Déficits immunitaires héréditaires

Texte

 

ITEM 189 Déficit immunitaire

  • Connaître les principales situations cliniques et/ou biologiques faisant suspecter un déficit immunitaire chez l'enfant et chez l'adulte.
     
Avant de commencer…

Les déficits immunitaires héréditaires (DIH) sont des pathologies génétiques rares.
La majorité d'entre eux se révèlent au cours de l'enfance par des infections, de l'auto-immunité, de l'auto-inflammation, des néoplasies et parfois de l'allergie. Cependant, certains DIH se révèlent plus tardivement à l'âge adulte, en particulier le déficit immunitaire commun variable (DICV).

Le clinicien doit connaître les signes d'alerte devant faire évoquer un DIH.
L'objectif de ce chapitre est de le guider dans sa démarche diagnostique, afin de pouvoir identifier un DIH.

Les déficits immunitaires acquis et les neutropénies ne seront pas abordés car ils nécessitent d'autres analyses spécifiques, hors du champ attendu des objectifs des ECNi pour cet item. De même, les complications des traitements immunosuppresseurs ne seront pas traitées. 

 

I. Pour bien comprendre

Les déficits immunitaires héréditaires (DIH) sont des maladies rares.
Leur fréquence est estimée à 1 naissance sur 4 000 dans la population générale. Il existe actuellement plus de 430 DIH décrits avec une cause moléculaire identifiée.
Seuls les DIH sont détaillés dans ce chapitre ; les déficits immunitaires acquis ne sont pas traités.

La majorité des DIH sont symptomatiques au cours de l'enfance, mais certains peuvent se révéler plus tardivement au cours de l'adolescence et même à l'âge adulte.
Le clinicien doit suspecter un DIH chez un enfant ayant des infections récurrentes même banales, des infections sévères et/ou inhabituelles dans leur survenue, leur localisation ou leur évolution. Les autres manifestations cliniques à début précoce qui peuvent révéler un DIH sont une auto-immunité, un eczéma, des syndromes lymphoprolifératifs, des néoplasies, de l'allergie.
L'exploration doit être hiérarchisée. Un bilan de première intention avec des examens de dépistage simples (hémogramme, dosage pondéral des immunoglobulines, sérologies post-vaccinales et post-infectieuses) permet d'orienter initialement le diagnostic.
L'analyse conjointe des antécédents infectieux, de l'examen clinique et des résultats des examens de première intention permet de guider la prescription des examens de deuxième intention, qui dépendront du type de DIH suspecté.

Le diagnostic précoce d'un DIH est important car il permet l'instauration d'un traitement adapté et une réduction des complications infectieuses, des atteintes d'organe et du risque de décès.

Infections récurrentes, sévères et/ou inhabituelles → rechercher un DIH.
Autres manifestations cliniques à révélation précoce : auto-immunité, eczéma, syndromes lymphoprolifératifs et néoplasies → rechercher un DIH.

 

II. Argumenter le diagnostic de déficit immunitaire héréditaire

A. Circonstances cliniques

1. Conduite de la consultation

Le médecin doit rechercher en tout premier lieu à l'interrogatoire :

  • des antécédents familiaux de déficit immunitaire ;
  • des signes cliniques similaires à ceux du patient parmi les membres de sa famille.

L'examen physique doit particulièrement évaluer :

  • la croissance staturo-pondérale ;
  • l'examen ORL : tympans, obstruction nasale, amygdales, muguet ;
  • l'examen cardiopulmonaire : râles bronchiques, crépitants ou sibilants ;
  • l'examen cutané : eczéma, cicatrices d'infections anciennes et de vaccination par le BCG ;
  • les aires ganglionnaires, une hépatomégalie, une splénomégalie, des signes d'auto-immunité, d'allergie.

 

2. Signes d'alerte de DIH

Rationnel

Les infections ORL et des voies respiratoires hautes et basses sont des motifs fréquents de consultation en pédiatrie. Une fréquence trop importante de celles-ci peut être l'un des premiers signes de DIH.
Un enfant âgé de moins de 4 ans avec plus de 8 otites moyennes aiguës (OMA) purulentes par an, un enfant âgé de plus de 4 ans avec plus de 4 OMA par an, ou un enfant avec plus de 2 pneumopathies ou/et 2 sinusites par an doivent être explorés sur le plan immunologique. Les fréquences des infections sont données à titre indicatif et doivent être pondérées selon le mode de garde ; les enfants gardés en crèche collective font habituellement plus d'infections que ceux gardés au domicile.
Les infections virales respiratoires (rhinopharyngite, laryngite, trachéite, bronchite ou bronchiolite) sans signe de gravité ou sans surinfections bactériennes récurrentes suggèrent rarement un DIH. Elles doivent orienter vers d'autres facteurs de susceptibilité, tels que l'hyperactivité bronchique ou des anomalies morphologiques de la sphère ORL.

Toutes les infections sévères et invasives (sepsis, méningite) à bactéries encapsulées (pneumocoque, H. influenzae type b et méningocoque), même après un seul épisode, doivent être explorées.
Il en est de même pour les infections cutanées et tissulaires à bactéries pyogènes récurrentes (folliculite, cellulite, abcès), les infections récurrentes avec le même type de pathogène à chaque épisode, les infections inhabituelles et/ou d'évolution inhabituelle (infection par un germe opportuniste, diarrhée infectieuse persistante, muguet buccal ou candidose cutanée récidivante, infection mycobactérienne ganglionnaire ou osseuse).

D'autres signes cliniques d'alerte pourront orienter le diagnostic, comme un eczéma sévère, une auto-immunité (cytopénie auto-immune, par exemple : anémie hémolytique auto-immune, purpura thrombopénique en dehors de l'âge habituel du PTI ou d'évolution chronique), des adénopathies, une hépatosplénomégalie (inflammation chronique, lymphoprolifération) et parfois de l'allergie. Il convient également de rechercher un retentissement sur la croissance, qui est un critère de gravité du DIH.

En pratique

Le tableau 26.1 synthétise les signes d'appel de DIH chez un enfant.

Tableau 26.1. Signes d'appel de DIH chez un enfant.
Histoire familiale
  • Antécédents familiaux de DIH
  • Présence de signes cliniques similaires
Infections récurrentes ORL ou des voies respiratoires
  • ≥ 8 OMA/an chez l'enfant d'âge < 4 ans
  • ≥ 4 OMA/an chez l'enfant d'âge ≥ 4 ans
  • ≥ 2 sinusites/an
  • ≥ 2 pneumopathies/an
Infections sévères ou inhabituelles
  • ≥ 1 épisode d'infection sévère ou invasive
  • Infections à bactéries pyogènes récurrentes
  • ≥ 1 épisode d'infection par un germe opportuniste
  • Diarrhée infectieuse persistante
  • Muguet ou candidose récidivants
Autres signes devant alerter
  • Cassure staturo-pondérale
  • Eczéma sévère et/ou avec des localisations inhabituelles
  • Allergie
  • Auto-immunité (cytopénie, endocrinopathies…)
  • Lymphoproliférations, adénopathies, hépatosplénomégalie
  • Retard de chute du cordon ombilical
Connaître le tableau de synthèse des signes d'alerte de DIH.

 

B. Enquête paraclinique

1. Bilan de première intention

Généralités

Bilan de dépistage à prescrire :

  • hémogramme (formule leucocytaire et plaquettes) ;
  • dosage pondéral des immunoglobulines (Ig) : IgG, IgA, IgM ;
  • étude des sérologies post-vaccinales et post-infectieuses.

Ce sont des examens simples permettant d'orienter le diagnostic de DIH en cas de signes d'alerte. Ils doivent être interprétés avec les normes pédiatriques.

Hémogramme

L'hémogramme est le premier examen à réaliser en cas de suspicion de DIH.
Il permet d'apprécier la formule leucocytaire (à interpréter en valeur absolue) et de rechercher la présence d'une neutropénie, d'une lymphopénie, d'une anémie, d'une thrombopénie et/ou d'une thrombocytose.

Le taux de lymphocytes chez le jeune enfant doit être impérativement interprété en fonction de l'âge, du fait de la lymphocytose physiologique dans les premières années de vie. Une lymphopénie oriente souvent vers un déficit de l'immunité cellulaire (immunité dépendante des lymphocytes T). En présence d'une lymphopénie isolée sur l'hémogramme, il faut contrôler l'hémogramme quelques jours plus tard pour vérifier sa normalisation. Toute lymphopénie persistante doit être explorée, même de découverte fortuite à l'hémogramme, plus particulièrement chez un nouveau-né ou un nourrisson.

Un frottis sanguin pourra être demandé en cas d'infection bactérienne invasive (sepsis, méningite) pour rechercher des corps de Jolly en faveur d'une asplénie ou d'une hyposplénie.

Dosage pondéral des immunoglobulines (Ig)

Le dosage pondéral des IgG, des IgA et des IgM apporte des éléments au diagnostic des déficits immunitaires humoraux (lymphocytes B) et des déficits immunitaires combinés (touchant à la fois les lymphocytes T et les lymphocytes B).
Les déficits immunitaires humoraux sont les DIH les plus fréquents et sont généralement révélés par des infections bactériennes des voies respiratoires (ORL et pulmonaires).

Le dosage des Ig est difficilement interprétable avant l'âge de 4 mois car, à cet âge, l'essentiel des IgG sont d'origine maternelle (passage transplacentaire).
Après cet âge, les taux devront être interprétés en fonction de l'âge, car il existe de grandes variations du taux des Ig pendant l'enfance.

L'électrophorèse des protéines plasmatiques (EPP) est à réserver aux adolescents et aux adultes en première intention avant le dosage pondéral des Ig, car les taux des Ig sont stables à partir de l'adolescence.
Le dosage pondéral des Ig et l'EPP permettent d'apprécier la production globale d'anticorps, indépendamment de leur spécificité.
Noter que le dosage pondéral des Ig ne doit pas être utilisé pour quantifier une Ig monoclonale ; il permet seulement de doser des Ig polyclonales résiduelles.

Étude des sérologies post-vaccinales

L'étude des sérologies post-vaccinales (par exemple, antitétanique, anti-diphtérie, anti-Haemophilus b et anti-pneumocoque) et des sérologies après une infection patente permet d'apprécier la capacité de production d'anticorps spécifiques.

Ces anticorps peuvent être soit de type antiprotidique (les plus nombreux), soit de type antipolysaccharidique.
Il est important de savoir que l'enfant âgé de moins de 2 ans a de manière physiologique un défaut de production des anticorps antipolysaccharidiques. La production de ces anticorps n'est donc évaluable qu'après cet âge (par exemple, anticorps après infection à pneumocoque ou après vaccination par le vaccin pneumococcique non conjugué).
L'ensemble des sérologies doit être interprété avec prudence pendant les 6 premiers mois de vie, période pendant laquelle il peut exister des sérologies faussement positives dues à la persistance d'anticorps maternels.

Imagerie

Les examens d'imagerie peuvent être utiles pour compléter et interpréter le bilan initial, par exemple la radiographie du thorax (ombre thymique), le scanner sinusien (sinusite), le scanner thoracique (bronchiectasie, corps étranger inhalé, nodule pulmonaire, adénopathies) et l'échographie ou le scanner abdominal (adénopathies, splénomégalie, asplénie).

Examens biologiques de première intention en cas de suspicion d'un DIH :
• hémogramme : neutropénie, lymphopénie, anémie, thrombopénie, thrombocytose ;
• dosage pondéral des Ig : évaluation de la production d'anticorps ;
• sérologies post-vaccinales et post-infectieuses : évaluation de la production d'anticorps spécifiques.

 

2. Bilan de deuxième intention

Généralités

L'analyse conjointe des antécédents infectieux et de l'examen clinique, mais surtout les résultats des examens de première intention permettent ensuite de guider la prescription des examens de deuxième intention.
On distingue deux situations : présence ou absence d'anomalies sur le bilan initial.

Présence d'anomalies sur le bilan de première intention

Examens à réaliser :

  • le phénotypage des lymphocytes T, B et NK dans un premier temps ;
  • les proliférations lymphocytaires, ou test de transformations lymphoblastiques (TTL), dans un deuxième temps (si lymphocytes T présents et après avis d'un immunologiste).

Le phénotypage des lymphocytes T, B et NK est à prescrire dans un premier temps. Il doit être interprété selon l'âge de l'enfant.
Cet examen quantitatif permet d'apprécier la présence et la répartition des différentes populations lymphocytaires, et permet d'orienter le diagnostic soit vers un déficit de l'immunité humorale (dépendante des lymphocytes B), soit vers un déficit de l'immunité cellulaire (dépendante des lymphocytes T).

Les proliférations lymphocytaires (ou TTL) sont à prescrire dans un deuxième temps si un déficit immunitaire combiné est suspecté et que le patient a des lymphocytes T circulants. Elles permettent de différencier les déficits purement de l'immunité humorale des déficits immunitaires combinés (DIC).
Ces examens qualitatifs permettent de mesurer la capacité proliférative des lymphocytes T vis-à-vis de mitogènes ou d'antigènes. Les mitogènes sont capables de stimuler les lymphocytes T de manière non spécifique, c'est-à-dire sans immunisation préalable. Les TTL en réponse aux antigènes nécessitent une sensibilisation préalable du patient, soit par vaccination soit par une infection.

La figure 26.1 (voir infra) résume la démarche diagnostique dans cette situation.

Bilan initial anormal : phénotypage lymphocytaire (T/B/NK).

 

Absence d'anomalies sur le bilan de première intention

Examens à réaliser en fonction du contexte clinique :

  • frottis sanguin ;
  • exploration des voies du complément (classique, alterne et terminale) : CH50, C3, C4 et AP50 ; 
  • étude des fonctions phagocytaires :
    • étude de l'explosion oxydative phagocytaire : test au Nitro Blue Tetrazolium (NBT test) ou par réduction de la dihydrorhodamine (DHR) ;
    • étude du chimiotactisme des polynucléaires neutrophiles ;
  • dosage des sous-classes d'IgG et dosage des IgE.

En cas d'infections tissulaires bactériennes et/ou fongiques (par exemple, abcès cutanés et/ou viscéraux, pneumopathie et/ou infection aspergillaire), les déficits immunitaires de la phagocytose doivent être évoqués.
Les fonctions phagocytaires peuvent être évaluées par des techniques telles que le NBT test ou la DHR, qui étudient l'explosion oxydative (mécanisme mis en jeu pour détruire le pathogène endocyté) et font appel à la capacité de réduction de ces cellules grâce à la génération de produits dérivés de l'O2 après activation. Ces explorations permettent de diagnostiquer une maladie appelée granulomatose septique chronique, dont il existe plusieurs formes génétiques. Cette pathologie s'accompagne d'abcès tissulaires bactériens ou fongiques et, parfois, de colite inflammatoire. L'étude du chimiotactisme étudie le mouvement des polynucléaires neutrophiles (PNN) et permet le diagnostic des défauts d'adhésion leucocytaire.
Le dosage des IgE permet d'argumenter un syndrome hyper-IgE (syndrome de Job ou Buckley).

En cas d'infections bactériennes invasives (sepsis, méningite), les explorations à réaliser sont différentes.
La voie classique et la voie terminale du complément sont explorées par le dosage du CH50. La voie alterne du complément est étudiée par le dosage de l'AP50. Parmi les déficits du complément, les déficits en C2, C3, C4, C5, C6, C7, C8 et en properdine sont plus fréquemment responsables d'infections bactériennes invasives.
Le dosage des sous-classes d'IgG (1 à 4) recherche un déficit en sous-classes d'IgG. Il doit être fait uniquement chez les enfants de plus 18 mois avec un dosage d'IgG normal. Un frottis sanguin recherche des corps de Jolly pour écarter une asplénie ou une hyposplénie. En cas de méningite récidivante à germe encapsulé, il convient également de réaliser une IRM cérébrale à la recherche d'une anomalie anatomique craniofaciale, comme une brèche ostéoméningée.

La figure 26.2 (voir infra) résume la démarche diagnostique dans cette situation.

Infections tissulaires bactériennes ou fongiques : fonctions phagocytaires, dosage des IgE.
Infections invasives bactériennes : frottis sanguin, complément, dosage des sous-classes d'Ig.

 

3. Recours à un avis spécialisé

En cas de normalité de l'ensemble de ces examens, il ne faut pas éliminer pour autant le diagnostic de DIH.
Il s'agit avant tout d'un diagnostic clinique. Les explorations citées n'étudient qu'une partie du système immunitaire.
En cas de suspicion de DIH, il est nécessaire de recourir à l'avis d'un immunologiste spécialiste pour orienter au mieux le choix des examens biologiques à réaliser.

 

C. Points clés sur certains déficits immunitaires héréditaires

1. Déficits immunitaires humoraux

Les déficits immunitaires humoraux sont parmi les DIH les plus fréquents.
Les patients présentent un défaut de production d'anticorps pouvant aller de l'agammaglobulinémie (absence de lymphocytes B, d'Ig spécifiques) à un défaut isolé de production d'anticorps. Les déficits de l'immunité humorale sont parfois secondaires à une absence de lymphocytes T.
Parmi les DIH humoraux prédominants, on retrouve de nombreuses entités. Deux d'entre elles sont évoquées ici à titre d'exemple.

Les agammaglobulinénies ont une prévalence de 1 pour 250 000 et sont caractérisées par une absence de lymphocytes B circulants. La majorité des patients présente une agammaglobulinémie avec une transmission liée à l'X (maladie de Bruton).

Le déficit immunitaire commun variable (DICV) a une prévalence de 1 sur 30 000 et un âge de révélation plus tardif que les autres DIH, habituellement chez l'adulte.

Ce déficit immunitaire est très hétérogène sur les plans clinique et génétique, car de nombreuses causes génétiques ont été identifiées. Il se caractérise au niveau immunologique par une diminution des IgG (parfois associée à une diminution des IgA ou des IgM), un défaut de production d'anticorps spécifiques (anomalies des sérologies évaluées) et la présence de lymphocytes B circulants (> 1 %).

Les déficits humoraux s'accompagnent de symptômes prédominants infectieux, bactériens le plus souvent, et touchent les voies aériennes supérieures et inférieures (sinusites, rhinopharyngites, otites, bronchites et pneumopathies), plus rarement digestifs (Giardia, Campylobacter, salmonelle). Les infections chroniques neuroméningées à entérovirus peuvent survenir chez les patients avec une agammaglobulinémie congénitale. Il est également retrouvé un syndrome tumoral (hyperplasie ganglionnaire, splénomégalie) chez 40 % des patients DICV, et une maladie auto-immune chez 20 % d'eux.
Les patients avec des déficits immunitaires humoraux symptomatiques reçoivent régulièrement des IgG polyvalentes pour substituer leur défaut de production d'anticorps. Il faut également traiter systématiquement et rapidement par antibiotiques les épisodes infectieux d'allure bactérienne. Il convient de prendre en charge également les maladies auto-immunes.

 

2. Déficits immunitaires combinés (DIC)

Les DIC sont définis par une lymphopénie T et/ou par des anomalies fonctionnelles des lymphocytes T qui vont s'associer avec des anomalies lymphocytaires B soit primitives ou secondaires, selon la cause génétique, d'où la notion de déficit immunitaire combiné.

Parmi les DIC, les patients qui ont une absence complète de lymphocytes T circulants rentrent dans le groupe des déficits immunitaires combinés sévères (DICS), dont la prévalence est de 1 pour 75 000. Il existe de nombreuses maladies génétiques différentes responsables de DIC qui seront recherchées en fonction du tableau clinique, de la transmission génétique du déficit et des résultats des explorations. Pour ne pas passer à côté de ce diagnostic, il est impératif d'évaluer le nombre de lymphocytes à l'hémogramme avec les normes en fonction de l'âge : ainsi, un enfant de moins de 1 an avec des lymphocytes inférieurs à 3 500/mm3 doit bénéficier d'un immunophénotypage.
Ces déficits se révèlent plus précocement dans la vie par rapport aux déficits immunitaires humoraux, parfois dès le 1er mois de vie pour les DICS. Les DIC sont caractérisés sur le plan clinique par la survenue d'infections récurrentes et sévères, bactériennes, virales, fongiques et à germes opportunistes (pneumocystose, candidose, bécégite…) avec un tropisme respiratoire et digestif, avec pour conséquence une cassure staturo-pondérale, et parfois des manifestations auto-immunes. Leur prise en charge fait généralement appel à une transplantation de cellules souches hématopoïétiques pour pouvoir corriger le système immunitaire des patients.

Image
 
Fig. 26.1. Démarche en cas d'anomalies sur le bilan de première intention.

En cas de lymphopénie : toute lymphopénie même isolée doit être explorée.
En cas d'hypogammaglobulinémie associée à des sérologies post-vaccinales et/ou post-infectieuses basses ou nulles, si les examens de première intention mettent en évidence un défaut de production d'anticorps post-vaccinaux isolé, il faut revacciner l'enfant et contrôler à nouveau le taux d'anticorps 3 à 6 semaines après. Si le taux d'anticorps reste bas, il faut compléter le bilan par un phénotypage lymphocytaire.
Le phénotypage lymphocytaire peut mettre en évidence un DICS (déficit immunitaire combiné sévère, c'est-à-dire l'absence de lymphocytes T ou la présence d'une lymphopénie T très profonde, associé à un défaut de l'immunité humorale) ou un DIC lorsque la lymphopénie T est moins profonde avec des TTL anormales. Les TTL ne sont à réaliser que si les lymphocytes T sont présents et qu'un DIC est suspecté.
TTL : test de transformation lymphoblastique.

 

absence anomalies
Fig. 26.2. Démarche en l'absence d'anomalies sur le bilan de première intention.

En cas d'infections tissulaires bactériennes et/ou fongiques récurrentes, il faut réaliser une étude fonctionnelle des phagocytes avec étude de l'explosion oxydative (NBT-test ou étude par DHR) pour rechercher une granulomatose septique chronique ; et éventuellement en cas d'hyperleucocytose importante, un défaut d'adhésion leucocytaire en étudiant le chimiotactisme. Un dosage des IgE est à réaliser pour rechercher des arguments biologiques en faveur d'un syndrome hyper-IgE (syndrome de Job ou Buckley).
En cas d'infections invasives bactériennes causées par des germes encapsulés, il faut rechercher des corps de Jolly sur le frottis sanguin témoignant d'une asplénie ou d'une hyposplénie. Il faut également réaliser une exploration des voies classique et alterne du complément par les dosages du CH50 et de l'AP50, à la recherche d'un défaut d'une des protéines du complément. Une étude des sous-classes d'Ig recherche un déficit en sous-classes d'Ig. Enfin les déficits de l'immunité innée seront à étudier en cas de normalité de l'ensemble de ces explorations.
NBT : nitrobleu de tétrazolium ; DHR : dihydrorhodamine. 

 

Références

ASSIM. Collège des enseignants d'immunologie. Immunologie fondamentale et immunopathologie. 2e édition. Issy-les-Moulineaux: Elsevier Masson; 2018. Gathmann B., Mahlaoui N., CEREDIH; Gérard L., ¬Oksenhendler E., Warnatz K., et al., European Society for Immunodeficiencies Registry Working Party. Clinical picture and treatment of 2 212 patients with common variable immunodeficiency. J Allergy Clin Immunol, 2014;134:116–26.