Handicap

Texte

 

ITEM 56 L'enfant handicapé : orientation et prise en charge (voir items 118, 121)

  • Argumenter les principes d'orientation et de prise en charge d'un enfant handicapé.
  • Connaître les filières de prise en charge médicale, médico-sociale et de scolarisation de l'enfant handicapé : décrire le rôle de la maison départementale des personnes handicapées et identifier les interlocuteurs du médecin dans le système éducatif. 

 

Avant de commencer…

Le handicap répond à une définition inscrite dans un texte législatif.
La connaissance de la prise en charge globale d'un enfant handicapé est utile pour tout médecin.

 

I. Pour bien comprendre

A. Définition du handicap

D'après la loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées, le terme de handicap est défini ainsi : « Constitue un handicap toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de santé invalidant. »

Ces dispositions législatives concernent également les enfants porteurs de maladies chroniques (trouble invalidant de la santé).

L'OMS a adopté en 2001 une nouvelle classification du handicap, la CIF (Classification internationale du fonctionnement, du handicap et de la santé), qui représente le handicap comme le résultat de l'interaction des caractéristiques de santé personnelles de l'individu et des facteurs environnementaux.

 

B. Épidémiologie

La prévalence des handicaps de l'enfant n'a pas diminué ces dernières décennies.
La proportion d'enfants déficients est proche de 2,5 % tous handicaps confondus.
Les donnés chiffrées ci-dessous sont données à titre indicatif et ne sont pas à retenir. .Ce taux se situe ainsi autour de 6,6 enfants pour 1 000 naissances pour les handicaps neurosensoriels sévères (trisomie 21, retards mentaux sévères, paralysies cérébrales, surdités sévères, autisme et troubles du spectre autistique) ; de 3 pour 1 000 pour les déficiences motrices comme pour les déficiences intellectuelles sévères ; de 2,5 pour 1 000 pour les troubles psychiatriques et de 1,5 pour 1 000 pour les déficiences sensorielles sévères.
Par ailleurs plus de 1 % des enfants sont atteints d'autres anomalies responsables de handicaps (maladies somatiques, malformations). Ce taux est beaucoup plus élevé chez les enfants nés prématurément (< 32 SA) où il est montré que 3 à 9 % seront porteurs d'une paralysie cérébrale, 15 à 20 % présenteront une déficience intellectuelle modérée ou profonde et 3 à 4 % seront porteurs d'une déficience visuelle ou auditive sévère.
Enfin, les troubles du neurodéveloppement, toutes causes confondues, représentent 45 % des maladies chroniques de l'enfant (source CNAMTS).

 

C. Dispositions législatives

Elles posent le principe d'un droit pour la personne handicapée, le droit à compensation des conséquences de son handicap, quels que soient l'origine et la nature de sa déficience, son âge ou son mode de vie.
La compensation du handicap de l'enfant est assurée par l'allocation pour l'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) et la prestation de compensation du handicap (PCH), mais également par l'offre de services et de places dans les établissements du secteur médicosocial.

Selon le principe d'un lieu unique destiné à faciliter les démarches des personnes handicapées, il existe dans chaque département une Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) offrant un accès unique aux droits et prestations. Elle informe et accompagne les personnes handicapées et leurs familles dès l'annonce du handicap et tout au long de son évolution.
Elle assure l'organisation de la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH) et le suivi de la mise en œuvre de ses décisions, ainsi que la gestion du fonds départemental de compensation du handicap.

Retenir la définition du handicap.
Connaître les rôles principaux de la MDPH.

 

II. Filières de prise en charge médicale, médicosociale et de scolarisation de l'enfant handicapé

A. Préambule

1. Prise en charge d'un enfant ayant un trouble du neurodéveloppement

La découverte d'un trouble du neurodéveloppement chez un enfant justifie une recherche systématique des différentes causes connues à ce jour.

Lorsque le diagnostic causal est porté, l'annonce du diagnostic et de ses conséquences doit être clairement faite selon des règles de bonne pratique, telles que :

  • annonce faite par un médecin expérimenté qui connaît le handicap de l'enfant ;
  • aux deux parents ensemble ou en présence d'un proche ;
  • au cours d'un colloque singulier dans un lieu tranquille (temps et disponibilité) ;
  • le plus précocement possible pour éviter des périodes de doute ;
  • avec un langage simple et accessible (notion de filtrage sélectif, de sidération) ;
  • en évitant les veilles de week-end ou de vacances, avec prévision d'entretiens ultérieurs ;
  • possibilités de prise en charge et de soutien dès l'annonce.

Cette étape est essentielle. Elle permet la mise en place d'un accompagnement pluridisciplinaire de l'enfant en situation de handicap et de sa famille. Parfois, dans les situations les plus sévères, où le pronostic vital est mis en jeu, la mise en place d'un accompagnement de fin de vie sera nécessaire.

Les objectifs de la prise en charge reposent avant tout sur la prévention du surhandicap en aidant ces enfants, qui ne guériront pas de leurs troubles mais pourront développer des stratégies pour les contourner.

 

2. Principes d'orientation de l'enfant handicapé

Un enfant reconnu handicapé doit pouvoir bénéficier d'une éducation spéciale, gratuite, qui associe des actions médicales, paramédicales, sociales, pédagogiques et psychologiques.

 

B. Scolarisation

1. Généralités

Tout enfant handicapé peut être inscrit dans « l'école ou l'établissement du second degré de son quartier », qui constitue son établissement scolaire de référence.
Le droit à la scolarité s'intègre dans le projet personnalisé de scolarisation (PPS) qui s'établit en lien avec l'équipe éducative (au sein de laquelle le médecin scolaire doit avoir une place essentielle), les parents, un enseignant référent de la MDPH et les équipes de soins. Les parents sont étroitement associés à l'élaboration de ce projet personnalisé ainsi qu'à la décision d'orientation, prise en accord avec eux par la CDAPH.
Le PPS est un projet individualisé dynamique adapté aux besoins réels de l'enfant.

La scolarisation comporte pour tout enfant deux volets : celui des apprentissages proprement dits et celui de la vie en groupe. À côté du PPS, l'enfant porteur de handicap doit pouvoir participer à des activités de loisirs (centres de loisirs, centres aérés et colonies de vacances).

 

2. Intégration individuelle en classe scolaire

Elle peut se faire avec le soutien d'un auxiliaire de vie scolaire (AVS) ce qui permet à un certain nombre d'enfants handicapés de trouver leur place dans la classe.
Les AVS sont des personnels non enseignants, mis à disposition des établissements pour intervenir auprès d'un enfant porteur d'un handicap. Cette mesure est décidée sur étude de dossier par la commission des droits à l'autonomie de la MDPH.

Enfin, tous les examens et concours organisés par l'Éducation nationale offrent des possibilités d'aménagements étendus et renforcés pour les candidats handicapés (tiers temps supplémentaire, assistant de secrétariat…).

 

3. Classes d'intégration collective

En primaire, les ULIS École (unités localisées pour l'inclusion scolaire) accueillent 12 enfants au maximum. Elles sont spécialisées par types de handicap et destinées à accueillir des élèves ayant :

  • des troubles des fonctions cognitives ou mentales ;
  • des troubles spécifiques du langage et des apprentissages ;
  • des troubles envahissants du développement (dont l'autisme) ;
  • des troubles des fonctions motrices ;
  • des troubles de la fonction auditive ;
  • des troubles de la fonction visuelle ;
  • des troubles multiples associés (pluri-handicap ou maladies invalidantes).

Les ULIS Collège et Lycée assurent une continuité avec les ULIS École à partir de 11 ans.

Au collège, les SEGPA (sections d'enseignement général et professionnel adapté) accueillent les élèves ayant des difficultés d'apprentissage graves et persistantes. Il s'agit d'un enseignement adapté qui vise une qualification professionnelle.

 

C. Dispositifs d'accompagnement de l'intégration en milieu ordinaire

1. Généralités

Plusieurs structures apportent un soutien à l'intégration scolaire.
Pluridisciplinaires, elles définissent et mettent en œuvre pour chaque enfant un projet éducatif, pédagogique et thérapeutique en association avec les parents.

 

2. CAMSP

Pour les enfants âgés de 0 à 6 ans, les CAMSP (centres d'action médicosociale précoce) ont pour objet le dépistage, la prise en charge et la rééducation en ambulatoire des enfants ayant des déficits sensoriels, intellectuels ou moteurs, en vue d'une adaptation sociale et éducative dans leur milieu naturel et avec la participation de leurs familles.
Ils fonctionnent avec une équipe pluridisciplinaire, tant au niveau médical (pédiatres, pédopsychiatres) que paramédical (kinésithérapeutes, psychomotriciens, orthophonistes, psychologues, etc.).

Ce type de prise en charge ne nécessite pas d'orientation par la MDPH ; l'accès y est direct à la demande de la famille ou de médecins.

 

3. Autres services ne nécessitant pas d'orientation MDPH

D'autres services peuvent également intervenir :

  • pour les enfants âgés de 3 à 18 ans ayant des troubles psychoaffectifs, psychomoteurs ou des troubles des apprentissages : les CMPP (centres médico-psycho-pédagogiques) ;
  • pour les enfants ayant des troubles psychiques : les CMP (centres médico-psychologiques) ayant un rôle essentiellement thérapeutique.

Des prises en charge peuvent également être réalisées en secteur libéral (séances de kinésithérapie, d'orthophonie, suivi pédopsychiatrique, neuropédiatrique, de rééducation fonctionnelle). Les frais de rééducations par des psychologues, psychomotriciens et ergothérapeutes en libéral ne sont pas pris en charge par la Sécurité sociale et ne sont compensables que par les allocations versées par la MDPH (AEEH).

 

4. Services médicosociaux d'accompagnement nécessitant une orientation MDPH

Pour les enfants âgés de 0 à 20 ans, différents services d'accompagnement existent.

Ils se répartissent en plusieurs catégories selon le handicap :

  • SESSAD (services d'éducation spéciale et de soins à domicile) pour les enfants atteints de déficiences intellectuelles et motrices, mais aussi de polyhandicap ;
  • SAFEP (services d'accompagnement familial et d'éducation précoce) pour les enfants âgés de 0 à 3 ans ayant une déficience auditive et visuelle ;
  • SSEFIS (services de soutien à l'éducation familiale et à l'intégration scolaire) pour les enfants déficients auditifs âgés de plus de 3 ans ;
  • SAAAIS (services d'aide à l'acquisition de l'autonomie et à l'intégration scolaire) pour les enfants déficients visuels âgés de plus de 3 ans.

 

D. Intégration en établissement médicosocial

1. Généralités

Si tout enfant handicapé peut être inscrit dans « l'école ou l'établissement du second degré de son quartier », il peut exister des limites à cette intégration.

Le pédiatre doit veiller à ce que l'enfant ne paye pas son adaptation scolaire à un prix méconnu : efforts incessants, sentiment de ne jamais en faire assez et devoir en faire toujours plus.
Ce sentiment risque de le conduire à une profonde dévalorisation allant jusqu'à la phobie scolaire. Il faudra évaluer la souffrance éventuelle de l'enfant et la faire admettre aux parents dans l'intérêt de l'enfant ; ce qui peut dans un premier temps être vécu comme une source de conflit avec ceux-ci.

Dès lors, une orientation en milieu spécialisé ne doit pas être ressentie comme un échec mais comme un passage pour atteindre d'autres objectifs, mais dont la finalité est toujours la même : donner l'autonomie et l'intégration sociale les meilleures possible.

 

2. Structures

Différentes structures proposent une prise en charge au long cours de la totalité ou d'une partie des besoins de l'enfant handicapé tant au niveau éducatif que rééducatif et psychologique.
L'accès se fait par l'intermédiaire de la CDAPH de la MDPH.

Il s'agit principalement :

  • d'IME (instituts médico-éducatifs) pour les enfants âgés de 0 et 20 ans, en distinguant les établissements pour enfants ayant une déficience intellectuelle, de ceux pour enfants ayant une déficience motrice, de ceux pour enfants polyhandicapés, de ceux pour enfants ayant une déficience auditive grave, et de ceux pour enfants ayant une déficience visuelle grave ou cécité ;
  • d'IMPRO (instituts médico-professionnels) après l'âge de 14 ans afin de donner une formation professionnelle ;
  • d'IR (instituts de rééducation) pour des enfants ayant des difficultés scolaires sévères associées à des troubles du comportement ;
  • des IEM (instituts d'éducation motrice) pour les enfants atteints de déficience motrice sévère.

 

E. Aides financières et sociales

La prise en charge sociale repose avant tout sur la rédaction de certificats médicaux qui doivent être précis, clairs, synthétiques et contenir des éléments pertinents (certificat MDPH et ALD [affections longue durée]). Ces certificats sont soumis au secret médical.

Les enfants handicapés bénéficient d'une exonération du ticket modérateur, avec prise en charge à 100 % des frais de santé. Il faut être assuré social ou ayant droit.
Les causes de handicap entrent soit dans la définition d'une des 30 affections de longue durée, soit dans la définition de la 31e maladie (maladie longue et coûteuse hors liste).
Cette prise en charge recouvre les soins médicamenteux et autres, les régimes spécifiques, les séjours hospitaliers, les frais de transport relatifs aux soins, les aides techniques.

L'attribution de l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH) et de ses compléments repose sur les conditions suivantes : toute personne qui assure la charge d'un enfant handicapé âgé de moins de 20 ans si l'incapacité de l'enfant est au moins égale à 80 % (perte de l'autonomie pour la plupart des actes de la vie quotidienne), ou entre 50 et 80 % s'il est placé en externat ou en semi-internat dans un établissement spécialisé ou pris en charge par un SESSAD. Seule l'AEEH permet l'exonération du forfait hospitalier.
Les compléments sont attribués aux personnes dont la nature ou la gravité du handicap exige des dépenses particulièrement coûteuses ou le recours fréquent à une tierce personne. Il existe des compléments de six catégories différentes.
Cette attribution relève de la compétence de la CDAPH de la MDPH.

La carte d'invalidité est attribuée lorsque le taux d'incapacité est égal ou supérieur à 80 %. Les avantages obtenus sont divers : macaron GIC, exonération de la redevance TV, frais d'aide à domicile, gratuité des transports pour l'accompagnant.
Elle relève de la compétence de la MDPH.

L'allocation journalière de présence parentale (AJPP) est attribuée lorsque l'enfant est atteint d'une maladie, d'un handicap, ou victime d'un accident rendant indispensable une présence parentale soutenue et des soins contraignants. Le congé est d'une durée de 310 jours à prendre sur 3 ans en fonction des besoins d'accompagnement de l'enfant. L'obtention du congé n'est pas cumulable avec le complément d'éducation spéciale perçu pour le même enfant. L'AJPP est par contre cumulable avec l'AEEH simple.

Des aides à domicile sont également possibles.
Toute prescription de soins médicaux ou paramédicaux à domicile peut être assurée soit par des professionnels libéraux payés à l'acte, soit par des services de soins infirmiers à domicile dans les conditions habituelles de prise en charge de l'Assurance maladie.
Diverses interventions sociales (auxiliaires de vie, aides ménagères, travailleuses familiales) peuvent être assurées à domicile ; elles ne sont pas prises en charge par l'Assurance maladie mais peuvent relever d'autres aides (collectivités locales, État…).

Retenir les différentes possibilités éducatives pour l'enfant handicapé.
Certificats médicaux, 100 %, AEEH, carte d'invalidité, AJPP, aides à domicile.

 

Références

Auto-saisine de la Conférence Nationale de la Santé. Avis du 21 juin 2012 sur «le dépistage, le diagnostic et l'accompagnement précoce des handicaps de l'enfant». Loi n° 2005-102 du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées.