, une HTA et une réduction néphronique, notamment en cas de PNA répétées et/ou traitées tardivement ou par une antibiothérapie initialement inadaptée.

Pas d'ECBU de contrôle systématique.
La prise en charge des infections urinaires doit dans tous les cas associer la prise en charge du cercle vicieux « constipation/troubles fonctionnels urinaires/infection urinaire » (cystite récidivante) et d'un éventuel facteur favorisant comme une uropathie malformative sous-jacente (pyélonéphrite aiguë).

 

D. Prise en charge étiologique

1. Généralités

Le plus souvent, l'infection urinaire chez l'enfant est la résultante :

  • d'une anomalie acquise de l'écoulement bas des urines, c'est-à-dire d'une mauvaise vidange vésicale, comme une vessie instable de la jeune fille avec résidu post-mictionnel, fréquemment associée à une constipation dans le cadre de troubles de l'élimination (voir chapitre 49) ;
  •  associée à un réservoir bactérien (prépuce du jeune nourrisson).

Plus rarement, elle s'associe à une anomalie congénitale de l'écoulement haut des urines.
Celle-ci peut être objectivée dès la période anténatale en échographie, par la visualisation d'une dilatation segmentaire de la voie excrétrice (bassinets, calices, uretères, vessie, urètre postérieur) et/ou par des anomalies de l'échostructure du parenchyme rénal ou de la paroi vésicale. Une anomalie de la jonction pyélo-urétérale est suspectée par l'échographie en présence d'une dilatation isolée du bassinet et des calices.

Plus rarement encore à l'origine d'infections urinaires sévères ou récidivantes :

  • un méga-uretère primitif non refluant (dilatation urétéro-pyélo-calicielle sus-jacente à un obstacle significatif au niveau de la jonction urétéro-vésicale) ;
  • une urétérocèle (dilatation pseudokystique de l'uretère terminal, extra- ou intravésicale).

 

2. Reflux vésico-urétéral et place de la cystographie rétrograde

Très souvent, une PNA est associée à un reflux vésico-urétéral (RVU), fonctionnel (s'inscrivant généralement dans le cadre d'un dysfonctionnement vésicosphinctérien) ou malformatif.

La cystographie rétrograde est l'examen qui permet d'objectiver un RVU (fig. 36.1).
Elle est indiquée lorsqu'existent des anomalies échographiques qui nécessitent d'être précisées ou lors d'épisodes répétés de PNA en dehors d'un contexte typique d'instabilité vésicale.

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Fig. 36.1. RVU de grade 3*.

Cliché de cystographie. Reflux permictionnel vésico-urétéral gauche de grade 3 chez une petite fille de 2 ans.

Cet examen n'est donc pas systématique dès un premier épisode de PNA car :

  • le RVU est un phénomène parfois intermittent qui ne sera donc pas toujours objectivé par la cystographie ;
  • quel que soit le mécanisme du RVU, la croissance, en améliorant la maturation du fonctionnement vésicosphinctérien et/ou en allongeant le trajet vésical intramural de l'uretère, peut permettre d'améliorer ou de faire disparaître un grand nombre de RVU ;
  • la chirurgie du RVU est controversée ; elle est habituellement destinée aux RVU malformatifs de grade élevé.

Cet examen s'impose en revanche chez le petit nourrisson garçon au moindre doute de valves de l'urètre postérieur. Le diagnostic est en général fait en échographie anténatale ou dans les premiers jours de vie mais certaines formes peuvent échapper au diagnostic et se révéler plus tardivement à l'occasion d'une infection urinaire fébrile.
Les signes évocateurs en échographie sont une dilatation urétéro-pyélo-calicielle uni- ou bilatérale, une vessie à parois épaissies, une dilatation de l'urètre postérieur.
C'est une urgence médico-chirurgicale : risque de sepsis, d'insuffisance rénale et de troubles hydroélectrolytiques (syndrome de « levée d'obstacle »). Le traitement chirurgical consiste en la résection endoscopique des valves.

 

3. Intérêt de l'antibioprophylaxie ?

Aucun consensus n'existe à l'heure actuelle et il n'y a que peu d'arguments dans la littérature démontrant son intérêt pour la prévention des cicatrices rénales à long terme.
Si elle est instaurée, l'antibioprophylaxie (cotrimoxazole après l'âge de 1 mois, en prise unique le soir) se heurte au risque de non-observance, de modification de la flore bactérienne et au caractère empirique de sa prescription.
Les médicaments à base de nitrofurantoïne sont désormais contre-indiqués chez l'enfant en prophylaxie du fait des risques d'effets secondaires, pulmonaires notamment. S'ils sont utilisés, l'indication doit être posée par un spécialiste, et ce pour la durée la plus courte possible.

 

4. Quand adresser l'enfant en consultation de néphrologie ou d'urologie pédiatrique ?

Indications de consultation spécialisée :

  • mictions très nombreuses avec fuites urinaires ;
  • mauvais jet urinaire (miction goutte à goutte, poussée abdominale) ;
  • infections urinaires à répétition ;
  • échographie rénale et des voies urinaires anormale pouvant témoigner d'une uropathie malformative.

En cas d'examen neurologique anormal des membres inférieurs, des investigations complémentaires devront être discutées pour éliminer une vessie neurologique sur anomalie médullaire, ce qui nécessitera dans ce cas une prise en charge adaptée (voir chapitre 49).

Infections urinaires récidivantes : pas de consensus sur l'antibioprophylaxie.
Retenir les indications d'orientation vers une consultation spécialisée.

 

Références

Hodson E.M., Wheeler D.M., Vimalchandra D., Smith G.H., Craig J.C. Interventions for primary vesicoureteric reflux. Cochrane Database Syst Rev, 2007a. CD001532.

Hodson E.M., Willis N.S., Craig J.C. Antibiotics for acute pyelonephritis in children. Cochrane Database Syst Rev 2007b. CD003772.

Mori R., Lakhanpaul M., Verrier-Jones K. Diagnosis and management of urinary tract infection in children: summary of NICE guidance. BMJ, 2007;335:395–7.