Protéinurie, syndrome néphrotique, hématurie

Texte

 

ITEM 259 Protéinurie et syndrome néphrotique de l'adulte et de l'enfant

  • Devant la découverte d'une protéinurie, argumenter les principales hypothèses diagnostiques et justifier les examens complémentaires pertinents.
  • Devant un syndrome néphrotique chez l'enfant, argumenter les hypothèses diagnostiques et justifier les examens complémentaires pertinents ; argumenter les principes du traitement symptomatique et de la surveillance du syndrome néphrotique et de ses complications.

 

ITEM 260 Hématurie

  • Argumenter les principales hypothèses diagnostiques et justifier les examens complémentaires pertinents.

 

Avant de commencer…

Une protéinurie est découverte le plus souvent dans un contexte clinique comportant œdèmes et prise de poids, parfois lors d'un dépistage systématique.
Toute protéinurie permanente doit être confirmée par un dosage de la protéinurie des 24 heures ou le rapport protéines sur créatinine urinaires sur une miction, et explorée par un bilan paraclinique.
La cause la plus fréquente de protéinurie pathologique est le syndrome néphrotique idiopathique.
Certaines protéinuries sont dites physiologiques : protéinurie orthostatique, protéinurie associée à la fièvre ou à l'effort.

Une hématurie est un motif de consultation fréquent en pédiatrie et peut être une porte d'entrée dans de multiples pathologies.
Une fois l'hématurie confirmée, trois grands cadres sont à distinguer : les hématuries d'origine urologique, les hématuries d'origine rénale et les exceptionnelles hématuries d'origine systémique (troubles de la coagulation).
Le raisonnement diagnostique et étiologique repose sur un interrogatoire minutieux, un examen clinique approfondi et, souvent, des examens biologiques simples ainsi qu'une échographie rénale et des voies urinaires (vessie pleine).

 

Protéinurie

I. Pour bien comprendre

A. Définitions

Il existe une élimination urinaire physiologique de protéines.
Le terme de protéinurie désigne une élimination excessive des protéines dans les urines excédant 150 mg/24 heures ou > 30 mg/mmol de créatinine urinaire. La limite supérieure de la protéinurie est influencée par la position, l'activité physique, la température corporelle, mais dépend peu de l'âge ou du gabarit de l'enfant.
La mise en évidence d'une protéinurie peut être faite en présence de signes cliniques évocateurs ou de manière fortuite. Le dépistage n'est pas obligatoire, mais recommandé par la médecine scolaire lors de l'entrée au CP (à l'âge de 6 ans) et en classe de 6e (11 ans).

La protéinurie est détectée par une bandelette urinaire (BU) réactive. Le résultat est exprimé de manière semi-quantitative, avec : « – » (pas de protéinurie), « traces » (< 0,3 g/l), « + » (0,3 g/l), « ++ » (1 g/l), « +++ » (3 g/l), « ++++ » (> 20 g/l).
La BU repère avant tout l'albumine ; elle est moins sensible pour les autres protéines (protéines de faible masse moléculaire, immunoglobulines). La BU peut être faussement positive lorsque les urines sont concentrées ou contiennent de la chlorhexidine, en cas d'hématurie macroscopique ou si le pH urinaire est > 8. Elle peut être faussement négative lorsque les urines sont diluées ou en présence de protéines de faible masse moléculaire.

Toute protéinurie doit être confirmée par le rapport protéines sur créatinine urinaires sur une miction (N < 30 mg/mmol) ou la protéinurie des 24 heures.
Toute protéinurie permanente doit être explorée.

Protéinurie : dépistage par BU, confirmation par le rapport protéines/créatinine urinaires sur une miction (ou la protéinurie des 24 heures).

 

B. Classification des protéinuries

Elle est présentée dans le tableau 47.1.

Tableau 47.1. Classification des protéinuries.
Protéinuries physiologiques
(ou intermittentes)
Protéinuries pathologiques
(ou permanentes)
  • Protéinurie orthostatique
  • Protéinurie associée à la fièvre
  • Protéinurie d'effort
  • Avant tout : glomérulopathies
  • Parfois : tubulopathies
  • Rarement : malformations rénales et urinaires

 

II. Orientation diagnostique

A. Protéinuries physiologiques

La découverte de la protéinurie est presque toujours fortuite.
La protéinurie n'excède habituellement pas « ++ » à la BU ou 1 g/24 heures. Elle n'entraîne jamais d'œdèmes ni d'HTA, ni d'hypoalbuminémie, ni d'insuffisance rénale.
Le mécanisme impliqué reflète vraisemblablement une tolérance individuelle aux variations de l'hémodynamique intrarénale.

Protéinuries associées à la fièvre ou à l'effort :

  • disparition après régression de la fièvre ou 48 heures après l'effort ;
  • pas de bilan nécessaire si normalisation après un délai de 1 à 2 semaines.

Protéinurie orthostatique :

  • absente sur la première miction du matin au lever et présente sur une miction en fin de journée ;
  • surtout chez les adolescents longilignes ;
  • pas de bilan nécessaire si diagnostic confirmé.

 

B. Protéinuries pathologiques

Le groupe des glomérulopathies en est la principale étiologie.
La protéinurie d'origine tubulaire doit être recherchée en deuxième intention.

 

1. Protéinuries d'origine glomérulaire

  • Caractéristiques : albumine ; abondante, > 1 g/l voire de débit néphrotique (> 50 mg/kg par jour ou > 200 mg/mmol de créatininurie).
  • Signes : ± hypoalbuminémie, œdèmes, hématurie glomérulaire, HTA.
  • Causes :
    • syndrome néphrotique idiopathique (SNI) : voir infra ;
    • glomérulonéphrite aiguë post-infectieuse (GNA) : syndrome néphritique avec surcharge hydrosodée, œdèmes, HTA, protéinurie et hématurie glomérulaires, ± insuffisance rénale organique, C3 initialement bas ; diagnostic confirmé par sa normalisation dans les 2 mois, avec amélioration clinicobiologique ;
    • néphropathie à IgA (purpura rhumatoïde, Berger), syndrome d'Alport, lupus, vascularite à ANCA, glomérulonéphrite membranoproliférative (GNMP), glomérulonéphrite extramembraneuse (GEM), diabète.

 

2. Protéinuries d'origine tubulaire

  • Caractéristiques : protéines de masse moléculaire inférieure à celle de l'albumine (β2-microglobuline, Retinol Binding Protein) ; peu abondante, < 1 g/l.
  • Signes : pas d'œdème ; ± autres signes d'atteinte tubulaire : polyurie, fuite urinaire de sodium, potassium, calcium, phosphate, glycosurie normoglycémique, acidose métabolique à trou anionique plasmatique normal, amino-acidurie.
  • Causes : tubulopathies congénitales ou acquises (nécrose tubulaire aiguë, néphrite interstitielle infectieuse ou médicamenteuse : AINS…), généralement identifiées ; protéinurie rarement révélatrice.

 

3. Protéinuries associées à des malformations de l'appareil urinaire

  • Caractéristiques : protéinurie tubulaire ou de réduction néphronique (lésions secondaires de hyalinose segmentaire et focale).
  • Causes : hypodysplasies rénales, uropathies, maladies kystiques…
  • Diagnostic : apport de l'échographie rénale et des voies urinaires.
Protéinuries physiologiques : circonstances connues, protéinurie isolée, pas d'œdème.
Protéinuries pathologiques : glomérulopathies, tubulopathies, malformations urinaires.

 

C. Bilan étiologique de première intention

1. Données cliniques

  • Anamnèse : antécédents personnels et familiaux, infection récente, prise médicamenteuse.
  • Examen clinique : œdèmes, PA, recherche d'une infection, signes généraux.

 

2. Enquête paraclinique

En cas de fièvre ou effort prolongé : contrôler à distance (1 à 2 semaines).

En l'absence de contexte et de signes cliniques, rechercher une protéinurie orthostatique : sur la première miction du matin au lever (en ayant vidé la vessie au coucher) et sur une miction en fin de journée.

Selon signes et/ou en cas de protéinurie permanente :

  • ionogramme sanguin avec créatininémie, albuminémie et/ou protidémie ;
  • albuminurie, β2-microglobuline urinaire (ou autre protéine de bas poids moléculaire) ;
  • dosage du complément (fraction C3) ;
  • échographie rénale en deuxième intention, si une glomérulopathie est éliminée ou avant biopsie.

Indications de la ponction-biopsie rénale (PBR) en l'absence de contre-indication (rein unique, trouble de l'hémostase, HTA mal équilibrée) et hors contexte de malformation urologique ou maladies kystiques :

  • protéinurie glomérulaire permanente non orthostatique (sauf syndrome néphrotique pur chez un enfant âgé de 1 à 11 ans ou GNA typique avec baisse transitoire du C3) ;
  • protéinurie tubulaire, si associée à :
    • insuffisance rénale organique ;
    • et/ou signes systémiques, atteintes extrarénales.

Avis néphrologique dans les cas où une PBR est indiquée ou au moindre doute au cours de la démarche diagnostique.

 

D. Synthèse

La figure 47.1 propose un arbre décisionnel.

Image
Fig. 47.1. Enquête étiologique devant une protéinurie chez l'enfant.

ANCA : anticorps anti-cytoplasme des polynucléaires neutrophiles ; GEM : glomérulonéphrite extramembraneuse ; GNA : glomérulonéphrite aiguë ; GNMP : glomérulonéphrite membranoproliférative ; SNI : syndrome néphrotique idiopathique.

 

Syndrome néphrotique idiopathique

I. Pour bien comprendre

A. Définitions

Le syndrome néphrotique est défini par :

  • un rapport protéinurie/créatininurie > 200 mg/mmol (ou une protéinurie > 50 mg/kg par 24 heures) ;
  • et une hypoalbuminémie < 30 g/l et/ou une hypoprotidémie < 60 g/l.

 

B. Généralités sur le SNI

1. Épidémiologie

Le syndrome néphrotique idiopathique (SNI) est la principale cause de syndrome néphrotique chez l'enfant (90 % des SN avant l'âge de 8 ans).

 

2. Physiopathologie

Il s'agit d'une maladie systémique dont le rein est la cible.
Un dysfonctionnement des lymphocytes (T et B) entraîne la production d'un facteur plasmatique circulant qui altère la barrière de filtration glomérulaire. Ceci cause une protéinurie et ainsi une hypoalbuminémie/protidémie, responsable d'une baisse de la pression oncotique et d'une hypovolémie efficace. Ceci est à l'origine du syndrome œdémateux par passage de sodium et d'eau vers le secteur interstitiel et stimulation des mécanismes de la rétention hydrosodée.

 

II. Diagnostic du syndrome néphrotique en poussée

A. Tableau clinique

Circonstances :

  • terrain : enfant âgé de 1 à 10 ans (surtout < 6 ans), plus fréquent chez le garçon ;
  • facteurs déclenchants possibles : infection, allergie ;
  • début : souvent brutal, diagnostic fortuit rarissime.
Signes :
  • syndrome œdémateux :
    • œdèmes blancs, mous et indolores (fig. 47.2), déclives, prédominant au visage au réveil (bouffissures des paupières) et aux chevilles en fin de journée ; 
    • prise de poids ;
    • possible tableau d'anasarque (hydrocèle, épanchement pleural transsudatif, ascite) ;
  • hématurie microscopique, pression artérielle à la limite supérieure de la normale ou insuffisance rénale fonctionnelle possibles.
Complications parfois révélatrices :
  • hypovolémie : douleurs abdominales, asthénie, tachycardie ; voire collapsus, insuffisance rénale aiguë fonctionnelle, hémoconcentration, diminution de l'index cardiothoracique ; œdème aigu pulmonaire rarissime en dehors de prescriptions inappropriées de perfusions d'albumine ;
  • thromboses de tous les territoires veineux et artériels : embolie pulmonaire, thrombose des veines rénales ou des sinus cérébraux ; risque majoré par l'utilisation inadéquate des diurétiques ;
  • infections bactériennes à germes encapsulés (pneumocoque, méningocoque, Haemophilus) du fait de la fuite urinaire d'opsonines du complément : infection du liquide d'ascite (notamment à pneumocoque), pneumopathie, méningite, septicémie ;
  • infections virales du fait de l'hypogammaglobulinémie et des immunosuppresseurs : grippe, varicelle maligne.
syndrome œdémateux
Fig. 47.2. Syndrome œdémateux lors d'une poussée de syndrome néphrotique.

(Source : Boyer O. In : Bourrillon A., Benoist G., Chabrol B., Chéron G., Grimprel E. Pédiatrie pour le praticien. 7e édition. 2020 Elsevier-Masson SAS ; Tous droits réservés)

 

B. Bilan étiologique

1. Données cliniques

  • Anamnèse : antécédents personnels et familiaux, infection récente, allergie, prise médicamenteuse, ancienneté des œdèmes.
  • Examen clinique : œdèmes, PA, angine, infection cutanée, purpura, signes généraux.

 

2. Enquête paraclinique

Examens diagnostiques :

  • urinaires : BU (recherche de protéinurie et d'hématurie), rapport protéinurie/créatininurie sur échantillon d'urines le matin ;
  • sanguins : albuminémie et/ou protidémie.

Évaluation de certaines complications :

  • ionogramme sanguin, créatininémie, urée sanguine ;
  • radiographie de thorax : parfois utile en cas de difficulté à évaluer cliniquement la volémie (index cardiothoracique).

Examens à visée étiologique :

  • dosage du complément (C3, C4, CH50) ; sa normalité permet d'éliminer d'autres syndromes néphrotiques présentant un tableau initial voisin : GNA, lupus, GNMP ;
  • biopsie rénale (après échographie rénale, en l'absence de contre-indication) :
    • non indiquée (la corticosensibilité confirmant le diagnostic) sauf chez les enfants < 1 an ou > 11 ans et/ou en cas d'insuffisance rénale aiguë organique, atteinte extrarénale ou baisse prolongée du complément ; et secondairement en cas de corticorésistance ;
    • description caractéristique : lésions glomérulaires minimes (LGM : glomérules normaux en microscopie optique, sans dépôt en immunofluorescence, avec fusion des pieds des podocytes en microscopie électronique) ou plus rarement une hyalinose segmentaire et focale (HSF).

 

C. Diagnostic différentiel

Évoquer :

  • autres causes d'œdèmes : allergie, insuffisance cardiaque, insuffisance hépatique ;
  • autres glomérulonéphrites : GNA post-infectieuse, purpura rhumatoïde, Berger, lupus, vascularite à ANCA, GNMP, GEM… Un syndrome néphrotique peut être le mode de révélation de toute glomérulopathie primitive.
Syndrome néphrotique = rapport protéinurie/créatininurie > 200 mg/mmol (ou protéinurie > 50 mg/kg par 24 heures) et hypoalbuminémie < 30 g/l et/ou hypoprotidémie < 60 g/l.
Biopsie rénale non indiquée en cas de syndrome néphrotique idiopathique typique.
Complications : hypovolémie, infections bactériennes, thromboses.

 

III. Prise en charge thérapeutique

A. Orientation

Une hospitalisation peut être nécessaire à la phase initiale du traitement pour une éducation thérapeutique ou en cas de complications.
Un avis néphrologique est nécessaire en cas de rechute ou au moindre doute dans la prise en charge diagnostique ou thérapeutique.

 

B. Traitement étiologique

Traitement de la première poussée :

  • corticothérapie orale pendant 4 semaines et mesures associées ;
  • ± 3 bolus de méthylprednisolone (prescrits en l'absence de rémission à l'issue de la corticothérapie orale).

Selon évaluation de la réponse thérapeutique :

  • corticosensibilité (90 % : rémission complète = protéinurie négative < 0,02 g/mmol de créatininurie) → décroissance de la corticothérapie ± traitements d'épargne cortisonique en cas de corticodépendance ;
  • corticorésistance (10 % : persistance du syndrome néphrotique 8 jours après les 3 bolus de méthylprednisolone faisant suite aux 4 semaines de corticothérapie per os) → biopsie rénale, analyse génétique et adjonction d'un immunosuppresseur.

 

C. Mesures associées et autres traitements symptomatiques

Mesures associées :

  • prévention des thromboses : mobilisation, maintien d'une euvolémie ; parfois héparine de bas poids moléculaire et/ou aspirine ;
  • régime alimentaire : limité en sel, en sucres rapides et en calories ;
  • restriction hydrique : seulement si hyponatrémie ;
  • protecteur gastrique et supplémentation en potassium : non systématiques ;
  • mise à jour du calendrier vaccinal :
    • vaccination pneumococcique 23-valente, vaccination antigrippale annuelle ;
    • vaccins vivants : contre-indiqués sous corticothérapie forte dose ou immunosuppresseur ;
  • prise en charge à 100 % (ALD30) et PAI ;
  • éducation thérapeutique.

Traitements symptomatiques :

  • perfusion d'albumine : uniquement si complication (hypovolémie, œdèmes/épanchements symptomatiques) ;
  • diurétiques : à éviter car risque de majoration de l'hypovolémie et de l'état d'hypercoagulabilité ; seulement après avis spécialisé en cas d'œdèmes et/ou d'épanchements très importants ayant un retentissement clinique, avec perfusion d'albumine.

 

D. Suivi et évolution

Suivi :

  • BU quotidienne (carnet de suivi) pour dépister et traiter au plus vite les rechutes ;
  • surveillance des complications :
    • aiguës : voir supra ;
    • iatrogènes : complications cortico-induites (retard de croissance surtout ; surpoids, vergetures, HTA, glaucome, cataracte, ostéopénie) et complications des traitements d'épargne cortisonique ;
  • évaluation de l'adhésion thérapeutique.

Évolution de la maladie :

  • la réponse à la corticothérapie est le principal élément pronostique ;
  • 90 % de corticosensibilité (bon pronostic rénal à long terme) :
    • poussée unique ou rare : 20 % ;
    • rechutes : 80 % (parfois multiples), corticodépendance ;
  • 10 % de corticorésistance (parfois d'origine génétique) : risque d'insuffisance rénale chronique et terminale et de récidive sur le greffon ; complications du SN prolongé : dénutrition, ralentissement de la croissance staturale, ostéoporose, hyperlipémie, anémie hypochrome, anomalies de la pharmacocinétique des médicaments liés à l'albumine.
Corticothérapie à fortes doses et mesures associées.
Prévention et traitement des complications (thromboses et infections).
Suivi clinique avec BU pour dépistage des rechutes, éducation thérapeutique.

 

Hématurie

I. Pour bien comprendre

Il s'agit d'un motif de consultation fréquent en pédiatrie : 4 % des enfants ont une hématurie microscopique isolée, souvent de découverte fortuite, qui peut être transitoire.

Première étape de la prise en charge diagnostique d'une suspicion d'hématurie : confirmer l'hématurie → cytologie urinaire sur miction > 5 à 10 hématies par μl ; en règle, l'hématurie devient macroscopique au-delà de 500/μl.

Trois grands cadres sont à distinguer : les hématuries d'origine urologique, les hématuries d'origine rénale et les exceptionnelles hématuries secondaires à des troubles de la coagulation.

 

II. Orientation diagnostique

A. Anamnèse

Différencier une hématurie urologique d'une hématurie rénale (d'autant plus difficile que l'enfant est jeune) :

  • chronologie de l'hématurie = valeur localisatrice : hématurie initiale plutôt d'origine urétroprostatique, hématurie terminale d'origine vésicale et hématurie totale d'origine urétérale (ou rénale) ;
  • caractéristiques de l'hématurie :
    • hématurie de sang rouge, avec des caillots, parfois accompagnée de signes fonctionnels urinaires et/ou de douleurs vésicales : cause urologique ;
    • hématurie sans caillots, sans signes fonctionnels urinaires, couleur marron (« bouillon de bœuf » ou « coca-cola »), totale et persistant sur plusieurs mictions : cause rénale ;
  • contexte et signes en faveur d'une :
    • atteinte urologique : signes fonctionnels urinaires, douleur vésicale ou de type colique néphrétique, traumatisme lombaire ou abdominal récent, pyurie ;
    • atteinte rénale : infection cutanée ou ORL récente, prise de poids récente, œdèmes, signes extrarénaux de maladies systémiques.

Autres données à rechercher :

  • antécédents personnels et familiaux d'hématurie, lithiase rénale, surdité, néphropathie, tumeur, drépanocytose et maladies auto-immunes ;
  • prise récente de médicaments (notamment AINS) ;
  • effort physique intense récent ;
  • voyage en zone à risque de bilharziose ;
  • contexte à risque de tuberculose.

 

B. Bilan étiologique de première intention

1. Données d'examen clinique

  • Poids, taille, température, PA (voir chapitre 50).
  • Examen clinique complet : œdèmes, signes extrarénaux, masse abdominale, examen des organes génitaux externes.

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2. Enquête paraclinique

Examens biologiques
  • ECBU : cytologie et recherche d'infection.
  • Protéinurie et créatininurie sur miction (protéinurie souvent positive en cas d'hématurie macroscopique : contrôle à distance nécessaire).
  • Estimation de la fonction rénale (débit de filtration glomérulaire) : formule de Schwartz.
  • Selon l'orientation étiologique (urologique, rénale) : dosage du complément (C3), bilan de lithiase (rapport calciurie/créatininurie), recherche de bilharziose…
Examens radiologiques
  • Échographie rénale et des voies urinaires : traumatisme, abcès, lithiase, tumeur.
  • Autres examens (uro-scanner, IRM, cystoscopie) à discuter après avis spécialisé.

 

C. Causes principales

1. Hématuries d'origine urologique

  • Cystites bactériennes (voir chapitre 36), plus rarement mycobactériennes (tuberculose), virales ou parasitaires (bilharziose), toxiques (cyclophosphamide).
  • Lithiase.
  • Traumatisme rénal ou des voies urinaires.
  • Tumeurs rénales et des voies urinaires.
  • Saignement d'un kyste rénal.
  • Hématurie d'effort.

 

2. Hématuries d'origine néphrologique

  • Glomérulopathies : elles peuvent toutes être associées à une hématurie.
  • Syndrome néphritique aigu : glomérulonéphrite aiguë (GNA) post-infectieuse (voir supra section « Protéinurie »).
  • SHU (avec ou sans diarrhée prodromique).
  • Syndrome des hématuries récidivantes : néphropathie à IgA et syndrome d'Alport.
  • Plus rarement : néphrites tubulo-interstitielles immuno-allergiques, infarctus rénaux ou nécroses papillaires (drépanocytose).
  • Syndrome « casse-noisette » (lié à la compression de la veine rénale gauche entre l'aorte et l'artère mésentérique supérieure).

 

3. Cas de l'hématurie en période néonatale

  • Toute hématurie doit faire suspecter une thrombose des veines rénales, ce d'autant plus qu'il existe des facteurs de risque (souffrance fœtale).
  • Diagnostic différentiel : cristaux d'urate, sous forme de cristaux orange dans la couche (fig. 47.3) avec BU négative (bénin). 

 

D. Synthèse

La figure 47.4 propose un arbre décisionnel.

cristaux
Fig. 47.3. Cristaux d'urate dans la couche.
 
Image
Fig. 47.4. Enquête étiologique devant une hématurie chez l'enfant.

 

Références

HAS. Syndrome néphrotique idiopathique de l'enfant. PNDS. 2008, actualisation. 2016. Fila M,, Amouroux C,, Morin D. Hématurie microscopique  http://www.has-sante.fr/portail/upload/docs/application/pdf/2016-04/pnds_-_syndrome_nephrotique_idiopatique_de_lenfant_2016-04-29_15-02-42_382.pdf
Pas à pas en pédiatrie. Arbres décisionnels commentés des Sociétés de. pédiatrie.. 2018. https://pap-pediatrie.fr/nephro-uro/hematurie-microscopique