Vaccinations

Texte

 

ITEM 146 Vaccinations

  • Connaître les différents types de vaccins et les modalités d'administration.
  • Connaître le calendrier vaccinal pour la population générale.
  • Savoir programmer un rattrapage vaccinal.
  • Adapter l'indication des vaccinations en fonction du risque individuel et collectif.
  • Connaître les contre-indications et les principaux effets indésirables des vaccins.
  • Argumenter la balance bénéfices/risques des principaux vaccins.

 

Avant de commencer…

Un chapitre incontournable pour l'ECNi et la pratique médicale.
Le rationnel et les modalités des schémas vaccinaux doivent être compris avant d'être appris.

Les vaccinations constituent les moyens optimaux de prévention pour le contrôle voire (selon les situations) l'éradication de maladies infectieuses et contagieuses. La diminution de la perception du risque peut conduire à négliger l'importance de la vaccination (couverture vaccinale) et l'entretien d'une immunité suffisante (injections de rappel).

Le contenu actualisé du calendrier vaccinal du nourrisson (vaccins obligatoires et/ou recommandés) de l'année en cours doit être parfaitement mémorisé (site du ministère de la Santé). Le respect de ses modalités doit être évalué à chaque consultation de suivi de l'enfant.

 

I. Pour bien comprendre

A. Généralités

1. Définition d'un vaccin

Les vaccins à usage humain sont des préparations contenant des substances antigéniques destinées à induire, chez le sujet auquel elles sont administrées, une immunité active spécifique contre un agent infectieux donné (bactérien, viral, voire parasitaire).

 

2. Compositions des préparations vaccinales

Types de vaccin

Les préparations vaccinales ont des compositions variables selon le type de vaccin (tableau 41.1).
Il peut s'agir de :

  • l'agent infectieux en entier (virus ou bactéries) mais dont la virulence a été réduite après mutations → vaccins dits vivants ou atténués ;
  • l'agent infectieux entier (virus ou bactéries) mais inaptes à la multiplication du fait d'un traitement physique ou chimique préalable → vaccins dits inactivés ou tués ;
  • un ou plusieurs antigènes, spécifiques de l'agent infectieux, obtenus après extraction et modification ou fabrication par génie génétique → vaccins dits sous-unitaires.
Tableau 41.1. Liste des noms (abréviations) et nature des principaux vaccins utilisés.
Nom : valence ou maladie Nature du vaccin
D = diphtérie (d : dose adolescent et adulte) Sous-unitaire
T = tétanos Sous-unitaire
Ca = coqueluche acellulaire (ca : dose adolescent et adulte) Sous-unitaire
P = polio injectable Inactivé
Hib = Haemophilus influenzae b Sous-unitaire
HB = hépatite B Sous-unitaire
VPC13 = pneumocoque conjugué 13-valent Sous-unitaire
VPNC23 = pneumocoque non conjugué 23-valent Sous-unitaire
MenCC = méningocoque C polyosidique conjugué Sous-unitaire
ROR (R = rougeole ; O = oreillons ; R = rubéole) Vivant
HPV = papillomavirus humains Sous-unitaire
Men ACWY = méningocoque ACWY polyosidique conjugué Sous-unitaire
Men B = méningocoque B protéique Sous-unitaire
BCG = tuberculose Vivant
Rotavirus Vivant
Varicelle Vivant
Zona Vivant
Grippe saisonnière, nasal Vivant
Grippe saisonnière, injectable Sous-unitaire
Hépatite A Inactivé
Typhoïde Sous-unitaire
Rage Inactivé
Fièvre jaune Vivant
Leptospirose Inactivé

 

Adjuvants vaccinaux

La purification de plus en plus poussée des vaccins sous-unitaires a permis d'améliorer leur tolérance et leur sécurité mais a eu pour effet de réduire leur immunogénicité. L'adjonction de substances dites adjuvantes est devenue indispensable.
Les préparations vaccinales contiennent le plus souvent un adjuvant (sauf le vaccin ROR et le vaccin grippe injectable saisonnier), habituellement à base d'aluminium.
Les adjuvants accélèrent, augmentent, améliorent et/ou prolongent l'immunité induite.

Associations vaccinales

Certains vaccins peuvent être mélangés dans une même seringue et administrés en une seule injection ; on parle de vaccins combinés :

  • combinaisons tétravalentes (diphtérie-tétanos-polio-coqueluche), pentavalentes (diphtérie-tétanos-polio-coqueluche-Haemophilus b) et hexavalentes (diphtérie-tétanos-polio-coqueluche-Haemophilus b-hépatite B) ;
  • combinaison vaccinale trivalente rougeole-oreillons-rubéole (ROR) ;
  • combinaison vaccinale pneumococcique conjuguée contenant 13 valences.

Les autres vaccins exigent d'être injectés en des sites séparés d'au moins 2,5 cm s'il s'agit du même membre ou sinon sur deux membres différents ; on parle de vaccination simultanée.

 

B. Bases immunologiques de la protection vaccinale

1. Vaccins vivants ou atténués

Ces vaccins réalisent une infection a minima chez un sujet dont l'immunité est normale et induisent une réponse immune de même nature que celle conférée par la maladie, le plus souvent mixte (humorale et cellulaire). Ils ont par contre une virulence importante en cas d'immunodépression ou de grossesse et sont donc contre-indiqués dans ces situations.
Ils n'exigent qu'une ou deux doses pour conférer une protection optimale et durable.

 

2. Vaccins tués ou inactivés et vaccins sous-unitaires

Ces vaccins induisent une réponse avant tout humorale. Une réponse cellulaire existe aussi pour les vaccins Haemophilus influenzae b, hépatite B et coqueluche. L'immunité cellulaire engendrée par le vaccin contre l'hépatite B est durable.
Ils nécessitent plusieurs injections successives, espacées d'au moins 1 mois, pour initier et amplifier la réponse immune initiale (réponse de type primaire, efficace mais limitée dans le temps). Ces premières injections constituent la primovaccination. Par la suite, des injections supplémentaires appelées rappels permettent de renforcer et maintenir une immunité efficace (réponse immune de type secondaire, plus puissante et durable). Le 1er rappel doit être espacé de 5 à 6 mois par rapport à la fin de la primovaccination. Les rappels ultérieurs sont espacés de plusieurs années. Le terme de rappel ne doit pas être confondu avec celui de rattrapage, qui correspond à la vaccination d'un sujet en retard de son calendrier normal.
Enfin, les contacts itératifs avec certains agents infectieux, lorsqu'ils continuent de circuler dans la population, réalisent autant de rappels dits naturels, permettant le maintien de l'immunité vaccinale (par exemple, vaccin Haemophilus influenzae b pour lequel les rappels vaccinaux tardifs ne sont pas nécessaires après l'âge de 5 ans). En cas de réduction importante de la circulation de l'agent infectieux, les rappels naturels deviennent aléatoires, rendant nécessaire des rappels vaccinaux tardifs pour certaines maladies (par exemple, coqueluche).

 

3. Spécificités des vaccins sous-unitaires

Les antigènes protéiques (anatoxine pour diphtérie et tétanos, par exemple) sont thymodépendants et donnent lieu à une réponse primaire initiale faible (IgM) puis secondaire forte (IgG) au moment du rappel. Cet effet rappel puissant est obtenu grâce à la constitution d'un pool de cellules mémoire lors de la primovaccination.

Les antigènes polyosidiques (ou polysaccharidiques) sont thymo-indépendants et donnent lieu à une réponse primaire faible et lente mais ici sans création de cellules mémoire et donc sans possibilité d'effet rappel ultérieur. Cette réponse immune est de surcroît médiocre avant l'âge de 2 ans.
Leur combinaison avec des antigènes protéiques thymodépendants (appelée conjugaison) augmente leur immunogénicité en réponse primaire et ce dès l'âge de 6 semaines. Elle leur confère par ailleurs un effet mémoire amplifiant de façon durable la réponse initiale au moment du rappel (par exemple, vaccins Haemophilus influenzae b, méningococciques C et ACWY et pneumococcique conjugués).

 

4. Évaluation de l'efficacité vaccinale

L'efficacité vaccinale peut se mesurer par :

  • le dosage des anticorps vaccinaux lorsqu'il existe une corrélation entre le taux sérique d'anticorps et la protection individuelle ; c'est le cas par exemple pour les anticorps diphtériques, tétaniques, polio, Haemophilus influenzae b, rougeole… ;
  • la mesure du nombre de sujets vaccinés protégés (non infectés) après exposition à l'agent infectieux par comparaison avec une population non vaccinée.

L'efficacité vaccinale varie selon les types de vaccins utilisés :

  • vaccins vivants : protection forte et durable après 1 ou 2 injections ;
  • vaccins inactivés et vaccins sous-unitaires : immunité efficace et durable assurée après plusieurs injections puis rappels.

L'efficacité vaccinale peut être affectée chez le nourrisson par la présence d'anticorps maternels. Certains anticorps maternels transmis au nourrisson ont un effet protecteur vis-à-vis de la maladie, mais uniquement lorsque leur taux sérique est élevé (coqueluche, rougeole, tétanos). Ils peuvent également inactiver les vaccins vivants (anticorps neutralisants), entraînant ainsi un échec vaccinal. Par exemple, les anticorps rougeoleux maternels protègent le nourrisson au cours des 6 premiers mois, mais rendent inefficace la vaccination avant cet âge.
À l'inverse, en l'absence de vaccination récente maternelle, la protection du nourrisson par les anticorps maternels est quasi nulle pour la coqueluche (taux bas d'anticorps maternels) et limitée à 2 mois pour le tétanos et la diphtérie.

Le dosage des anticorps post-vaccinaux a des indications limitées :

  • au cours de l'enquête paraclinique de première intention en cas de suspicion de déficit immunitaire (voir chapitre 26) ;
  • pour connaître le statut d'immunité contre certaines maladies à prévention vaccinale en cas de contage (rougeole, rubéole, varicelle, par exemple) ;
  • pour tester l'immunité mémoire après rappel chez un sujet dont on ignore le passé vaccinal.
Types de vaccins : vivants, inactivés, sous-unitaires.

 

II. Vacciner un enfant en pratique courante

A. Recommandations vaccinales

1. Généralités

L'objectif d'une stratégie vaccinale peut être :

  • l'élimination d'une maladie : arrêt de la circulation de l'agent infectieux (par exemple, rougeole) ;
  • le contrôle de l'infection : réduction de la morbidité et de la mortalité à un niveau acceptable (par exemple, tétanos, coqueluche).

Toute vaccination est un acte médical qui doit être expliqué par le médecin et compris par la famille au terme d'un entretien adapté. Sa pratique doit être consignée sur les pages « Vaccinations » du carnet de santé qui tiennent lieu de certificat. Un calendrier vaccinal électronique est disponible sur le site MesVaccins.net.

 

2. Calendrier vaccinal

Généralités

Le calendrier vaccinal (tableau 41.2) définit la politique vaccinale d'un pays. Il s'applique aux enfants et aux adultes.
Il répond à des choix stratégiques qui tiennent compte de l'épidémiologie des pathologies infectieuses, de la disponibilité des vaccins et des caractéristiques de ceux-ci (efficacité ; durée de protection) et des rapports bénéfices/risques et coût/efficacité de la stratégie envisagée.
Le calendrier est élaboré par la commission technique des vaccinations (CTV), commission permanente de la Haute Autorité de Santé (HAS) et publié chaque année sur le site du ministère de la Santé et sur celui de Santé Publique France.

Tableau 41.2. Calendrier vaccinal 2020 : liste des vaccinations.
Âge Vaccins
2 mois DTCaP-Hib-HB + VPC13
4 mois DTCaP-Hib-HB + VPC13
5 mois MenCC
11 mois DTCaP-Hib-HB + VPC13
12 mois ROR + MenCC
16–18 mois ROR
6 ans DTCaP
11–13 ans dTcaP* + HPV (11–14 ans filles et garcons)
25 ans dTcaP (ou dTP)
45 ans dTP
65 ans dTP + grippe injectable**
75 ans dTP tous les 10 ans

DTCaP-Hib-Hépatite B : vaccin combiné contenant les valences diphtérie (D), tétanos (T), coqueluche acellulaire (Ca), polio injectable (P), Haemophilus influenzae b (Hib), et Hépatite B.Une combinaison pentavalente DTCaP-Hib est également disponible pour le nourrisson ; elle ne comporte pas la valence hépatite B. Une combinaison tétravalente DTCaP est disponible pour l'enfant ; elle ne comporte pas la valence Hib, inutile au-delà de l'âge de 5 ans.Les combinaisons faiblement dosées en anatoxine diphtérique (d au lieu de D) sont réservées aux adolescents et adultes ; elles ne sont pas indiquées chez le nourrisson. Les combinaisons faiblement dosées en antigène coquelucheux (ca au lieu de Ca) sont réservées aux adolescents et adultes ; elles ne sont pas indiquées chez le nourrisson.VPC13 : vaccin pneumococique conjugué à 13 valences.MenCC : vaccin méningocccique conjugué C.ROR : vaccin combiné triple rougeole, oreillons, rubéole (il n'y a plus de vaccin monovalent disponible en France contre la rougeole, les oreillons ou la rubéole). * Les doses de rappel diphtérie et coqueluche destinées à l'adolescent et l'adulte sont moins fortement dosées que celles destinées aux nourrissons, d'où les signes d et ca au lieu de D et Ca. ** Vaccination grippe saisonnière injectable, recommandée chaque année chez les personnes âgées de 65 ans et plus.

Recommandations générales

Elles s'adressent à la totalité de la population.

Une stratégie de rattrapage des non vaccinés est également recommandée pour :

  • vaccination ROR : 2 doses à 1 mois d'intervalle pour les personnes nées depuis 1980 ;
  • vaccination MenCC : 1 dose jusqu'à 24 ans révolus ;
  • hépatite B : schéma complet jusqu'à 15 ans révolus ;
  • HPV : schéma complet jusqu'à 19 ans révolus ;
  • coqueluche : rappel pour ceux n'ayant pas reçu celui de 25 ans, jusqu'à 39 ans révolus.
Recommandations particulières

Elles s'adressent à une partie seulement de la population comme :

  • certaines populations à risque infectieux élevé et/ou spécifique (maladies chroniques, susceptibilité selon l'âge…) ;
  • certaines professions ;
  • les voyageurs.

Vaccination coqueluche combinée avec dTP recommandée dans le cadre du cocooning (protection indirecte du jeune nourrisson) :

  • chez les adultes susceptibles de devenir parents dans les mois ou années à venir et lors du rappel dTP de 25 ans (voir aussi chapitre 34) ;
  • pour les personnels soignants dans leur ensemble.

Vaccination grippe saisonnière recommandée :

  • pour les sujets atteints de maladies respiratoires chroniques susceptibles d'être aggravées ou décompensées par une affection grippale, dont asthme, bronchite chronique, bronchiectasies, hyperréactivité bronchique… (liste complète à consulter) ;
  • entourage familial des nourrissons âgés de moins de 6 mois présentant des facteurs de risque de grippe grave, personnes séjournant dans un établissement de santé de moyen ou long séjour, quel que soit leur âge.

Vaccination hépatite A recommandée :

  • pour les jeunes accueillis dans les établissements et services pour l'enfance et la jeunesse handicapées ;
  • pour les patients atteints de mucoviscidose et/ou de pathologies hépatobiliaires chroniques susceptibles d'évoluer vers une hépatopathie chronique ;
  • pour les enfants, à partir de l'âge de 1 an, nés de familles dont l'un des membres (au moins) est originaire d'un pays de haute endémicité et qui sont susceptibles d'y séjourner ;
  • pour les sujets homosexuels masculins ;
  • dans l'entourage familial d'un patient atteint d'hépatite A.

Vaccination hépatite B obligatoire pour les personnes exerçant une activité professionnelle les exposant à des risques de contamination dans un établissement ou organisme de soins ou de prévention, public ou privé ainsi que les étudiants des filières suivantes :

  • professions médicales et pharmaceutiques (médecin, chirurgien-dentiste, pharmacien, sage-femme) ;
  • et autres professions de santé (infirmier, infirmier spécialisé, masseur-kinésithérapeute, pédicure-podologue, manipulateur d'électroradiologie médicale, aide-soignant, ambulancier, auxiliaire de puériculture, technicien en analyses biomédicales).

Vaccination tétravalente conjuguée méningococcique ACYW recommandée chez les patients avec déficit en fraction terminale du complément, recevant un traitement anti-C5a, porteurs d'un déficit en properdine ou ayant une asplénie anatomique ou fonctionnelle.

Vaccination pneumococcique recommandée chez les sujets à risque élevé d'infection invasive pneumococcique :

  • vaccination conjuguée 13-valente pour les enfants de 2 à 5 ans non vaccinés ;
  • et vaccination polyosidique non conjuguée 23-valente chez les adultes et les enfants de plus de 5 ans.

Vaccination varicelle recommandée :

  • pour tous les adolescents de 12 à 18 ans n'ayant pas d'antécédent clinique de varicelle ou dont l'histoire est douteuse, les femmes en âge de procréer, notamment celles ayant un projet de grossesse et sans antécédent clinique de varicelle ; les femmes n'ayant pas d'antécédent clinique de varicelle (ou dont l'histoire est douteuse) dans les suites d'une première grossesse ;
  • pour tous les sujets de plus de 12 ans exposés à la varicelle, immunocompétents sans antécédent de varicelle (ou dont l'histoire est douteuse), la vaccination doit être effectuée dans les 3 jours suivant l'exposition à un patient avec éruption ;
  • pour toute personne sans antécédent de varicelle (ou dont l'histoire est douteuse) et dont la sérologie est négative, en contact étroit avec des personnes immunodéprimées ; les enfants candidats receveurs, dans les 6 mois précédant une greffe d'organe solide, sans antécédent de varicelle (ou dont l'histoire est douteuse) et avec sérologie négative ;
  • enfin, toute vaccination chez une jeune femme en âge de procréer doit être précédée d'un test négatif de grossesse et une contraception efficace de 3 mois est recommandée après chaque dose de vaccin.

Vaccination BCG recommandée chez les enfants appartenant aux groupes à risque suivants :

  • né dans un pays de forte endémie tuberculeuse ;
  • dont au moins l'un des parents est originaire de l'un de ces pays ;
  • devant séjourner au moins un mois d'affilée dans l'un de ces pays ;
  • ayant des antécédents familiaux de tuberculose (collatéraux ou ascendants directs) ;
  • résidant en Ile-de-France ou en Guyane ;
  • dans toute situation jugée par le médecin comme à risque élevé d'exposition au bacille tuberculeux, notamment enfant vivant dans des conditions de logement défavorables (habitat précaire ou surpeuplé) ou socioéconomiques défavorables ou précaires (en particulier parmi les bénéficiaires de la CMU, CMUc, AME…) ou en contact régulier avec des adultes originaires d'un pays de forte endémie.

Vaccinations du voyageur : selon les zones visitées, peuvent être recommandées les vaccinations suivantes : rage, typhoïde, hépatite A, méningococcique ACYW conjuguée, fièvre jaune, encéphalite japonaise, encéphalite à tiques… (voir chapitre 40).

Vaccinations des personnes immunodéprimées :

  • rationnel :
    • les vaccins vivants sont contre-indiqués en cas d'immunodépression ;
    • l'immunogénicité des vaccins est réduite chez les sujets immunodéprimés ; donc schémas vaccinaux particuliers ou renforcés ;
    • le risque accru de complications associées à certaines infections justifie des vaccinations spécifiques ou des rappels supplémentaires ;
  • mesures générales :
    • nécessité de renforcement des vaccinations du calendrier et d'étendre certaines indications ; notamment avec pneumocoque, méningocoque, Haemophilus influenzae b, grippe injectable ;
    • intérêt d'effectuer des dosages d'anticorps post-vaccinaux.

​​​​​​​

3. Obligation vaccinale

Jusqu'en 2017, les seules vaccinations obligatoires en France étaient : diphtérie, tétanos et polio ; l'obligation vaccinale concernant la variole ayant été levée en 1984 et celle de la vaccination BCG ayant été suspendue en 2007 au profit d'une recommandation de vaccination ciblée envers les nourrissons et enfants considérés comme à risque élevé de tuberculose.
Depuis le 1er janvier 2018, en France, l'obligation vaccinale a été étendue aux huit autres vaccins recommandés du calendrier du nourrisson (jusqu'à 2 ans), c'est-à-dire les vaccinations : coqueluche, Haemophilus influenzae b, hépatite B, pneumocoque conjugué, rougeole, oreillons, rubéole, et méningocoque C conjugué. Les rappels polio de l'enfant (6 et 11 ans) ne sont donc plus obligatoires mais restent fortement recommandés. Cette loi ne s'applique qu'aux nourrissons nés après le 1er janvier 2018. Pour les enfants nés avant le 1er janvier 2018, l'ancienne obligation, limitée à diphtérie, tétanos et polio, reste en vigueur.
Les vaccinations recommandées et obligatoires justifient d'une prise en charge financière par la Sécurité sociale (remboursement à 65 % par l'assurance maladie).

Les différents vaccins sont inscrits sur des pages spécifiques par le médecin en mentionnant systématiquement la date de vaccination, le type de vaccin, le numéro du lot, la date de péremption. La signature et le cachet du médecin vaccinateur authentifient l'acte vaccinal. Ces pages ont la valeur d'un certificat de vaccination et peuvent être photocopiées à cet effet.

4. Contre-indications et effets indésirables

Contre-indications

Contre-indications générales :

  • les vaccins sont contre-indiqués en cas de survenue lors d'une vaccination antérieure de signes évoquant une hypersensibilité à l'un de ses composants ; un avis allergologique spécialisé doit alors être pris ;
  • les vaccins vivants sont contre-indiqués en cas de : déficit immunitaire congénital ou acquis, immunosuppression thérapeutique, infection néoplasique en cours de traitement, infection à VIH, grossesse.

Contre-indications spécifiques :

  • les vaccins anatoxiniques et polyosidiques n'ont pas de contre-indication spécifique ;
  • tous les vaccins coquelucheux acellulaires (combinaisons vaccinales avec D, T, P, Hib et hépatite B) ont comme contre-indication chez le nourrisson l'antécédent d'encéphalopathie d'étiologie inconnue dans les 7 jours suivant une vaccination antérieure avec un vaccin contenant la valence coquelucheuse ; certaines de ces combinaisons (les plus récentes) ajoutent également l'existence de troubles neurologiques non contrôlés et/ou la notion d'épilepsie non contrôlée ;
  • les contre-indications spécifiques de chaque vaccin sont régulièrement mises à jour au niveau du texte de l'AMM (voir dictionnaire Vidal ou site de l'ANSM).

Le calendrier vaccinal 2020 précise : « L'existence d'une maladie fébrile ou d'une infection aiguë modérée à sévère ne contre-indique pas la vaccination mais peut conduire à la différer de quelques jours. La présence d'une infection mineure et/ou d'une fièvre de faible intensité ne doit pas entraîner le report de la vaccination. »
Les néphropathies, l'insuffisance cardiaque ou respiratoire, les maladies dermatologiques (y compris l'eczéma) ne sont en revanche pas des contre-indications ; en cas de doute, demander l'avis du spécialiste référent et éviter de vacciner lors d'une période de poussée de la maladie, afin de ne pas risquer d'attribuer à tort au vaccin des événements liés à la maladie.

Tolérance et complications

Les vaccins, comme tous les produits médicamenteux, sont susceptibles de donner des effets non voulus et qualifiés d'« indésirables », pouvant être :

  • induits par le vaccin (par exemple, paralysie vaccinale et vaccin polio oral) et constituant alors les caractéristiques intrinsèques de la préparation vaccinale ;
  • potentialisés par le vaccin (par exemple, crise fébrile chez un enfant prédisposé) ;
  • mais aussi liés à une erreur de programme vaccinal, comme une mauvaise conservation ou une erreur d'administration du vaccin (par exemple, BCG en IM au lieu de la voie intradermique).

Les effets indésirables induits sont listés dans le résumé des caractéristiques du produit vaccinal enregistré par les agences sanitaires internationales et figurent dans le Vidal.
Les données chiffrées ci-dessous sont précisées à titre uniquement indicatif.

Les effets indésirables peu fréquents à très fréquents (≥ 1/1 000 vaccinés) sont :

  • des réactions locales au site d'injection : douleurs, érythème, induration, tuméfaction ;
  • des réactions générales : fièvre, asthénie, irritabilité, troubles du sommeil chez le nourrisson ; céphalées, malaise, arthromyalgies, rash chez l'adolescent et l'adulte…

Ces manifestations surviennent avec la plupart des vaccins et généralement dans les 24–48 heures suivant l'administration.

Après certaines combinaisons vaccinales du nourrisson (DTCaPHib ± H B) :

  • un syndrome hypotonie-hyporéactivité transitoire (effet indésirable très rare et impressionnant mais bénin et transitoire) ;
  • un syndrome des cris persistants : plus de 3 heures dans les 48 heures après vaccination (effet indésirable rare également bénin) ;
  • un œdème étendu du membre vacciné (effet indésirable rare, bénin et transitoire).

Après le vaccin contre la rougeole :

  • fièvre ± éruption cutanée 5 à 12 jours suivant l'injection (5 à 10 %) ;
  • crises fébriles chez l'enfant aux antécédents personnels ou familiaux de convulsions (1 pour 4 millions de doses) ;
  • thrombopénie (1 pour 50 000 à 100 000 doses) ;
  • encéphalite (3,4 pour 10 millions de doses versus 1 pour 1 000 après une infection naturelle).

Après le vaccin BCG :

  • induration puis ulcération locale < 1 cm avec adénopathie satellite dans les 3–5 mois après (1–4 %) ; adénite suppurée (< 1 pour 1 000) ;
  • bécégite généralisée chez l'immunodéprimé (2 à 5 par million de vaccinés).

Certains événements indésirables ont pu être attribués à tort à la vaccination devant une relation chronologique. Ces allégations ont été déclarées comme non fondées après multiples enquêtes et avis des agences sanitaires :

  • vaccination coquelucheuse et mort inexpliquée du nourrisson (l'explication retrouvée est la position de couchage en décubitus ventral) ;
  • vaccination hépatite B ou HPV et maladie démyélinisante (sclérose en plaques) ;
  • vaccin ROR et autisme (au Royaume-Uni) ;
  • myofasciite à macrophages et hydroxyde d'aluminium.

 

5. Argumentation de la balance bénéfices/risques des vaccins

Les maladies évitées par les vaccinations doivent être connues du médecin et expliquées aux familles pendant l'entretien, de même que les effets indésirables possibles des vaccins.
Les effets secondaires sévères et les complications des vaccins sont très rares, et ne sauraient contre-indiquer la pratique des vaccinations habituelles de l'enfant, à toujours évaluer dans un contexte bénéfices/risques.

Il faut également lutter contre certaines « fausses idées » reçues.
Par exemple, la vaccination du nourrisson ne représente pas une « surcharge » du système immunitaire, au contraire, et le nourrisson a toutes les capacités pour y répondre.

Évaluation du respect du calendrier vaccinal actualisé : à chaque consultation.
Obligation vaccinale pour les nourrissons nés après le 1er janvier 2018 : 11 vaccins.
Contre-indications aux vaccins : rares chez l'enfant immunocompétent.
Retenir : l'existence d'une maladie fébrile ou d'une infection aiguë modérée à sévère ne contre-indique pas la vaccination mais peut conduire à la différer de quelques jours ; la présence d'une infection mineure et/ou d'une fièvre de faible intensité ne doit pas entraîner le report de la vaccination (nourrisson).

 

B. Modalités d'administration

1. Voies d'administration

Plusieurs voies d'administration possibles :

  • voie intramusculaire (IM) :
    • il est classiquement recommandé qu'avant l'âge de 2 ans la vaccination IM soit réalisée dans la face antérolatérale de la cuisse, et après l'âge de 2 ans, dans le deltoïde ;
    • en réalité, la vaccination IM dans le deltoïde est possible plus tôt ; elle doit être privilégiée dès que l'un des trois critères suivants est présent : âge > 1 an, marche acquise, poids > 10 kg ;
  • voie sous-cutanée profonde (SC) :
    • avant l'âge de 1 an : face antérolatérale de la cuisse ;
    • après l'âge de 1 an : face postérieure du bras ;
  • et selon les vaccins :
    • intradermique ;
    • orale ;
    • intranasal.

La plupart des vaccins injectables sont désormais administrés par voie IM, sauf en cas de troubles sévères de l'hémostase où la voie SC profonde est préférée, suivie d'une compression de 5 minutes.
Le BCG est administré par voie intradermique, le vaccin contre le rotavirus par voie orale. Un nouveau vaccin grippal de l'enfant s'administre par voie nasale.

 

2. Intervalles à respecter

Pour les vaccins inactivés combinés comportant les valences DTCaP-Hib et DTCaP-Hib-HB :

  • l'intervalle recommandé est de 4 semaines entre deux injections lors d'une primovaccination comportant trois doses, mais cet intervalle a été allongé à 2 mois en France depuis la réduction du schéma de primovaccination à deux doses à 2 et 4 mois (en 2013) ;
  • le premier rappel doit avoir lieu au minimum 6 mois plus tard (rappel à l'âge de 11 mois en France après primovaccination à deux doses à 2 et 4 mois) ;
  • en cas de retard : poursuivre le calendrier vaccinal en le complétant mais sans recommencer une vaccination complète.

Pour les vaccins viraux atténués : l'intervalle minimum est de 4 semaines entre deux injections (risque d'inactivation vaccinale par la sécrétion d'interféron en cas de délai trop court).
Augmenter l'intervalle entre les injections n'expose qu'à un seul risque, celui de différer la protection de l'enfant.

 

3. Technique d'injection

La maîtrise de la technique d'injection permet de réduire la douleur liée au geste vaccinal, d'optimiser la réponse immune et de réduire les effets indésirables locaux :

  • ne pas purger la seringue de son air, mais positionner la seringue verticalement, aiguille vers le bas pour injecter la totalité du liquide ;
  • obtenir un relâchement musculaire ;
  • utiliser une aiguille de longueur adaptée à l'âge (pas trop courte) ;
  • libérer la pression manuelle sur le muscle pendant l'injection et en retirant l'aiguille ;
  • éviter de dilacérer le muscle en bougeant l'aiguille dans le muscle : enfoncer l'aiguille rapidement en une seule fois, ne pas aspirer avant d'injecter, injecter rapidement.

 

4. Méthodes d'analgésie

Elles permettent de réduire encore la douleur lors du geste vaccinal :

  • à tous âges : distraire l'enfant ;
  • chez les nourrissons : pendant la tétée ou après quelques gouttes de saccharose à 24 % ;
  • chez les plus jeunes : positionner de façon confortable : assis ou porté, pas couché ; assurer un environnement rassurant avec le contact peau à peau, un objet de transition (doudou) ; attitude parentale aidante et chaleureuse ;
  • chez les plus âgés : négociation, information et distraction.

La HAS et certains médecins recommandent également l'anesthésie locale avec la crème EMLA posée en patch 1 heure auparavant sur le lieu d'injection. Elle n'agit que sur la douleur liée à la traversée de l'aiguille, mais pas sur celle liée au produit, qui est élevée avec le vaccin pneumococcique (et HPV) et notable avec ceux contre l'hépatite et la rougeole.

 

C. Rattrapage vaccinal

1. Généralités

Le rattrapage consiste à compléter le calendrier vaccinal d'un sujet en retard du calendrier recommandé.

Principes
  • Protéger en priorité contre les infections les plus sévères (infections invasives, rougeole en période épidémique…).
  • Réduire le nombre d'injections en utilisant les combinaisons disponibles, quitte à administrer une valence vaccinale de plus que nécessaire.
  • Respecter la tolérance de l'enfant… et des parents (rarement plus de deux injections le même jour).
Données à prendre en compte
  • Vaccinations déjà réalisées :
    • comparaison avec celles que l'enfant aurait dû recevoir selon le calendrier en vigueur ;
    • détermination pour chaque antigène du nombre de doses que l'enfant aurait dû recevoir au jour de l'examen.
  • Âge actuel de l'enfant et maladies contre lesquelles il est souhaitable qu'il soit protégé (certaines vaccinations sont essentielles à son âge, d'autres ne sont pas ou ne sont plus nécessaires).
  • Urgence de la protection infectieuse à assurer ; priorité à accorder :
    • aux infections à germes invasifs encapsulés avant l'âge de 2 ans (pneumocoque, Haemophilus influenzae b, méningocoque) ;
    • à la coqueluche avant l'âge de 6 mois ;
    • aux pathologies épidémiques telles que la rougeole à tout âge ;
    • à l'hépatite B, aux infections à HPV et à nouveau la coqueluche à l'adolescence.

​​​​​​​​​​​​​​

2. Modalités pratiques

Règles de base en vaccinologie :

  • chaque dose de vaccin déjà donnée compte, quel que soit son type ; on ne reprend plus, comme cela a été fait dans le passé, la vaccination à son début ; il faut simplement compléter (ou mettre à jour) le calendrier ;
  • tous les vaccins inactivés et sous-unitaires peuvent être administrés simultanément (le même jour) mais dans des sites différents. L'intervalle optimal de temps à respecter entre deux injections d'un même vaccin dépend du temps vaccinal (primovaccination ou rappels) et du schéma recommandé ;
  • deux vaccins viraux vivants différents peuvent être administrés simultanément (le même jour) ou avec un intervalle de 4 semaines (par exemple, fièvre jaune et ROR).

​​​​​​​

3. Particularités du rattrapage chez l'enfant migrant

Pour les personnes migrantes, les recommandations spécifiques concernent les vaccinations contre l'hépatite B, l'hépatite A et la varicelle. Pour les autres vaccinations (BCG, DTCaP-Hib, VPC 13, Men C, ROR, HPV et grippe), les recommandations générales s'appliquent. Les sérologies hépatite B, hépatite A et varicelle, quand elles sont indiquées, pourront utilement être intégrées au « bilan de santé migrants » recommandé après l'arrivée (voir chapitre 40).

 

Références

Calendrier des vaccinations et recommandations vaccinales 2020.
https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/calendrier_vaccinal_29juin20.pdf

HAS. Rattrapage vaccinal en population générale et chez les migrants primo-arrivants 2019.
https://www.has-sante.fr/upload/docs/application/pdf/2020-01/fiche_synthese_rattrapage_vaccinal_population_generale_vf.pdf

HCSP. Avis relatif à l’âge optimal de vaccination par le BCG chez les nourrissons et à la pertinence de pratiquer une intradermoréaction préalable 2017.
http://www.hcsp.fr/explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=598

HCSP. Vaccination des personnes immunodéprimées ou aspléniques. Recommandations. 2015
https://www.hcsp.fr/Explore.cgi/Telecharger?NomFichier=hcspr20141107_vaccinationimmunodeprime.pdf

HCSP. Infections à rotavirus : suspension des recommandations de vaccination des nourrissons. 2013
http://www.hcsp.fr/explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=501

Carnet de vaccination numérique.
https://www.mesvaccins.net/web/patient_account/new