Objectifs pédagogiques
- Devant une toux aiguë ou chronique chez l’enfant ou chez l’adulte, argumenter les principales hypothèses diagnostiques et justifier les examens complémentaires pertinents.
- Traitement symptomatique de la toux.
Avant de commencer…
La toux est un symptôme fréquent, notamment chez les jeunes enfants.
En cas de toux aiguë, il s’agit le plus souvent d’une toux reliée à une infection des voies aériennes. Il importe de repérer des signes de sévérité clinique nécessitant une prise en charge thérapeutique urgente (détresse respiratoire secondaire à une crise d’asthme, une pneumonie, une laryngite, une inhalation de corps étranger…).
En cas de toux chronique, une enquête clinique exhaustive complétée d’une radiographie du thorax de face systématique permet d’orienter le diagnostic.
L’identification de signes d’alerte et l’analyse du caractère de la toux (sèche ou grasse), de sa périodicité sont fondamentales, afin de guider la conduite à tenir et ne pas méconnaître une pathologie nécessitant plus d’investigations.
I. Pour bien comprendre
A. Généralités
La toux est un symptôme souvent rapporté chez le jeune enfant.
Il s’agit d’un phénomène réflexe et physiologique, nécessaire à l’épuration et à la protection des voies aériennes. La toux est principalement médiée par des afférences provenant du nerf vague. Elle peut être déclenchée par stimulation du larynx, de la trachée, des bronches, mais aussi de l’œsophage distal ou des conduits auditifs externes. Il n’y a pas de déclenchement de la toux à partir des alvéoles.
B. Définitions
La toux est qualifiée de :
- aiguë si durée < 3 semaines ;
- aiguë prolongée si durée entre 3 et 8 semaines (habituellement reliée au temps de résolution au décours d’une infection virale) ;
- chronique si durée ≥ 8 semaines.
Toux aiguë : durée < 3 semaines.
Toux chronique : durée ≥ 8 semaines.
II. Argumenter les principales hypothèses diagnostiques
A. Toux aiguë
La toux aiguë est le plus souvent liée à une infection virale des voies aériennes supérieures.
Son apparente banalité ne doit pas dispenser d’une enquête clinique rigoureuse (tableau 55.1), le plus souvent suffisante pour poser un diagnostic.
Les causes les plus fréquente de toux aiguë prolongée sont les toux post-infectieuses (disparaissant en général en moins de 8 semaines, ce qui correspond au délai de régénération de l’épithélium cilié permettant une épuration mucociliaire efficace, hors coqueluche).
Tableau 55.1. Orientation clinique en cas de toux aiguë.
Caractéristiques de la toux | Signes associés | Diagnostic probable |
---|---|---|
Grasse Majorée au décubitus |
Rhinite ± Fébricule |
Rhinopharyngite Infection ORL |
Sèche | ± Wheezing ± Dyspnée |
Asthme (voir chapitre 57) Bronchiolite (voir chapitre 56) |
Sèche | Fièvre Polypnée Crépitants en foyer |
Pneumonie (voir chapitre 59) |
Sèche Quinteuse |
± Vaccination incomplète | Coqueluche (voir chapitre 34) |
Rauque | Rhinite ± Dyspnée inspiratoire ± Fébricule |
Laryngite (voir chapitre 54) |
Sèche Apparition brutale |
Syndrome d’inhalation ± Dyspnée |
Corps étranger inhalé (voir chapitre 54) |
B. Toux chronique
1. Démarche diagnostique
La stratégie diagnostique est orientée par les données cliniques qui peuvent argumenter pour une cause de toux spécifique déterminée (tableau 55.2).
Une radiographie thoracique de face doit toujours être pratiquée.
Des signes cliniques d’alerte sont à rechercher à chaque évaluation (tableau 55.3).
Tableau 55.2. Orientation clinique en cas de toux chronique.
Caractéristiques de la toux | Contexte | Signes associés | Diagnostic probable |
---|---|---|---|
Sèche Récurrente |
Aucun | Viroses hivernales | Hyperréactivité bronchique post-virale |
Sèche Récurrente Prédominance en deuxième partie de nuit |
Atopie | Wheezing Saisonnalité Réponse aux b2 |
Asthme |
Sèche Quinteuse |
Contage (entourage) Vaccination incomplète | Auscultation normale | Coqueluche |
Grasse | Aucun | Jetage postérieur Obstruction nasale Auscultation normale |
Infection ORL chronique |
Grasse | Enfant d’âge préscolaire | État général conservé Râles bronchiques |
Bronchite bactérienne persistante |
Grasse Expectoration |
Début précoce | Cassure pondérale Hippocratisme digital Crépitants |
Mucoviscidose Autres causes de dilatations des bronches |
Variable | Début précoce Rythmés par l’alimentation |
Fausses routes ± Cyanose ± Malaise |
Pathologie laryngée Fistule œsotrachéale |
Aboyante Uniquement diurne |
Terrain anxieux Pas de facteur déclenchant évident |
Tics | Toux psychogène possible |
Tableau 55.3. Principaux signes cliniques d’alerte en cas de toux chronique, imposant de rechercher une pathologie sous-jacente.
|
En cas d’orientation diagnostique pour une toux spécifique : le bilan de confirmation diagnostique et la prise en charge thérapeutique seront adaptés à chaque situation.
En l’absence d’orientation diagnostique initiale et de signes d’alerte (nécessitant le cas échéant un avis spécialisé pour investigations plus complètes d’emblée) : un premier bilan peut être proposé, associant en plus de la radiographie thoracique, des EFR (selon l’âge), un bilan allergologique et un avis ORL.
2. Causes à évoquer
En cas de toux sèche, les causes les plus fréquentes sont l’asthme (voir chapitre 57) et l’hyperractivité bronchique post-infectieuse prolongée.
Les autres causes sont beaucoup plus rares et s’accompagnent de signes d’alerte cliniques ou radiographiques : pneumopathie interstitielle diffuse, cardiopathie…
En cas de toux grasse, la normalité de l’examen respiratoire et l’identification d’une rhinorrhée postérieure permettent d’évoquer fréquemment une cause ORL : rhinite chronique allergique ou non, sinusite.
En cas d’encombrement bronchique ou d’autres signes d’alerte, une bronchopathie chronique obstructive, responsable de dilatations des bronches (DDB) doit être évoquée. En dehors de la mucoviscidose (voir chapitre 63), ces pathologies relèvent de l’ultraspécialisation : dyskinésie ciliaire primitive, séquelles d’infection virale, complications des déficits immunitaires.
En l’absence de rhinite et de signes d’alerte, c’est-à-dire dans le cas d’une toux grasse isolée et continue d’au moins 4 semaines, le diagnostic de bronchite bactérienne persistante peut être suspecté.
Les autres causes de toux chronique sont les obstructions trachéobronchiques. En dehors du corps étranger inhalé (voir chapitre 54), leur connaissance ne relève pas du domaine du deuxième cycle : trachéomalacie, anomalie vasculaire, fistule œsotrachéale, tumeur, pathologies d’inhalation (troubles de déglutition).
Les troubles respiratoires somatoformes doivent être évoqués selon les situations et l’enquête diagnostique : toux psychogène, raclement de gorge, dyskinésie des cordes vocales, syndrome d’hyperventilation. La présence de toux nocturne plaide le plus souvent contre ces diagnostics.
Connaître les signes cliniques d’alerte.
Radiographie thoracique indispensable.
III. Argumenter l’attitude thérapeutique et planifier le suivi
A. Traitement étiologique
Le traitement d’une toux est avant tout celui de sa cause.
Un traitement spécifique est habituellement commencé après confirmation diagnostique.
En cas de toux chronique (fig. 55.1), un traitement d’épreuve probabiliste peut être instauré en cas de toux non spécifique isolée :
- toux sèche → corticoïde inhalé dans l’éventualité d’un asthme ;
- toux grasse → antibiothérapie dans l’éventualité d’une bronchite bactérienne persistante.
Une réévaluation clinique (avec recherche de signes d’alerte) et l’appréciation de la réponse au traitement (et d’une éventuelle reprise des signes à son arrêt) sont indispensables.

Fig. 55.1. Toux chronique de l’enfant.
D’après : Benoist G, Thouvenin G. Toux chronique. Pas à pas en pédiatrie.
Arbres décisionnels commentés des Sociétés de pédiatrie. 2019.
B. Traitement symptomatique
Les antitussifs ont une place très limitée en pédiatrie.
Aucune spécialité n’a démontré son efficacité dans la diminution de la durée et de l’intensité de la toux.
Toutes ces molécules présentent des effets indésirables et sont contre-indiquées chez le nourrisson.
Le respect d’une toux productive permet l’évacuation des sécrétions.
En cas d’encombrement nasal associé, la désobstruction rhinopharyngée avec du sérum physiologique est utile afin d’éviter un écoulement nasal postérieur responsable de toux.
En cas d’encombrement bronchique associé, des séances de kinésithérapie respiratoire peuvent être un traitement d’appoint efficace.
Le contrôle d’éventuels facteurs environnementaux est utile (allergènes, exposition au tabac et/ou à la pollution atmosphérique, humidité).
Pas d’antitussifs chez le nourrisson.
Références
![]() |
Afssaps. Prise en charge de la toux aiguë chez le nourrisson de moins de 2 ans. 2010. http://www.apima.org/img_bronner/MAP_toux_enfants-nourrissons-oct2010.P… |
![]() |
Fleurence E. Toux aiguë fébrile. Pas à pas en pédiatrie. Arbres décisionnels commentés des Sociétés de pédiatrie. 2011. https://pap-pediatrie.fr/files/fleurence-2011.pdf |
![]() |
Benoist G., Thouvenin G. Toux chronique. Pas à pas en pédiatrie. Arbres décisionnels commentés des Sociétés de pédiatrie. 2019. https://pap-pediatrie.fr/files/18_toux_chronique_de_lenfant.pdf |