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ITEM 204 Toux chez l'enfant et chez l'adulte (avec le traitement)

  • Devant une toux aiguë ou chronique chez l'enfant ou chez l'adulte, argumenter les principales hypothèses diagnostiques et justifier les examens complémentaires pertinents.
  • Traitement symptomatique de la toux. 

 

Avant de commencer…

La toux est un symptôme fréquent, notamment chez les jeunes enfants.

En cas de toux aiguë, il s'agit le plus souvent d'une toux reliée à une infection des voies aériennes. Il importe de repérer des signes de sévérité clinique nécessitant une prise en charge thérapeutique urgente (détresse respiratoire secondaire à une crise d'asthme, une pneumonie, une laryngite, une inhalation de corps étranger…).

En cas de toux chronique, une enquête clinique exhaustive complétée d'une radiographie du thorax de face systématique permet d'orienter le diagnostic.
L'identification de signes d'alerte et l'analyse du caractère de la toux (sèche ou grasse) sont fondamentales, afin de guider la conduite à tenir et ne pas méconnaître une pathologie nécessitant plus d'investigations.

 

I. Pour bien comprendre

A. Généralités

La toux est un symptôme souvent rapporté chez le jeune enfant.

Il s'agit d'un phénomène réflexe et physiologique, nécessaire à l'épuration et à la protection des voies aériennes. La toux est principalement médiée par des afférences provenant du nerf vague. Elle peut être déclenchée par stimulation du larynx, de la trachée, des grosses bronches, mais aussi de l'œsophage distal ou du conduit auditif externe. Il n'y a pas de déclenchement de la toux à partir des alvéoles.

 

B. Définitions

La toux est qualifiée de :

  • aiguë si durée < 3 semaines ;
  • aiguë prolongée si durée entre 3 et 8 semaines (habituellement reliée au temps de résolution au décours d'une infection virale) ;
  • chronique si durée > 8 semaines.
Toux aiguë : durée < 3 semaines.
Toux chronique : durée > 8 semaines.

 

II. Argumenter les principales hypothèses diagnostiques

A. Toux aiguë

La toux aiguë est le plus souvent liée à une infection virale des voies aériennes supérieures. Son apparente banalité ne doit pas dispenser d'une enquête clinique rigoureuse (tableau 55.1), le plus souvent suffisante pour poser un diagnostic.

Tableau 55.1. Orientation clinique en cas de toux aiguë.
Caractéristiques  de la toux Signes associés Diagnostic probable
Grasse Majorée au décubitus Rhinite  ± Fébricule Rhinopharyngite Infection ORL
Sèche ± Wheezing  ± Dyspnée Asthme (voir chapitre 57) Bronchiolite (voir chapitre 56)
Sèche Fièvre Polypnée Crépitants en foyer Pneumonie (voir chapitre 59)
Sèche Quinteuse ± Vaccination incomplète Coqueluche
Rauque Rhinite  ± Dyspnée inspiratoire  ± Fébricule Laryngite (voir chapitre 54)
Sèche Apparition brutale Syndrome d'inhalation  ± Dyspnée CE inhalé (voir chapitre 54)

 

B. Toux chronique

1. Démarche diagnostique

La stratégie diagnostique est orientée par les données cliniques qui peuvent argumenter une cause de toux spécifique déterminée (tableau 55.2).
Un cliché thoracique de face doit toujours être pratiqué.
Des signes cliniques d'alerte sont à rechercher à chaque évaluation (tableau 55.3)

Tableau 55.2. Orientation clinique en cas de toux chronique.
Caractéristiques de la toux Contexte Signes associés Diagnostic probable
Sèche Récurrente Aucun Viroses hivernales Hyperréactivité bronchique post-virale
Sèche Récurrente Prédominance en deuxième partie de nuit Atopie Wheezing Saisonnalité Réponse aux β2 Asthme
Sèche Quinteuse Contage (entourage) Vaccination incomplète Auscultation normale Coqueluche
Grasse Aucun Jetage postérieur Obstruction nasale Auscultation normale Infection ORL chronique
Grasse Enfant d'âge préscolaire État général conservé Râles bronchiques Bronchite bactérienne persistante
Grasse Expectoration Début précoce Cassure pondérale Hippocratisme digital Crépitants Mucoviscidose Autres causes de dilatations des bronches
Variable Début précoce Rythmés par l'alimentation Fausses routes  ± Cyanose  ± Malaise Pathologie laryngée Fistule œsotrachéale
Aboyante Uniquement diurne S'arrêtant sur commande Terrain anxieux Pas de facteur déclenchant évident Tics Toux psychogène possible

 

Tableau 55.3. Principaux signes cliniques d'alerte en cas de toux chronique, imposant de rechercher une pathologie sous-jacente.
  • Encombrement bronchique permanent
  • Fausses routes alimentaires
  • Malaise avec cyanose
  • Wheezing ou stridor permanents, dyspnée aux deux temps
  • Souffle cardiaque
  • Altération de l'état général, limitation des activités, retentissement sur le sommeil
  • Anomalies de la croissance staturo-pondérale, diarrhée chronique
  • Infections à répétition, infections opportunistes
  • Déformation thoracique
  • Hippocratisme digital

 

En cas d'orientation diagnostique pour une toux spécifique : le bilan de confirmation diagnostique et la prise en charge thérapeutique seront adaptés à chaque situation.

En l'absence d'orientation diagnostique initiale et de signes d'alerte (nécessitant le cas échéant un avis spécialisé pour investigations plus complètes d'emblée) : un premier bilan peut être proposé, associant des EFR (selon l'âge), un bilan allergologique et un avis ORL.

 

2. Causes à évoquer

En cas de toux sèche, les causes les plus fréquentes sont les toux post-infectieuses (disparaissant en général en moins de 8 semaines, correspondant au délai de régénération de l'épithélium cilié permettant une épuration mucociliaire efficace, hors coqueluche) et l'asthme (voir chapitre 57).

Les autres causes sont beaucoup plus rares et s'accompagnent de signes d'alerte cliniques ou radiographiques : pneumopathie interstitielle chronique, cardiopathie…

En cas de toux grasse, la normalité de l'examen pulmonaire et l'identification d'une rhinorrhée postérieure permettent d'évoquer fréquemment une cause ORL : rhinite chronique allergique ou non, sinusite.
En cas d'encombrement bronchique ou d'autres signes d'alerte, une bronchopathie chronique obstructive, responsable de dilatations des bronches (DDB) doit être évoquée. En dehors de la mucoviscidose (voir chapitre 63), ces pathologies relèvent de l'ultraspécialisation : dyskinésie ciliaire primitive, séquelles d'infection virale, complications des déficits immunitaires.
En l'absence de rhinite et de signes d'alerte, c'est-à-dire dans le cas d'une toux grasse isolée et continue d'au moins 4 semaines, le diagnostic de bronchite bactérienne persistante peut être suspecté.

Les autres causes de toux chronique sont les obstructions trachéobronchiques. En dehors du corps étranger inhalé (voir chapitre 54), leur connaissance ne relève pas du domaine du deuxième cycle : trachéomalacie, anomalie vasculaire, fistule œsotrachéale, tumeur, pathologies d'inhalation (troubles de déglutition).
Les troubles respiratoires somatoformes doivent être évoqués selon les situations et l'enquête diagnostique : toux psychogène, toux d'irritation, raclement de gorge, dyskinésie des cordes vocales, syndrome d'hyperventilation.

Connaître les signes cliniques d'alerte.
Cliché thoracique indispensable.

 

III. Argumenter l'attitude thérapeutique et planifier le suivi

A. Traitement étiologique

Le traitement d'une toux est avant tout celui de sa cause.
Un traitement spécifique est habituellement commencé après confirmation diagnostique.

En cas de toux chronique (fig. 55.1), un traitement d'épreuve probabiliste peut être instauré en cas de toux non spécifique isolée. 
En cas de toux sèche, l'éventualité d'un asthme argumente l'essai d'un corticoïde inhalé.
En cas de toux grasse, une antibiothérapie probabiliste peut être proposée dans l'éventualité d'une bronchite bactérienne persistante.
Une réévaluation clinique (avec recherche de signes d'alerte) et l'appréciation de la réponse au traitement (et d'une éventuelle reprise des signes à son arrêt) sont indispensables à la démarche diagnostique.

Image
Fig. 55.1. Toux chronique de l'enfant.

(D'après : Benoist G., Thouvenin G. Toux chronique. Pas à pas en pédiatrie. Arbres décisionnels commentés des Sociétés de pédiatrie. 2019.)

 

B. Traitement symptomatique

Les antitussifs ont une place très limitée en pédiatrie.
Aucune spécialité prescrite n'a démontré son efficacité dans la diminution de la durée et de l'intensité des épisodes de toux.
Toutes ces molécules présentent des effets indésirables qui les ont fait contre-indiquer chez le nourrisson.

Le respect d'une toux productive permet l'évacuation des sécrétions.
En cas d'encombrement nasal associé, la désobstruction rhinopharyngée avec du sérum physiologique est utile afin d'éviter un écoulement nasal postérieur responsable de toux.
En cas d'encombrement bronchique associé, des séances de kinésithérapie respiratoire peuvent être un traitement d'appoint efficace. L'hydratation régulière aide à fluidifier les sécrétions.
Le contrôle d'éventuels facteurs environnementaux est utile. On peut ainsi identifier : des allergènes, l'exposition au tabac et/ou à la pollution atmosphérique, l'humidité, le stress.

Pas d'antitussifs chez le nourrisson.

 

Références

Prise en charge de la toux aiguë chez le nourrisson de moins de 2 ans. 2010
https://www.ansm.sante.fr/var/ansm_site/storage/original/application/fa84be12b0ebddf5e5ad026a59f6a996.pdf
Toux aiguë fébrile. Pas à pas en pédiatrie. Arbres décisionnels commentés des Sociétés de pédiatrie. 2011
https://pap-pediatrie.fr/files/fleurence-2011.pdf
Toux chronique. Pas à pas en pédiatrie. Arbres décisionnels commentés des Sociétés de pédiatrie. 2019
https://pap-pediatrie.fr/files/18_toux_chronique_de_lenfant.pdf