Éruptions fébriles

Texte

 

ITEM 164 Exanthèmes fébriles de l'enfant

  • Argumenter les principales hypothèses diagnostiques et justifier les examens complémentaires pertinents.
  • Diagnostiquer une rougeole, une rubéole, un mégalérythème épidémique, un exanthème subit, une mononucléose infectieuse, une scarlatine, un syndrome de Kawasaki.
  • Connaître les principes de la thérapeutique et du suivi du patient.
  • Connaître la conduite à tenir vis-à-vis de l'entourage autour d'un diagnostic de rougeole, rubéole, scarlatine, et les risques chez la femme enceinte.

 

ITEM 168 Infections à herpès virus du sujet immunocompétent

  • Diagnostiquer un herpès cutané et muqueux, une varicelle, un zona chez le sujet immunocompétent
  • Connaître la conduite à tenir devant un herpès cutané et muqueux, une varicelle, un zona et leurs complications les plus fréquentes.
  • Connaître les risques en cas d'infection chez la femme enceinte, le nouveau-né, le sujet atopique.

 

Avant de commencer…

Les consultations pour éruptions fébriles sont fréquentes chez le jeune enfant.
Le diagnostic est avant tout clinique. L'indication des examens complémentaires est très limitée et réservée habituellement à l'enfant immunodéprimé ou dans un contexte particulier (contact avec une femme enceinte, déclaration obligatoire).
Les causes sont le plus souvent des infections virales banales avec exanthème. Certaines ont une sémiologie infectieuse et dermatologique spécifique permettant d'orienter le diagnostic vers un agent infectieux.
Seules les causes indiquées dans les items de l'ECNi sont détaillées ici.

La prise en charge est le plus souvent seulement symptomatique.
Les quelques situations d'urgence doivent être rapidement identifiées par un examen clinique rigoureux, notamment par la recherche de troubles hémodynamiques ou devant l'association de signes évocateurs d'atteintes viscérales et/ou muqueuses.
Les complications (y compris chez les enfants immunocompétents) ainsi que leurs conséquences épidémiologiques en collectivité peuvent conduire à une prise en charge préventive (hygiène et vaccinations).

 

I. Pour bien comprendre

A. Préambule

Les causes infectieuses (virales avant tout) sont les plus fréquentes.
Les maladies inflammatoires et les toxidermies médicamenteuses peuvent être fébriles et évoquées comme diagnostics différentiels.
Certaines urgences diagnostiques et thérapeutiques doivent être rapidement identifiées, notamment le purpura méningococcique (voir chapitre 24) et la maladie de Kawasaki.

Démarche diagnostique systématique :

  • analyser les lésions sur un plan dermatologique ;
  • identifier les situations de gravité nécessitant une prise en charge urgente ;
  • rechercher les antécédents de l'enfant (maladies, vaccinations, contages, médicaments…) ;
  • replacer l'éruption fébrile dans son contexte clinique (signes associés) et évolutif.

 

B. Type d'éruptions

Les termes de « morbilliformes », « scarlatiniformes »… sont désuets et doivent être abandonnés. Un même agent viral peut parfois être responsable d'éruptions de divers types.

Classification actuelle :

  • exanthèmes érythémateux : scarlatine, syndromes toxiniques streptococcique ou staphylococcique, maladie de Kawasaki, toxidermie médicamenteuse ;
  • exanthèmes maculopapuleux : rougeole, rubéole, exanthème subit, mégalérythème épidémique, infections à entérovirus, maladie de Kawasaki, urticaire, toxidermie médicamenteuse ;
  • exanthèmes vésiculopustuleux : varicelle, HSV, zona, entérovirus (coxsackievirus : syndrome pieds-mains-bouche).

 

II. Démarche diagnostique générale

A. Évaluation de la gravité

Rechercher avant tout une urgence diagnostique et thérapeutique :

  • purpura fébrile + troubles hémodynamiques = étiologie méningococcique ;
  • érythème fébrile + troubles hémodynamiques = syndrome toxinique ; ce tableau, associé à des atteintes multiples d'organe (au moins trois), signe le Toxic Shock Syndrome (TSS) : atteinte digestive (vomissements, diarrhée), musculaire (algies, élévation des CPK), neurologique (désorientation, troubles de conscience), muqueuse (énanthème pharyngé, conjonctival, vaginal), rénale (insuffisance rénale, leucocyturie), hépatique (élévation de la bilirubine, des transaminases), hématologique (thrombopénie) ; portes d'entrée : cutanée, pharyngée, ostéoarticulaire, pleuropulmonaire… ;
  • fièvre > 5 jours : maladie de Kawasaki ;
  • lésions cutanées érythémateuses circonscrites infiltrées et douloureuses : dermohypodermite bactérienne, fasciite ;
  • lésions ulcérées des muqueuses et/ou décollements épidermiques extensifs : Stevens-Johnson, syndrome de Lyell, épidermolyse bulleuse staphylococcique (Scalded Skin Syndrome, SSS) ;
  • altération de l'état général avec adénopathies, atteinte multiviscérale et anomalies hématologiques (hyperéosinophilie, hyperlymphocytose) dans un contexte de prise médicamenteuse prolongée : DRESS syndrome (Drug Reaction with Eosinophilia and Systemic Symptoms).

Toujours repérer un éventuel terrain spécifique :

  • cas index ou contact : enfant immunodéprimé, nouveau-né ;
  • femme enceinte dans l'entourage (rougeole, rubéole, mégalérythème épidémique, varicelle).
Urgences : sepsis, choc septique, syndrome toxinique, purpura méningococcique, maladie de Kawasaki, ulcérations muqueuses et décollements épidermiques extensifs, terrain particulier.

 

B. Orientation diagnostique

L'arbre décisionnel (fig. 38.1) permet une synthèse des données abordées.
Image
Fig. 38.1. Conduite à tenir devant une éruption fébrile de l'enfant.

DRESS : Drug Reaction with Eosinophilia and Systemic Symptoms.

Principales causes infectieuses des exanthèmes fébriles : origine virale.
Orientation étiologique : contage et analyse sémiologique.

 

III. Maladies infectieuses éruptives

A. Rougeole

1. Pour bien comprendre

Épidémiologie

Elle demeure une maladie infectieuse d'actualité dans les pays industrialisés, évoluant sur un mode endémo-épidémique, malgré la mise à disposition de vaccins efficaces depuis plus de 40 ans. La France n'est pas épargnée, avec la survenue d'épidémies régulières depuis 2009.
L'explication vient d'une couverture vaccinale restée longtemps insuffisante en France (< 90 %), ce qui a créé un réservoir important de sujets non protégés, un rattrapage vaccinal insuffisant et une population non immune qui permet encore une transmission virale interhumaine.
Ses complications (rares dans les pays industrialisés) sont fréquentes dans les pays en développement, où elles sont un facteur majeur de mortalité et de morbidité infantile. La maladie est plus sévère avant l'âge de 1 an, chez l'adulte, la femme enceinte et l'immunodéprimé.

Rappels d'infectiologie

L'agent causal est un paramyxovirus dénommé morbillivirus.

Les nourrissons sont protégés jusqu'à l'âge de 6 mois par les anticorps maternels.
La maladie confère une immunité durable.

Vaccination antirougeoleuse recommandée pour tous les nourrissons (calendrier 2020) :

  • combinée avec les vaccins rubéole et oreillons (vaccination triple ROR) ;
  • 1re dose à l'âge de 12 mois ; 2e dose à l'âge de 16–18 mois.

La transmission est directe, par voie aérienne.
L'incubation dure 10 à 12 jours.
La contagiosité est très importante par voie respiratoire, dès la phase d'invasion débutant 5 jours avant l'éruption et jusqu'au 5e jour après le début de l'éruption.

 

2. Diagnostic

Enquête clinique

Arguments anamnestiques en faveur du diagnostic :

  • absence d'antécédent de rougeole ;
  • vaccination antirougeoleuse absente ou incomplète ;
  • contage environ 2 semaines avant l'éruption (période d'incubation + invasion).

Phase d'invasion (catarrhale ou prééruptive) :

  • fièvre élevée ;
  • catarrhe oculorespiratoire : larmoiement, conjonctivite, rhinorrhée, toux ;
  • parfois énanthème pathognomonique (en fin de période catarrhale) : signe de Köplik = taches punctiformes blanc bleuté sur une muqueuse jugale inflammatoire (fig. 38.2) ;
  • durée : 2 à 4 jours.

Phase éruptive :

  • début : environ 2 semaines après le contage ;
  • exanthème maculopapuleux (fig. 38.3) : 
    • maculopapules non prurigineuses respectant des intervalles de peau saine ;
    • début derrière les oreilles, puis extension en 24–48 heures vers la face et le reste du corps en direction descendante et en une seule poussée ;
    • régression en 5 à 6 jours ;
  • fièvre décroissant à la généralisation de l'éruption ;
  • persistance des signes de la phase d'invasion (conjonctivite, rhinorrhée, toux).
Rougeole : conjonctivite et signe de Köplik.
Fig. 38.2. Rougeole : conjonctivite et signe de Köplik.
 
Rougeole : exanthème.
Fig. 38.3. Rougeole : exanthème.

 

Complications possibles :

  • infectieuses (à évoquer en cas de réascension thermique) :
    • bronchite, pneumopathie (diffusion virale de la maladie respiratoire) ;
    • surinfections pulmonaires, OMA purulente ;
  • neurologiques :
    • encéphalite aiguë morbilleuse précoce post-éruptive (fréquence 1/1 000) ;
    • panencéphalite sclérosante subaiguë de Van Bogaert (PESS) de survenue retardée (5 à 10 ans) après la rougeole (fréquence 1/100 000, 1/6 000 si rougeole survenue avant l'âge de 1 an).
Enquête paraclinique

Le diagnostic de rougeole typique est avant tout clinique.
La rougeole est une maladie à déclaration obligatoire. Une confirmation biologique doit être réalisée de manière systématique (fig. 38.4) : diagnostic direct par PCR (salive, sang) ou, à défaut, indirect par sérologie (IgM).

évolution
Fig. 38.4. Rougeole : évolution clinique et biologique.

* Les anticorps IgM peuvent être détectés depuis l'apparition de l'éruption jusqu'à environ 60 jours après ; ils sont le plus souvent positifs entre + J3 et + J28 dans la salive et le sérum.
** L'ARN viral peut être détecté dans la salive, le nez, la gorge et l'urine d'environ –J5 à + J12. La période de détection optimale dans le sang, la salive, le nez ou la gorge s'étend de l'apparition de l'éruption à + J5. (Source : Circulaire DGS/RI1 n° 2009-334 du 4 novembre 2009.)

 

3. Prise en charge

Mesures thérapeutiques

L'hospitalisation n'est requise qu'en cas de signes de sévérité.

Prise en charge symptomatique comportant :

  • traitement de confort de l'état fébrile (paracétamol) ;
  • antibiothérapie probabiliste (amoxicilline-acide clavulanique) réservée aux cas de surinfection bactérienne (germes cibles : pneumocoque, staphylocoque doré).
Mesures préventives

Déclaration obligatoire de la maladie auprès de l'ARS :

  • signalement sans délai pour enquête autour du cas ;
  • notification à visée épidémiologique.

Démarche préventive après diagnostic d'un cas de rougeole :

  • recherche systématique d'autres cas (contaminateur, cas secondaires) ;
  • vérification du statut vaccinal des sujets contacts ;
  • mise en place d'éventuelles mesures thérapeutiques préventives.

L'éviction de collectivité est requise jusqu'à 5 jours après le début de l'éruption.
Tout contact entre un sujet non immunisé et un sujet infecté contagieux doit être évité.

Un sujet contact est une personne ayant été en contact proche (famille, crèche) pendant la période comprise entre 5 jours avant et 5 jours après le début de l'éruption (période de forte contagiosité). Les mesures thérapeutiques préventives chez les sujets contact non vaccinés et sans antécédent de rougeole sont rappelées dans le tableau 38.1.

Tableau 38.1. Mesures préventives pour les sujets contact d'un cas de rougeole (2017).
Nourrisson d'âge < 6 mois
  • Si mère immunisée (antécédent de rougeole ou vaccinée avec 2 doses) : aucune mesure (sérologie maternelle en urgence si besoin)
  • Si mère non immunisée : Ig polyvalentes IV (efficaces dans les 6 jours après le contage)
Nourrisson âgé de 6 à 11 mois
  • 1 dose de vaccin trivalent (ROR) dans les 72 h après le contage puis 2 doses de vaccin trivalent (ROR) selon le calendrier habituel
  • Si délai > 72 h après contact : Ig polyvalentes IV (efficaces dans les 6 jours)
Sujets d'âge > 1 an et nés depuis 1980
  • Non vacciné : 2 doses de ROR (à au moins 1 mois d'intervalle)
  • Vacciné avec une seule dose : rattrapage seconde dose
  • Déjà vacciné avec 2 doses : aucune mesure
Terrains particuliers
  • Immunodéprimé : Ig polyvalentes IV (dans tous les cas)
  • Femme enceinte non vaccinée et sans antécédent de rougeole : Ig polyvalentes IV
Rougeole : maladie encore d'actualité car couverture vaccinale insuffisante en France.
Stratégie vaccinale antirougeoleuse : 2 doses entre les âges de 12 et 24 mois.
Clinique : fièvre, catarrhe oculorespiratoire, exanthème maculopapuleux, ± signe de Köplik.
Confirmation paraclinique : indispensable.
Mesures préventives : recherche d'autres cas, vérification du statut vaccinal des sujets contacts.

 

B. Rubéole

1. Pour bien comprendre

Épidémiologie

Il s'agit d'une maladie virale du jeune enfant le plus souvent bénigne.
Elle peut être redoutable pour le fœtus si elle survient avant 18 SA au cours de la grossesse chez une femme non immunisée, en raison d'un risque d'embryofœtopathie sévère ou de rubéole congénitale (voir chapitre 44).

Rappels d'infectiologie

L'agent causal est un virus à ARN, le rubivirus.

Les nourrissons sont protégés jusqu'à l'âge de 6 mois par les anticorps maternels.
La maladie confère une immunité durable.

Vaccination antirubéoleuse recommandée pour tous les nourrissons (calendrier 2020) :

  • combinée avec les vaccins rougeole et oreillons (vaccination triple ROR) ;
  • 1re dose à l'âge de 12 mois ; 2e dose à l'âge de 16–18 mois.

La transmission est directe, par voie aérienne ou transplacentaire (rubéole congénitale).
L'incubation dure 15 à 21 jours.
La contagiosité est possible 1 semaine avant et jusqu'à 2 semaines après le début de l'éruption.

 

2. Diagnostic

Enquête clinique

Arguments anamnestiques en faveur du diagnostic :

  • absence d'antécédent de rubéole ;
  • vaccination antirubéoleuse absente ou incomplète ;
  • contage 15–20 jours avant l'éruption (rarement retrouvé car maladie peu symptomatique).

Phase d'invasion :

  • fièvre modérée ;
  • état général conservé ;
  • absence de catarrhe (en particulier la toux) ;
  • signes associés possibles : céphalées, courbatures, pharyngite ;
  • durée : 1 semaine.

Phase éruptive :

  • début : 15–20 jours après le contage ;
  • exanthème maculopapuleux :
    • macules et maculopapules souvent plus pâles et plus petites que celles de la rougeole ;
    • atteinte de la face puis extension au thorax ;
    • évolution : en une seule poussée sur 72 heures, puis disparition (caractère fugace) ;
  • fièvre modérée ;
  • signes associés possibles : splénomégalie, adénopathies occipitales.

Complications possibles :

  • hématologiques : purpura thrombopénique post-éruptif (fréquence 1/3 000) ;
  • articulaires : arthralgies, arthrites (surtout chez l'adulte) ;
  • neurologiques : encéphalite, méningo-encéphalite (rares).
Enquête paraclinique

Le diagnostic clinique de rubéole est difficile.
La confirmation par IgM spécifiques sériques en phase aiguë se justifie chez l'enfant dans les formes atypiques ou compliquées et, surtout, en cas de contact avec une femme enceinte non immune.

 

3. Prise en charge

Mesures thérapeutiques

La prise en charge est habituellement ambulatoire.

Le traitement est essentiellement symptomatique.

Mesures préventives

L'éviction de collectivité n'est pas obligatoire.
Tout contact entre un enfant infecté contagieux et une femme enceinte séronégative doit être formellement prohibé (risque de fœtopathie). En cas de contage, la conduite à tenir est détaillée dans le chapitre 44.

Une femme enceinte non vaccinée et séronégative devra être vaccinée en post-partum (le vaccin vivant atténué est contre-indiqué au cours de la grossesse).

La maladie est à déclaration obligatoire depuis 2018.

Rubéole : déclaration obligatoire depuis 2018.
Clinique : exanthème maculopapuleux précédé d'une phase d'invasion sans catarrhe.
Forme à risque : rubéole congénitale chez la femme enceinte non immunisée.
Prévention : vaccination en post-partum des femmes enceintes séronégatives.

 

C. Mégalérythème épidémique

1. Pour bien comprendre

Épidémiologie

Il survient par épidémies familiales ou scolaires.
L'âge de survenue est 5–14 ans (âge scolaire).

Rappels d'infectiologie

L'agent causal est le parvovirus B19.

La maladie confère une immunité durable.

La transmission est directe, par voie respiratoire.
L'incubation dure 6 à 14 jours.
La contagiosité est possible durant la phase d'invasion.

 

2. Diagnostic

Enquête clinique

Phase d'invasion :

  • fièvre modérée ;
  • état général conservé ;
  • signes associés : céphalées, myalgies ;
  • durée : 2 jours.

Phase éruptive :

  • début : 2 semaines après le contage ;
  • exanthème :
    • maculopapules puis macules légèrement œdémateuses (en guirlande) ;
    • début aux joues (rouges d'aspect souffleté, fig. 38.5) s'atténuant en quelques jours, puis : extension au tronc et aux extrémités (aspect réticulé en carte de géographie) avec fluctuations de 1–3 semaines ;
  • autres éruptions possibles : érythème polymorphe, syndrome éruptif en « gants et chaussettes » ;
  • fièvre modérée ; •
  • ignes associés : arthralgies, arthrites (rares).
mégalérythème
Fig. 38.5. Mégalérythème épidémique : aspect souffleté des joues.

 

Complications possibles, en cas de survenue sur un terrain particulier :

  • enfant atteint d'hémolyse chronique (drépanocytose, sphérocytose, thalassémie) : anémie aiguë érythroblastopénique (voir chapitre 23) ;
  • femme enceinte : anasarque fœtoplacentaire, avortement précoce (premier trimestre de grossesse).
Enquête paraclinique

Le diagnostic de mégalérythème épidémique typique est avant tout clinique.
La confirmation biologique (PCR sanguine, IgM spécifiques sériques) se justifie essentiellement en phase aiguë dans les cas de contact avec une femme enceinte ou chez un enfant atteint d'une anémie hémolytique chronique.

 

3. Prise en charge

Mesures thérapeutiques

La prise en charge est habituellement ambulatoire.

Le traitement est essentiellement symptomatique : traitement éventuel de la fièvre (paracétamol).

Chez un enfant atteint d'hémolyse chronique, une transfusion sanguine est nécessaire et urgente en cas d'anémie aiguë mal tolérée.

Mesures préventives

L'éviction de collectivité n'est pas obligatoire.

Tout contact entre un enfant infecté contagieux et un autre enfant atteint d'anémie hémolytique chronique ou une femme enceinte non immunisée doit être prohibé.

Il n'existe pas à ce jour de vaccin dirigé contre ce virus.

Clinique : exanthème maculopapuleux avec aspect souffleté du visage, extension au reste du corps.
Risque si terrain d'hémolyse chronique : anémie aiguë érythroblastopénique.

 

D. Exanthème subit

1. Pour bien comprendre

Épidémiologie

Cette pathologie est aussi dénommée sixième maladie, ou « roséole infantile ».

C'est une infection quasi ubiquitaire ; 60–90 % des adultes ont des anticorps contre ce virus.
L'âge moyen de survenue est entre 6–24 mois.

Rappels d'infectiologie

Le principal agent en cause est l'herpès virus de type 6 (HHV6), plus rarement de type 7.

Les nourrissons sont protégés jusqu'à l'âge de 6 mois par les anticorps maternels.
La maladie confère une immunité durable (pour chacun des virus).

La transmission est directe, par voie respiratoire.
Le contaminateur excrète le virus dans sa salive (récurrence périodique et asymptomatique, car il s'agit d'un virus de groupe des Herpesviridae).
L'incubation dure 5 à 15 jours.

 

2. Diagnostic

Enquête clinique

Phase d'invasion :

  • fièvre isolée d'apparition brutale, jusqu'à 39–40 °C, bien tolérée ;
  • chute brutale de la fièvre à la phase éruptive.

Phase éruptive :

  • début : 1 à 7 jours après le début de la fièvre (en moyenne 3 jours) ;
  • exanthème :
    • maculopapules pâles (assez semblables à celles de la rubéole) ;
    • sur visage et tronc (fig. 38.6) ;
    • disparition en 12–24 heures (caractère fugace) ;
  • apyrexie contemporaine très caractéristique ;
  • signes associés : adénopathies cervicales (rares).

 

exanthème
Fig. 38.6. Exanthème subit (roséole).

 

Complications possibles :

  • crises fébriles simples ;
  • méningite, méningo-encéphalite (rares).
Enquête paraclinique

Le diagnostic d'exanthème subit typique est avant tout clinique.
La réalisation d'une PCR HHV6 dans le sang se justifie essentiellement pour la confirmation des formes atypiques ou compliquées.

 

3. Prise en charge

Mesures thérapeutiques

La prise en charge est habituellement ambulatoire.

La prise en charge est symptomatique : traitement de confort de l'état fébrile (paracétamol).

Mesures préventives

L'éviction de collectivité n'est pas obligatoire.
La fréquentation d'une collectivité à la phase aiguë de la maladie n'est pas souhaitable.
Aucune mesure prophylactique vis-à-vis d'éventuels sujets contacts n'est à envisager.

Il n'existe pas à ce jour de vaccin dirigé contre ce virus.

Exanthème subit : maladie appelée couramment « roséole ».
Clinique : fièvre élevée bien tolérée, éruption contemporaine de la défervescence, ± crises fébriles.

 

E. Mononucléose infectieuse

1. Pour bien comprendre

Épidémiologie

La mononucléose infectieuse (MNI) est la primo-infection symptomatique par le virus d'Ep-stein-Barr (EBV).
Il s'agit d'une infection fréquente ; 80 % des adultes ont des anticorps IgG de type anti-VCA et anti-EBNA persistant toute la vie, traduisant une primo-infection ancienne le plus souvent asymptomatique.

L'éruption fébrile n'est qu'un signe clinique de la maladie.
L'âge classique de la description de la maladie est l'adolescence, mais elle peut être observée à tout âge, en particulier chez le nourrisson où elle se manifeste souvent par une fièvre prolongée, parfois isolée.

Rappels d'infectiologie

L'agent causal est l'EBV (virus d'Epstein-Barr).

La maladie confère une immunité durable. Les récurrences symptomatiques cliniques n'existent que chez l'immunodéprimé.

La transmission est interhumaine par voie salivaire (contacts rapprochés ou jouets sucés).
L'incubation est longue, durant entre 30 et 50 jours.
La contagiosité est faible et sa durée après contamination inconnue (plusieurs mois).

 

2. Diagnostic

Enquête clinique

Symptomatologie habituelle (hors éruption) :

  • fièvre d'intensité variable ;
  • asthénie profonde ;
  • angine (parfois sévère) :
    • érythématopultacée ou pseudo-membraneuse (avec respect de la luette) ;
    • accompagnée d'un purpura du voile du palais, d'un œdème de luette ;
  • signes associés :
    • voix nasonnée (obstruction du cavum, paralysie du voile du palais) ;
    • volumineuses adénopathies cervicales bilatérales, œdème des paupières ;
    • splénomégalie (50 %).

Sémiologie dermatologique variable :

  • exanthème polymorphe maculopapuleux ou papulovésiculeux souvent discret ;
  • éruption réputée favorisée par la prise d'ampicilline, moins fréquemment par la prise d'amoxicilline (souvent prescrite comme traitement de l'angine).

Autres manifestations possibles :

  • hépatiques : hépatite cytolytique (fréquente, le plus souvent uniquement biologique) ;
  • hématologiques (rares) : anémie hémolytique et thrombopénie auto-immunes ;
  • neurologiques (rares) : méningite lymphocytaire, méningo-encéphalite, polyradiculonévrite aiguë ;
  • ORL : obstruction aiguë des voies aériennes supérieures (liée à l'hypertrophie amygdalienne).
Enquête paraclinique

La confirmation diagnostique nécessite la réalisation d'examens complémentaires.

Examens biologiques de confirmation : sérologie EBV :

  • primo-infection : IgM anti-VCA (+) et IgG anti-EBNA (–) ;
  • infection ancienne : IgM anti-VCA (–) et IgG anti-EBNA (+).

Examens de routine pouvant avoir une valeur d'orientation :

  • NFS : syndrome mononucléosique (souvent mis en défaut chez le nourrisson) ;
  • bilan hépatique : élévation modérée des transaminases (quasi constante) ;
  • CRP augmentée.

 

3. Prise en charge

Mesures thérapeutiques

L'hospitalisation n'est requise qu'en cas de formes compliquées.

La prise en charge est essentiellement symptomatique :

  • repos au lit, reprise progressive des activités ;
  • traitement de confort de l'état fébrile (paracétamol), antalgiques ;
  • antibiothérapie en cas de surinfection ORL (cavum et sinus) : amoxicilline-acide clavulanique.
Mesures préventives

L'éviction de collectivité n'est pas obligatoire.
Aucune mesure prophylactique pour d'éventuels sujets contacts n'est à envisager.

Il n'existe pas à ce jour de vaccin dirigé contre ce virus.

MNI : cause de fièvre prolongée chez le nourrisson et le jeune enfant.
Y penser devant un tableau d'angine avec splénomégalie (autre diagnostic à redouter : leucémie).
Prévenir l'enfant et les parents du caractère durable de l'asthénie.

 

F. Scarlatine

1. Pour bien comprendre

Épidémiologie

Cette infection est régulièrement rencontrée en pédiatrie.

Rappel d'infectiologie

Il s'agit d'une éruption liée à une espèce particulière de Streptococcus pyogenes (streptocoque β-hémolytique du groupe A, SGA) qui sécrète une toxine érythrogène.

La scarlatine constitue la forme bénigne du syndrome toxinique ; les formes plus sévères et parfois réanimatoires constituent le Toxic Shock Syndrome (TSS).

Cette bactérie est par ailleurs responsable des angines bactériennes de l'enfant (voir chapitre 31), parfois d'atteinte cutanée et, plus rarement, d'atteinte respiratoire ou ostéoarticulaire.

La maladie confère une immunité durable (pour un même type toxinique).

La transmission est directe en cas d'angine, par voie aérienne.
L'incubation dure 3–5 jours.
La contagiosité de l'angine est possible durant la période d'invasion et dans les 48 heures suivant le début de l'antibiothérapie.

 

2. Diagnostic

Enquête clinique

Anamnèse : contage de scarlatine ou d'angine à SGA.

Phase d'invasion :

  • fièvre élevée à 39–40 °C avec frissons ;
  • angine érythémateuse avec :
    • dysphagie et tuméfaction amygdalienne importantes ;
    • douleurs abdominales et vomissements ;
  • signes associés : adénopathies sous-angulo-maxillaires ;
  • durée : 24 heures.

Phase éruptive :

  • début : 24 heures après la phase d'invasion ;
  • énanthème (fig. 38.7) :
    • amygdales tuméfiées et inflammatoires pendant 4–6 jours ;
    • glossite : langue d'abord saburrale (enduit épais blanc), puis dépapillation (perte de l'enduit blanchâtre qui la recouvre) survenant de la périphérie vers le centre de la langue, réalisant un aspect dit de « V lingual » puis laissant un aspect rugueux dit « framboisé » à J6 (glossite exfoliatrice), puis régression en 1 semaine ;
  • exanthème (fig. 38.8) : 
    • vastes nappes rouge vif uniformes congestives sans intervalles de peau saine, sensation de granité à la palpation ;
    • prédominance aux plis de flexion, puis extension en 24 heures à la partie inférieure de l'abdomen et aux extrémités (respect des paumes et plantes), au visage (respect de la région péribuccale) ;
    • régression dès J6, desquamation post-éruptive « en doigt de gant » des extrémités.

Complications possibles : rares et identiques à celles de l'angine.

Enquête paraclinique

Le diagnostic de scarlatine typique est avant tout clinique.

Le test de diagnostic rapide (TDR) du streptocoque A, réalisé systématiquement avant antibiothérapie, permet de confirmer immédiatement l'origine streptococcique de l'éruption fébrile.

Scarlatine : langue framboisée.
Fig. 38.7. Scarlatine : langue framboisée.
 
 Scarlatine : exanthème.
Fig. 38.8. Scarlatine : exanthème.

Le dosage des anticorps streptococciques (ASLO, ASD) est inutile en phase aiguë pour le diagnostic. Ils sont fréquemment élevés de base chez les enfants sains et ont peu de signification diagnostique. Leur élévation (ASLO) après infection est tardive (10–15 jours) et inconstante.

 

3. Prise en charge

Mesures thérapeutiques

La prise en charge thérapeutique est identique à celle de l'angine bactérienne.
L'antibiothérapie recommandée en première intention est l'amoxicilline 50 mg/kg par jour en deux prises pendant 6 jours per os.

La prise en charge est ambulatoire. Aucun suivi particulier n'est nécessaire, en particulier aucune recherche d'une hématurie/protéinurie à distance.
L'hospitalisation n'est requise qu'en cas de forme compliquée, en particulier en cas de syndrome toxinique streptococcique sévère (idem si staphylococcique) : prise en charge en USC ou réanimation pour apport hémodynamique.

Mesures préventives

L'éviction de collectivité est requise jusqu'à 48 heures après le début du traitement antibiotique par amoxicilline.

La recherche du SGA dans l'entourage immédiat par prélèvement pharyngé est inutile. Son éradication est en effet difficile (réplication lente intracellulaire).
Seul le traitement antibiotique précoce de l'enfant malade permet la réduction du portage et donc celle du risque de transmission à l'entourage.
Une antibioprophylaxie orale de l'entourage ne se discute que chez les sujets ayant des facteurs de risque d'infection invasive : âge > 65 ans, varicelle évolutive, lésions cutanées étendues (dont les brûlures), toxicomanie IV, pathologie évolutive (diabète, cancer, hémopathie, VIH, insuffisance cardiaque), traitements prolongés et à doses élevées par corticoïdes.

Il n'existe pas à ce jour de vaccin dirigé contre cette bactérie.

Scarlatine : angine avec vomissements, glossite et exanthème avec granité.
Confirmation immédiate du diagnostic : TDR SGA.
Antibiothérapie : amoxicilline 50 mg/kg par jour pendant 6 jours.
Éviction de collectivité pendant 48 heures après le début du traitement antibiotique.

 

G. Maladie de Kawasaki

1. Pour bien comprendre

Épidémiologie

La maladie de Kawasaki, ou syndrome adéno-cutanéo-muqueux fébrile, se présente comme une vascularite aiguë multisystémique.
Elle a été décrite dans le monde entier, mais demeure la plus fréquente dans les populations asiatiques et en particulier au Japon.
La majorité des enfants atteints est âgée de moins de 5 ans, avec un pic d'incidence vers 1 an.


Physiopathologie

Aucune explication physiopathologique unique n'est retenue. On évoque à la fois un terrain génétique prédisposant, l'interaction de l'environnement, probablement de nature infectieuse, et un mécanisme immunitaire impliquant l'activation du système immunitaire et de l'endothélium vasculaire.

 

2. Diagnostic

Enquête clinique

Il existe plusieurs formes cliniques de maladie de Kawasaki :

  • la forme typique (fig. 38.9) ; 
  • les formes atypiques et incomplètes.
Maladie de Kawasaki.
Fig. 38.9. Maladie de Kawasaki.

A. Chéilite. B. Érythème palmaire et desquamation des extrémités. C. Desquamation du siège.

Diagnostic de forme typique :

  • fièvre de durée ≥ 5 jours (critère constant indispensable) ;
  • et ≥ 4 critères parmi les 5 critères majeurs (tableau 38.2).

Autres signes évocateurs :

  • hyperirritabilité, enfant difficilement examinable (signe quasi constant) ;
  • réactivation (induration) de la cicatrice de vaccination par le BCG chez le nourrisson.
Tableau 38.2. Critères majeurs de maladie de Kawasaki dans sa forme typique.
Critère majeur constant indispensable au diagnostic
Fièvre
  • Généralement élevée
  • Non réduite par les antipyrétiques ni les antibiotiques
  • Durée ≥ 5 jours
Quatre parmi les cinq autres critères majeurs fréquemment retrouvés
Conjonctivite
  • Bilatérale, non exsudative, indolore
Atteinte buccopharyngée
  • Chéilite, stomatite, pharyngite
Éruption cutanée d'aspect variable
  • Maculopapuleuse diffuse au niveau du tronc et des membres
  • Évocatrice au niveau du siège avec desquamation précoce dès J5
Atteinte des extrémités
  • Érythème des paumes et plantes
  • Œdème ferme et douloureux du dos des mains et des pieds
  • Desquamation tardive après le 10e jour d'abord péri-unguéale
Adénopathies cervicales
  • Diamètre ≥ 1,5 cm

 

Atteintes d'organes possibles (atteinte inflammatoire multisystémique) :

  • articulaires : arthralgies ou arthrites de topographie diverse ;
  • oculaires : uvéite, rétinite ;
  • digestives : vomissements, douleurs abdominales ;
  • hépatobiliaires : hépatite cytolytique, hydrocholécyste (caractéristique), ictère ;
  • pulmonaires (rares) : nodules et infiltrats, atteintes pleurales ;
  • neurologiques : agitation, troubles du comportement, méningite lymphocytaire, encéphalite avec convulsions, troubles de la conscience voire coma.

Formes incomplètes de la maladie de Kawasaki :

  • fièvre isolée et élevée ;
  • nombre limité de critères majeurs de la maladie ;
  • existence éventuelle d'une complication cardiaque redressant le diagnostic.
Enquête paraclinique

Le diagnostic de maladie de Kawasaki est avant tout clinique.

Il n'existe aucun marqueur biologique inflammatoire spécifique du diagnostic.
L'augmentation de la VS et de la CRP est quasi constante. Une hyperleucocytose initiale, une anémie inflammatoire et une hyperplaquettose (tardive) sont fréquemment associées.
Une leucocyturie amicrobienne est également quasi constante et évocatrice.

Diagnostic des complications

Les complications sont avant tout cardiovasculaires :

  • initialement : myocardite, péricardite ;
  • secondairement : dilatations des artère coronaires, voire anévrismes.

Elles font la gravité de la maladie de Kawasaki.
Leur diagnostic doit être précisé le plus précocement possible par une échographie cardiaque transthoracique systématique.
Une dilatation sans perte de parallélisme des bords de la coronaire, une irrégularité de la lumière vasculaire, une hyperéchogénicité des parois du vaisseau peuvent témoigner d'une atteinte coronarienne débutante.

 

3. Prise en charge

Mesures thérapeutiques

L'hospitalisation est systématique en phase aiguë.
Elle permet une prise en charge thérapeutique optimale ainsi que la surveillance, le dépistage et un traitement des formes graves avec myocardite précoce.

Le seul traitement consiste en l'administration d'immunoglobulines polyvalentes IV, avec pour objectif de stopper le processus inflammatoire et prévenir les atteintes cardiaques.
L'aspirine (acide acétylsalicylique) est habituellement prescrite en phase aiguë à dose anti-inflammatoire. Elle est poursuivie à faible dose (anti-aggrégante plaquettaire), en particulier pendant la phase secondaire d'hyperplaquettose, pour une durée minimale de 6 à 8 semaines, et en cas de lésions coronariennes.

La surveillance est avant tout échocardiographique.
Une échographie cardiaque est réalisée au moment du diagnostic puis dans le cadre du suivi. En cas de complications cardiovasculaires, un suivi spécialisé doit être réalisé avec des examens d'imagerie adaptés : scintigraphie myocardique, angiographie coronarienne (en cas d'ischémie).

Mesures préventives

Aucune mesure prophylactique pour d'éventuels sujets contacts n'est à envisager.

La prévention des complications repose sur la reconnaissance précoce des critères majeurs diagnostiques de la maladie, notamment en cas de fièvre élevée prolongée > 5 jours.

Maladie de Kawasaki : toujours l'évoquer en cas de fièvre ≥ 5 jours.
Gravité : anévrismes coronariens → échographie cardiaque.
Mesures thérapeutiques : immunoglobulines polyvalentes IV, aspirine.

 

H. Varicelle

1. Pour bien comprendre

Épidémiologie

La varicelle est la primo-infection par le virus de la varicelle et du zona (VZV).
Il s'agit d'une maladie fréquente, avec 600 000 à 700 000 cas par an en France, dont 90 % des cas surviennent avant l'âge de 10 ans (âge moyen : 4 ans).
Elle est susceptible d'être plus sévère avant l'âge de 1 an et à l'âge adulte, ainsi que chez les femmes enceintes et les immunodéprimés. La varicelle néonatale est traitée dans le chapitre 44.

Rappels d'infectiologie

L'agent causal est le VZV.

Les nouveau-nés sont protégés jusqu'à l'âge de 3–6 mois par les anticorps maternels.
La maladie confère une immunité durable (une seconde varicelle est exceptionnelle). Un zona est l'expression clinique d'une réactivation possible du VZV.

La transmission est directe par les lésions cutanéomuqueuses, mais aussi possible par voie respiratoire pendant les 24–48 heures précédant le début de l'éruption.
L'incubation dure 14 jours en moyenne.
La contagiosité débute 1 à 2 jours avant l'apparition des vésicules et se poursuit au minimum pendant 7 jours, jusqu'à la transformation croûteuse de toutes les vésicules.

 

2. Diagnostic

Enquête clinique

Arguments anamnestiques en faveur du diagnostic :

  • absence d'antécédent de varicelle (ou de vaccination antivaricelleuse) ;
  • contage 2 semaines avant l'éruption.

Phase d'invasion :

  • fébricule modérée ;
  • rash scarlatiniforme fugace prééruptif (rare) ;
  • durée : 2 jours.

Phase éruptive :

  • début : environ 2 semaines après le contage ;
  • exanthème (fig. 38.10) : 
    • description : lésion élémentaire vésiculeuse (éléments de consistance molle, bordés d'une auréole rouge : gouttes de rosée sur une peau saine) puis devenant croûteuse et prurigineuse de J4 à J10 ;
    • siège : diffus, y compris dans le cuir chevelu ;
    • évolution : deux à trois poussées successives (d'où la coexistence d'éléments d'âges différents), puis chute des croûtes à J10 ;
  • fièvre en général modérée ;
  • signes associés : énanthème buccal érosif (inconstant), micropolyadénopathies.

Des complications surviennent dans 3 à 5 % des cas.
Les surinfections bactériennes sont les plus fréquentes. Les principaux agents infectieux sont : Staphylococcus aureus et Streptococcus pyogenes (streptocoque du groupe A, SGA).

varicelle
Fig. 38.10. Varicelle non compliquée.

 

Surinfections bactériennes :

  • cutanées :
    • impétigo, dermohypodermites, fasciite nécrosante (fig. 38.11) ;
    • abcès, lésions nécrotiques, syndrome de la peau ébouillantée (toxine exfoliante) ;
  • surinfections d'autres organes :
    • infections pleuropulmonaires ;
    • suppurations ostéoarticulaires ;
    • syndromes toxiniques (TSS) streptococciques et staphylococciques.

Autres complications :

  • neurologiques :
    • crises fébriles ;
    • cérébellite (la plus fréquente), encéphalite, névrite, thrombose vasculaire cérébrale ;
  • syndrome de Reye (en cas de prise d'aspirine) ;
  • respiratoires : poumon varicelleux ;
  • hématologiques : purpura thrombopénique post-éruptif ;
  • hépatiques : hépatite aiguë.
Varicelle compliquée de fasciite nécrosante.
Fig. 38.11. Varicelle compliquée de fasciite nécrosante.
 

Personnes à risque de faire une varicelle plus sévère ou grave :

  •  sujets atteints de déficit immunitaire congénital ou d'immunodépression acquise ;
  • adolescents de plus de 12 ans et adultes non immuns ;
  • femmes enceintes ;
  • certains nouveau-nés à risque :
    • nouveau-nés prématurés < 28 SA ou de poids de naissance < 1 000 g quel que soit le statut immunitaire maternel ;
    • nouveau-nés dont la mère développe une varicelle dans les 3 dernières semaines de grossesse (risque de transmission transplacentaire et de survenue d'une varicelle néonatale dans les 10 premiers jours de vie) ; le risque de forme sévère est majeur pour le nouveau-né si la varicelle maternelle se déclare dans une période comprise entre 5 jours avant et 2 jours après l'accouchement (mortalité de 18 à 31 % en cas de varicelle congénitale en l'absence de traitement antiviral) ; ce risque diminue si la varicelle maternelle se déclare plus tôt, soit plus de 5 jours avant l'accouchement (mortalité 0 %) du fait du passage précoce des anticorps maternels ;
    • nouveau-nés exposés en postnatal mais dont la mère est non immune vis-à-vis de la varicelle ;
  • jeune nourrisson sain entre 1 et 3 mois né de mère non immune ;
  • tout nourrisson entre 3 mois et 1 an (perte des anticorps maternels), d'autant plus que la contamination est intrafamiliale.
Enquête paraclinique

Le diagnostic de varicelle typique est avant tout clinique.

La réalisation d'examens complémentaires de confirmation ne se justifie que dans les formes sévères (terrains à risque) ou compliquées :

  • PCR spécifique VZV ;
  • IgM spécifiques sériques en phase aiguë.

 

3. Prise en charge

Mesures thérapeutiques

Une varicelle usuelle bénéficie d'une prise en charge ambulatoire et symptomatique :

  • traitement des lésions cutanées prurigineuses :
    • ongles coupés courts, solution antiseptique ;
    • antihistaminiques (si prurit important) ;
  • traitement de l'état fébrile :
    • paracétamol per os ;
    • contre-indication des AINS (aspirine et ibuprofène) ;
  • antibiothérapie probabiliste en cas de surinfection bactérienne patente ou suspecte :
    • active contre les staphylocoques dorés communautaires (sensibles à la méticilline dans plus de 95 % des cas) et les SGA ;
    • exemple : association amoxicilline + acide clavulanique.

Les formes sévères ou compliquées nécessitent une prise en charge hospitalière et spécifique :

  • traitement antiviral par aciclovir IV (pas d'indication de la forme orale au cours de la varicelle simple de l'enfant) ;
  • en cas de surinfection bactérienne sévère toxinique : antibiothérapie par amoxicilline-acide clavulanique IV, avec ajout systématique de clindamycine IV (action antitoxinique) pendant les premiers jours de traitement.

Indications de l'aciclovir IV en curatif au cours de la varicelle de l'enfant :

  • sujets immunodéprimés ;
  • formes graves, formes sévères ou compliquées (en particulier pneumopathie varicelleuse) ;
  • varicelle néonatale sévère ;
  • et nouveau-né dès que possible (avant toute éruption) en cas de varicelle maternelle entre J – 5 et J + 2 de l'accouchement.
Mesures préventives

La fréquentation de la collectivité n'est pas recommandée, mais il n'y a pas d'éviction de collectivité à caractère obligatoire. Les sujets contacts à risque (femmes enceintes non immunes, immunodéprimés, nouveau-nés prématurés, nouveau-nés de mère non immunisée contre VZV) doivent bénéficier d'un avis médical et de mesures de prévention adaptées.

En hospitalisation, l'enfant atteint doit être isolé (mesures de protection : gants, masque).
Tout contact entre un sujet non immunisé à risque et un sujet infecté contagieux doit être évité.

Le vaccin varicelle-zona est un vaccin vivant atténué, autorisé à partir de l'âge de 1 an et contre-indiqué chez la femme enceinte et l'immunodéprimé. Il ne figure pas actuellement en France au calendrier vaccinal. Le schéma vaccinal comporte deux doses, espacées de 1 à 2 mois selon le vaccin utilisé (voir chapitre 41).

En cas de contage varicelleux :

  • une vaccination post-exposition est indiquée (en l'absence de grossesse évolutive) chez l'adolescent à partir de 12 ans, immunocompétent et sans antécédent ou avec une histoire douteuse de varicelle (contrôle de la négativité de la sérologie facultatif) : la première dose de vaccin doit être administrée dans les 3 à 5 jours suivant le contact, avec une 2e dose 4 à 8 semaines ou 6 à 10 semaines plus tard selon le vaccin choisi (calendrier vaccinal 2020) ;
  • l'administration d'immunoglobulines anti-VZV (Varitect®) :
    • indications selon l'ANSM sous autorisation temporaire d'utilisation (ATU) chez :
      • les femmes enceintes séronégatives ou de statut sérologique inconnu ;
      • les sujets immunodéprimés ;
      • les nouveau-nés dont la mère présente une varicelle dans les 5 jours (délai accepté jusqu'à 7 jours) qui ont précédé leur naissance ou dans les 2 jours qui l'ont suivie ;
      • les prématurés et nouveau-nés de moins de 1 mois dont la mère est séronégative ou de statut sérologique inconnu ;
    • elles doivent être administrées par voie intraveineuse, de préférence dans les 96 heures (4 jours) et dans un délai maximal de 10 jours après l'exposition ; elles sont susceptibles de permettre une protection transitoire et partielle ;
    • en l'absence de Varitect®, des immunoglobulines polyvalentes peuvent être administrées en IV.
  •  
Varicelle typique : éruption vésiculeuse prurigineuse avec éléments d'âges différents.
Complications à retenir : surinfections cutanées, cérébellite.
Contre-indication formelle des AINS dont l'aspirine.
Connaître le statut sérologique des sujets contacts à risque (femmes enceintes, immunodéprimés…).

 

I. Gingivostomatite herpétique

1. Pour bien comprendre

Épidémiologie

La primo-infection à HSV-1 survient le plus souvent entre les âges de 1 et 4 ans.
Environ 80 % des enfants d'âge ≥ 5 ans ont des anticorps anti-HSV-1, ce qui n'évite pas les réactivations.

Parmi les herpès cutanéomuqueux, seule la gingivostomatite aiguë est détaillée ici.
L'herpès néonatal est étudié dans le chapitre 44.
La récurrence herpétique et l'herpès génital sont traités dans d'autres ouvrages de spécialité.

Rappels d'infectiologie

L'agent causal est un virus à ADN de la famille Herpesviridae : HSV-1 ou HSV-2. L'HSV-1 est le type d'HSV le plus fréquemment responsable d'herpès oral chez l'enfant.

La primo-infection correspond au premier contact infectant muqueux ou cutané, symptomatique ou non.

La maladie confère une immunité mais qui est partielle, n'empêchant pas les réactivations. Les réactivations correspondent à des périodes de réplication virale, séparées par des périodes de latence, survenant soit sous la forme de récurrences cliniques, soit par excrétion virale asymptomatique.

La transmission se fait par contact direct avec un sujet excrétant du virus, par voie cutanée ou génitale (lésions) mais aussi par excrétion virale asymptomatique (salive).
L'incubation après contact infectant dure 5 à 7 jours.
La contagiosité est possible dans les différentes formes d'excrétion virale. Elle est maximale dans les premières heures de constitution des vésicules et décroît ensuite. Au décours d'une primo-infection orale, la durée de contagiosité par excrétion virale varie de 8 à 20 jours.

 

2. Diagnostic

Enquête clinique

La primo-infection herpétique est le plus souvent asymptomatique. Lorsqu'elle est symptomatique, elle peut revêtir un tableau de gingivostomatite aiguë.

Tableau clinique (fig. 38.12) :

  • prodromes : fièvre élevée et dysphagie (avec risque de déshydratation) ;
  • éruption ulcéreuse et douloureuse buccogingivale diffuse :
    • vésicules rapidement rompues et laissant place à des ulcérations muqueuses ou des croûtes cutanées ;
    • atteintes de la langue, du palais, des gencives, de la muqueuse buccale et des lèvres ;
    • évolution des ulcérations vers une confluence en plaques recouvertes d'une membrane grisâtre, avant disparition ;
  • signes associés : adénopathies sous-maxillaires, hypersialorrhée, haleine fétide.
 
Gingivostomatite herpétique.
Fig. 38.12. Gingivostomatite herpétique.

 

Complications rares, liées :

  • au terrain : immunodéprimé, dermatite atopique (syndrome de Kaposi-Juliusberg) ;
  • à l'association à d'atteintes viscérales : méningite, encéphalite, hépatite.
Enquête paraclinique

Le diagnostic de gingivostomatite aiguë est avant tout clinique.

La réalisation d'examens complémentaires de confirmation se justifie essentiellement dans les formes sévères (terrains à risque) ou compliquées :

  • identification par PCR sur un prélèvement de lésion ;
  • sérologie inutile au diagnostic lorsque les lésions cliniques sont évocatrices.

 

3. Prise en charge

Mesures thérapeutiques

Le traitement est majoritairement ambulatoire et symptomatique.
Les parents doivent veiller à ce que l'enfant s'hydrate et s'alimente suffisamment.
La prise en charge de la douleur doit être optimisée : paracétamol associé à ibuprofène en cure courte de 48–72 heures en cas de douleur modérée, tramadol (si âge > 3 ans) ou morphine orale en cas de douleur sévère. L'adjonction d'un traitement local (bains de bouche antiseptiques) est difficile à administrer et n'a pas d'intérêt démontré. La surinfection cutanée locale est rare.

L'hospitalisation n'est requise qu'en cas de formes sévères ou compliquées.
Une nutrition entérale ou une hydratation IV peut être nécessaire lorsque l'alimentation est impossible. La prise en charge de la douleur peut aussi nécessiter un recours hospitalier.

Malgré l'absence de consensus et d'AMM, un traitement antiviral par aciclovir oral est recommandé au cours des primo-infections herpétiques non compliquées de l'enfant à la condition qu'il soit débuté dans les 3 premiers jours d'évolution des symptômes (GPIP).
Son efficacité a en effet été démontrée chez l'enfant : réduction de la durée d'évolution des lésions (4 jours versus 10 jours) ainsi que de la durée de la fièvre ; mais uniquement lorsque le traitement est instauré au tout début de la maladie, ce qui est en pratique parfois difficile, le diagnostic étant souvent trop tardif.

Il est prescrit pour une durée de 7 jours. La voie IV est nécessaire dans les formes sévères lorsque la gêne fonctionnelle rend la voie orale impossible.

Mesures préventives

L'éviction de collectivité n'est pas obligatoire. La fréquentation d'une collectivité à la phase aiguë de la maladie n'est cependant pas souhaitable.
Une information sur le caractère transmissible de cette infection doit être donnée aux parents, notamment en cas de contact avec un enfant ayant une dermatite atopique en poussée.

Il n'existe pas à ce jour de vaccin dirigé contre ce virus.

Tableau classique : éruption vésiculeuse buccogingivale avec difficultés alimentaires.
Surveillance : capacités nutritionnelles, en lien avec l'intensité de la douleur.
Éviter tout contact avec un enfant atopique : risque de Kaposi-Juliusberg.

 

Références

Launay E., Gras Le Guen C., Pinquier D., Dommergues M.-A., Cohen R, Grimprel E. GPIP. Antiviraux chez l'enfant en pratique de ville : infections herpétiques, varicelle, grippe. Perfectionnement en Pédiatrie, 2020;3(2):147–56.